Le label lyonnais Comic Sans Records dévoile aujourd’hui Osseus Labyrinth, une aventure scientifique et artistique ficelée par Vina Konda. L’EP, riche de six titres, explore la narration sonore du système digestif. Un savoureux mélange de bass music que l’on vous promet être digeste.
Vina Konda imprègne la scène électronique française de son aura spectrale depuis quelques années. Quasi-incognito, mais non moins efficace. Depuis deux ans, il analyse les tendances musicales pour se les réapproprier à sa façon. Tantôt adepte de techno dans ses plus anciennes productions, tantôt astronaute parcourant les sphères ambiantes, il revient aujourd’hui pour sceller son savoir en bass music. Son troisième EP, Osseus Labyrinth sort sur Comic Sans Records, label lyonnais spécialisé dans le breakbeat, l’IDM, la jungle, la drum & bass et toute autre curiosité à faire trembler vos enceintes.
Explorations scientifiques à travers le son
Vina Konda se présente tel un théoricien sonore en clamant, dans son communiqué de presse, que le son appartient à la physique. Dès ses débuts, une grande importance est octroyée à la narration d’un propos techno-scientifique à travers son travail. Dans Osseus Labyrinth, il décide d’avoir une approche plutôt biologique en analysant le parcours digestif de notre corps. S’ensuit un concerto de borborygmes, flatulences, déglutitions et désintégrations organiques qui ne sont que des sources naturelles d’ondes sonores. L’aventure nano-moléculaire se fait avec rythmiques expérimentales tirées de la bass music et magnifiées par des réverbérations puissantes. Celles-ci s’inspirent des échos internes de nos organismes.
Le premier titre « (-C-O-(O)P(O)-O-C-) » inaugure le début de transit avec un trip électronique de 120 bpm. L’évolution anatomique s’accélère avec les 150 bpm de « Melting E. Coli ». Selon Vina Konda, ce titre illustre le combat entre l’intestin et les bactéries néfastes. « All inh(ALL)e » permet de reprendre son souffle suite à cette lutte sonore. On plonge ensuite dans « SNC Modulation », premier titre de la face B de cet EP. Celui-ci annonce l’analyse scientifique qui se fait de ce transit : on assiste à l’échange frénétique entre cérébrale et l’impulsivité des tripes. « Skip in 5 seconds » est un hommage aux laboratoires de Palin Gen, sans qui cette recherche n’aurait pu exister. Les équipes de Palin Gen font régulièrement l’état de leurs recherches dans l’émission Alphabet of the Unknown sur Lyl Radio.
C’est aussi un hommage à ce qu’on écoute sans attention, à l’ère du streaming et du airpod. On clôture cette exploration intestinale avec « >0> » aux ondes plus légères et aériennes. C’est ici que le parcours devient organique lorsqu’il fait son exode hors du corps. Cette concrétisation physique est une possible métaphore du format compact vinyle qui instaure la musique dans une réalité d’écoute plus sérieuse contrairement à celle du streaming.
Des sous-œuvres pour former une totalité
Ayant suivi une formation en beaux-arts, Vina Konda est avant tout un artiste plasticien. Lors d’un entretien avec le mystérieux producteur, on apprend l’importance qu’il octroie au storytelling à travers l’art. Précédemment, nous avons évoqué le titre « SKIP in 5 seconds » d’où émane une voix robotique. Cette voix se retrouve dans les mixs faits par Vina Konda pour Lyl Radio. Ce petit clin d’œil permet d’inscrire l’EP dans une narration plus vaste : celle d’un projet que construit Vina Konda depuis des années. Vina Konda est donc dans une continuité de performances construites et non excluables les unes des autres.
Pour en faire une expérience complète, il se réapproprie des objets et pratiques existantes pour les faire siennes. Vina Konda propose un pack en édition limitée de sonneries téléphoniques, créées spécialement pour le lancement de cet EP . Pour ses futurs live sets, il s’offre une clé USB moulée et reluisante faite par la créatrice Zoe Mohm. Tous ces éléments sont une vitrine du personnage et soutiennent la narration de son œuvre. Ici, les sous-œuvres détiennent autant d’importance que Osseus Labyrinth.
Pour la pochette, Vina Konda fait appel au graphiste Virgile Flores. Le musicien savait qu’il souhaitait mettre en avant des air pods avec du cérumen pour illustrer l’interface homme-machine. Cette interface nous envoie des informations sonores et en retour, nous déposons un peu de notre corps sur la surface. C’est un échange organique qui se fait entre technique et corps humain, nous renvoie ainsi au sujet principal de cet EP.
Ainsi, la musique devient l’opportunité de créer une œuvre complète et de créer tout un écosystème unique en son genre. Pour Vina Konda, ce que l’on appelle la club music évolue pour exister en dehors du club. Ici, on dépasse le physique pour raconter une histoire.
Visuel de couverture réalisé par Virgile Flores.
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