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Aux 20 ans de Nuits sonores, la fusion prometteuse des labels POLAAR et Shouka

Aux 20 ans de Nuits sonores, la fusion prometteuse des labels POLAAR et Shouka

POLAAR et SHOUKA, deux labels lyonnais reconnus pour leur hybridations musicales fusionnent le temps d’une soirée dans le hangar H7. Invités par Nuits sonores, ils promettent une énergie du feu avec des live de FRIGYA et Ninos Du Brasil, et un très attendu DJ set triple b2b avec Deena Abdelwahed, Flore et GLITTER55. 

Alors que Nuits sonores s’apprête à fêter ses 20 ans à Lyon, la soirée du 20 mai a en particulier a retenu notre attention pour sa programmation éclectique et aventureuse. Rencontre avec Khalil Epi, gérant de SHOUKA (et moitié de FRIGYA), producteur et musicien, et Flore, résidente du Sucre, co-manageuse du label lyonnais POLAAR (qui l’année prochaine célèbrera ses 10 ans), figure incontournable de la scène bass music française.

Manifesto XXI – Comment a émergé cette collaboration entre POLAAR et SHOUKA pour les 20 ans de Nuits sonores ? 

Flore : Avec l’équipe de SHOUKA ça fait un moment qu’on se croise et qu’on se dit qu’on a envie de faire un évènement ensemble. Les équipes de Nuits sonores ont eu envie de faire collaborer deux structures lyonnaises et ça fait sens, parce qu’on a des visions pas identiques mais connexes. 

Khalil Epi : Comme on est tous les deux résidents au Sucre, on avait déjà eu l’idée de faire quelque chose ensemble. Aussi, on s’entend bien artistiquement. On essaye de faire collaborer nos artistes entre nos deux labels. Bientôt ça s’appellera SHOUKLAAR (rires).


SHOUKA, dans votre bio twitter, on peut lire « Third World music and cultural reappropriation ». Qu’entendez-vous par ces termes et comment cela régit l’esthétique du label ? 

Khalil Epi : Il y a pas mal de sarcasmes là-dedans. Beaucoup de nos artistes viennent de ce qu’on considère comme le tiers monde. On aurait pu mettre world music, mais ce sont des termes qui ont un peu la même connotation. 

L’exercice de la réappropriation, on l’a commencé il y a 10 ans avec des albums de Stambali, un genre de musique d’Afrique subsaharienne, implanté dans certaines régions de Tunisie. Par la suite, ça a un peu été le mot d’ordre. Mais on a envie de s’ouvrir. Par exemple on travaillerait bien avec des artistes français qui se réapproprient des musiques occidentales, alpines, corses… 

On a beaucoup de projets qui consistent à se réapproprier du patrimoine populaire et traditionnel d’où vient l’artiste, mais qui transforment ça en quelque chose de contemporain et dansant. Comme POLAAR, SHOUKA a une esthétique très bass music. 


Flore, ça fait deux décennies que tu es active sur la scène lyonnaise, notamment avec le label et les soirées POLAAR. Qu’as-tu appris de ces années d’expérience et que voudrais-tu nous partager de l’évolution de la scène électronique lyonnaise ?

Flore : Lyon a toujours été vraiment intéressante d’un point de vue musical. Quand j’ai commencé il se passait déjà beaucoup de choses sur la scène dub, alternative, punk, techno…

C’était une scène hyper engagée dans la fin des années 90, début des années 2000, qui allait avec un choix de vie spécifique. Ça a complètement changé aujourd’hui. La musique électronique n’est plus underground. Elle est bien plus structurée et représente une économie conséquente.

La scène est aussi devenue plus variée qu’elle ne l’était. Il y avait bien une scène techno, mais depuis 5 ans, on observe une multiplicité d’esthétiques et un melting pot intéressant. Les gens se croisent plus qu’auparavant. C’est sûrement une conséquence du streaming, par lequel les auditeur·ices sont amené·es à écouter une multiplicité de styles et à s’ouvrir. Les frontières de genres se dissolvent beaucoup. 

