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Démanteler le dancefloor : les 5 performances engagées à voir au Positive Education

Démanteler le dancefloor : les 5 performances engagées à voir au Positive Education

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Dans quelques jours, le Positive Education investira de nouveau les sols de la Cité du Design à Saint-Etienne du 8 au 13 novembre. Pour se préparer à ce week-end prolongé de découvertes endiablées, nous avons scruté la programmation comme de bon·nes élèves pour y dénicher les cinq performances qui ont éveillé notre curiosité.

Cette édition du Positive Education s’annonçait déjà spéciale, car elle fait office d’adieu à la Cité du Design. Depuis ses débuts, le festival avait pour habitude de faire danser parmi les murs industriels du lieu, propice aux réverbérations électroniques diverses. À cette occasion, les programmateur·ices font un tour d’horizon des évolutions musicales et sociales qui sont apparues dans la musique électronique ces dernières années : Plus de fxmmes et d’artistes queers qui gagnent de la place pour exprimer leur vision des choses. Plus d’expérimentation, car le club ouvre ses chakras pour accueillir la pluralité de l’électronique, qui souhaite faire réfléchir tout en dansant. Chacun des cinq projets sélectionnés par Manifesto XXI promulgue l’importance d’un message ; qu’il soit au niveau de l’évolution de la réception d’un genre musical, l’introduction de nouvelles formes de création, ou l’envie de se proposer politiquement et émotionnellement, à travers son œuvre.

Tera Octe & Clara!, le 10 novembre de 23:15 à minuit à la Cité du Design.

Cette année, les programmateur·ices du Positive Education se sont amusé·es à créer des binômes stimulants pour un live scellé dans le temps, unique. Parmi eux, on note Tera Octe et Clara! qu’on ira voir pour cette curieuse combinaison d’univers parallèles. Clara! s’est fait connaître pour son don de faire évoluer le reggaeton grâce à des rythmiques tirées du club. Les rythmiques sont dansantes, mais elles se veulent plus sombres et moins lisses. Dans Reggaetoneras 3, la productrice avait d’ailleurs analysé les évolutions du genre et la place de la femme dans son rayonnement.

Tera Octe est le projet solo de Jonquera, membre du duo The Pilotwings. Un délire hardstyle qui lui est propre et se distingue de ses productions plutôt introspectives diffusées sous son alias Jonquera. Ici, la fête et le bonheur sont honorés. Dans son album +, on retrouve des éléments de baile funk et reggaeton qui ont peut-être pu mettre la puce à l’oreille de l’équipe de Positive Education pour créer ce duo de choc.

Zohar, le 10 novembre de 01:00 à 2:30 à la Cité du Design.

La Néerlandaise Zohar se fraye une place dans le Benelux par ses sets enflammés et distordus. Dans le radar de DKMTL depuis quelques années, sa présence se fait de plus en plus fréquente dans nos clubs et nos radios (Rinse France et NTS) et on aura l’honneur de participer à sa première performance en France. Son approche se base sur des structures sonores granuleuses et breakées. Ses univers varient de club music, du dub, à de l’expérimental et de l’ambient. Elle oscille subtilement entre ces univers pour une écoute fluide qui ne laisse toutefois pas les clubbeurs de marbre. Si on en croit le travail réalisé sur ZH002 ZOHAR – OBJECT, elle a tendance à s’orienter vers des harmonies métalliques, percussionnistes et fragmentées. Zohar sévit en rendant grâce à la texture du son, tout en la rendant vivante et dansante. Avec elle, nous danserons, pris d’un vague à l’âme qui sert d’exutoire.

Caïn و Muchi, le 11 novembre de 23h à minuit à la Cité du Design.

© Diane Rigou-Chemin

La symbiose de Vanda Forte et Sinclair Ringenbach se fait de part et d’autre de la Méditerranée, jusqu’à leur rencontre l’an passé à Marseille. Caïn و Muchi permet aux deux artistes d’unir leurs forces de parcours pour raconter une histoire qui leur est unique. Le sound design de Sinclair vient orner les élévations vocales de Vanda qui viennent contrer une scène musicale occidentale encore un peu trop cloisonnée. Le projet s’inspire d’instruments de la région du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, en les agrémentant de percussions bass, club et expérimentales. Ce choix n’est pas anodin pour Vanda Forte, qui a déferlé sur les clubs de France avec sa sélection pointilleuse et son énergie explosive. Ici, iel se dévoile pour poser sa voix cristalline sur des textes forts qui souhaitent faire du club un terrain de déconstruction et de lutte.

Iceboy Violet, le 12 novembre de minuit à 00:45 à la Cité du Design.

Iceboy Violet fait partie de cette vague de créateur·ices du Nord de l’Angleterre qui veut voir la compréhension du rap évoluer. Tout comme Blackhaine, AYA, Rainy Miller, iel exprime des violences émotionnelles subies et l’incompréhension sociale. Invoquer ces sujets de révolte interne et de sentiment d’injustice ne nous semble pas anodin étant donné le fort héritage musical de la région de Manchester. On se souvient des Smiths, de Joy Division, New Order, the Stone Roses qui jouaient sur le conflit symbolique du tourment et de la douceur sentimentale. Iceboy Violet scande à livre ouvert ses peines, en exposant toutes les incertitudes de son être à son audience, avec une certaine pudeur. Pour accompagner son œuvre, iel fait le choix d’investir dans le grime, les glitchs et le drill pour accentuer le sens d’injustice qui se vit en solitaire pour en faire une urgence universelle. En exposant son être, Iceboy Violet tend une main à toustes celleux en potentielle souffrance et leur offrir un lieu où il est acceptable d’en parler pour trouver répit.

Voir Aussi

Sentiments, le 12 novembre de 1:00 à 2:00 à la Cité du Design.

En 2015, Arthur est résident pour Lyl Radio avec son show éponyme Sentiments. Dès 2017, il lance son label Light On Earth et scelle, par cette occasion, une résidence sur la même antenne. Ses compilations sonores l’installent comme une des voix intrigantes de la scène en France. Il n’hésite pas à transporter son auditeur·ice en associant pleins d’horizons variés de son répertoire : trance, breaks, techno, dream pop, jungle, slow house, cosmic soul, dub, trip-hop, downtempo, et la liste est longue. En pause depuis 2021, il nous avait un peu manqué et on avoue avoir hâte de le retrouver derrière les platines au Positive Education. La lutte personnelle de Sentiments est d’écouter son for intérieur. Préservé de la course aux tendances, mais restant aux aguets des nouveautés, Sentiments pioche dans tous les registres pour une exploration musicale multidisciplinaire. La difficulté de le ranger dans une case fait que l’on ne sait absolument pas dans quelle direction son set ira. Et c’est merveilleux, car il reste maître de son œuvre, allant là où lui seul souhaite aller. Une virtuosité qui saura sûrement inspirer et donner des ailes à toustes les jeunes producteur·ices en devenir !


Photo de couverture : © Hortense Giraud.

La billetterie est encore ouverte pour le Positive Education, ici.

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