Aujourd’hui je trouve la scène assez dynamique. Il manque juste des lieux à jauge raisonnable, parce qu’il y a des musiques qui ne peuvent se développer et survivre que comme ça, avec des jauges de 250 personnes, par exemple. Ce sont des lieux où l’on pourrait explorer davantage, et encourager des plus petites structures à générer une économie.

Du coup, pour vous, quels sont les progrès mais aussi les limites de la scène musicale lyonnaise ? Est-ce que c’est une ville généreuse pour les musiques métisses, hybrides ? 

Khalil Epi : Cet esprit de collaboration est de plus en plus présent. Les esthétiques sont beaucoup plus fluides et hybrides. On a plus tellement de soirées cantonnées à un genre, qu’on a eu pendant des décennies. Et le public est devenu plus ouvert. En ça, Lyon rassemble beaucoup et je pense qu’il faut en faire une richesse et continuer dans ce sens là.

Flore : Je suis d’accord avec Khalil. Je trouve qu’il y a de l’échange et un soutien mutuel entre les scènes. Ce qui est bien par exemple avec Le Sucre, c’est qu’iels explorent pas mal et peuvent changer de configuration. 

Les limites, comme je disais, c’est toujours le manque de lieux alternatifs plus accessibles, et le manque de prises de risques des grosses structures. Je pense que le public est plus prêt qu’on ne l’imagine. Il y a un lieu comme Le Petit Salon qui a une jauge énorme et qui n’ose pas beaucoup. Sûrement parce qu’il y a des risques économiques plus conséquents mais je pense qu’on peut bousculer l’auditoire en invitant une tête d’affiche et en mettant à côté un·e artiste émergent·e, en explorant des esthétiques complémentaires, par exemple. 

La même chose pourrait être dite pour le Club Transbo… Il y a des lieux dans lesquels on ne m’invite plus à jouer, parce que je pense que c’est lié à un manque de courage, de parti pris artistique, et ça dénote une fainéantise, une facilité dans la programmation.  

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Que peut-on attendre du triple back to back Deena Abdelwahed b2b Flore b2b Glitter55 ?

Flore : C’est un truc qu’on a fait spontanément en closing de Nuits sonores l’année dernière. Deena et Glitter55 faisaient un b2b de manière officielle. J’avais mes clefs USB avec moi, comme souvent, et j’ai passé des tracks avec elles de manière un peu pirate. Ça a beaucoup plu. 

Donc Nuits sonores nous a proposé de remettre ça cette année. Je suis hyper respectueuse de ces deux artistes, et musicalement ça fonctionne parce qu’on fait à la fois des choses qui se rejoignent, tout en arrivant à se surprendre les unes les autres. 

Donc j’encourage tout le monde à venir voir ce que ça donne, ça va être le feu !


En quoi inviter Ninos du Brasil est un choix curatorial / esthétique qui vous relie ?

Khalil Epi : Ça a été une découverte pour moi et en les écoutant ça a fait sens avec nos esthétiques. 

Flore : Très rapidement l’idée de proposer un live est venue sur la table. Parce qu’on s’est dit qu’il y avait une complémentarité avec celui de FRIGYA. Et avec Ninos du Brasil il y a le meilleur des deux univers, il y a le truc très dancefloor, électronique et le truc très punk du live, brut de décoffrage.

C’est aussi sûrement ce qui relie POLAAR et SHOUKA, la musique est portée sur la danse et quelque chose de très viscéral, percussif. Je suis convaincue que si tu écoutes Ninos Du Brasil, même si tu ne connais pas, tu vas danser. C’est un truc qui est populaire au sens noble de la forme. Il y a un parti pris artistique radical, avec des vocalises, etc. Et en même temps, je ne vois pas comment tu peux ne pas bouger sur un truc pareil. 


POLAAR x SHOUKA à H7, 70 quai Perrache 69002 Lyon. Samedi 20 Mai pour NS : 20 ans. Plus d’infos et billetterie

Les suivre sur bandcamp: SHOUKA, POLAAR

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