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La révolution écologique n’aura pas lieu sur Instagram

La révolution écologique n’aura pas lieu sur Instagram

ExtinctionRebellion_écologique

Si vous suivez des influenceurs sur Youtube et Instagram, vous avez du remarquer un changement ces derniers mois : les hauls, swaps et autres reviews de produits se raréfient, le consumérisme s’affiche moins, le food porn se fait moins gras et plus bio. Un autre vent semble désormais souffler sur ceux qui autrefois se dédiaient au culte aveugle du consumérisme. Spoiler : La bonne conscience des influenceurs ne sauvera pas la Planète, une réthorique écologique ne remplacera pas une vraie lutte collective.

Les influenceurs se mettent au vert

La transformation s’est manifestée ouvertement en début d’année quand Horia et EnjoyPhoenix, deux influenceuses star du Youtube beauté français, ont annoncé ne plus vouloir recevoir de colis et d’échantillons de la part de marques. Les raisons invoquées ? Le gaspillage, l’abus d’emballage, le carburant dépensé pendant les transports… Les multiples voyages en avion aux frais des annonceurs se raréfient et utiliser du make-up testé sur des animaux est désormais inenvisageable. Dans le même mouvement, les modes de vie et de consommation « alternatifs » ont gagné de plus en plus de terrain chez ces influenceurs lifestyle : cosmétiques faits-maisons, courses en vrac, inscription au AMAP, zéro déchets…

Ces mêmes influenceurs ont été nombreux à rejoindre la campagne “On est prêt” organisée par plusieurs associations (comme Le mouvement ou encore l”EDENI) et fondée par Magalie Payen, ancienne de Canal+ et directrice de la société de production “Imagine 2050”. Le principe ? Donner une astuce par jour pour changer son mode de vie pour le rendre plus écologique, enfin eco-friendly dans le jargon : “Acheter une gourde en inox”, “Cuisiner un bon plat maison”, “Coller un stop-pub sur sa boite au lettre”…

Pendant ce temps, Hugo Clément, autre ancien de Canal affiche sa bonne bouille sur son livre Comment j’ai arrêté de manger des animaux prônant le végétarisme et donne des conférences à la Sorbonne où il explique les bienfaits de la Sodastream… Mais s’emmêle un peu les pinceaux dès qu’il s’agit d’aborder l’aspect politique et surtout intersectionnel de l’écologie…

On peut saluer ce changement et en reconnaître la bonne volonté : nos modes de vie ne sont effectivement plus soutenables à grande échelle et nous gagnerons sans doute bien plus à arrêter de consommer à outrance. On peut donc se réjouir de voir ceux qui sont désormais des icônes culturelles pour les ados prôner des valeurs plus positives que la dernière collection H&M ou une campagne de pub pour Fanta. Mais…

Eco-friendly = eco-capitaliste

La FAQ de “On est prêt” laisse un peu songeur : le mouvement est présenté comme “apartisan”, et il élude la question de l’action collective précisant qu’elle sera prévue “plus tard” sans plus de détails sur le mode d’action envisagé. Plusieurs influenceurs participant à cette campagne se sont d’ailleurs bien gardés de promouvoir un discours politique en précisant que “l’environnement ça nous concerne tous, c’est ni de droite, ni de gauche”.

Et c’est bien là que le bât blesse : oui, l’écologie est politique, oui l’écologie est partisane et oui, la lutte pour la survie de la Planète est avant tout une lutte collective, égalitariste et anticapitaliste.

Il est profondément regrettable, à l’heure où la génération Z a donné ses voix aux écologistes lors des européennes, de complètement mettre sous le tapis la charge politique de l’écologie. Il est profondément dommage d’avoir un discours simpliste et de ne pas inclure toutes les luttes pour la justice sociale dans ce mouvement, à l’heure où cette même génération ne fait pas que marcher mais fait aussi la grève pour le climat, ce qui politiquement a une autre couleur et une autre histoire.

Nous savons tous aujourd’hui que 100 entreprises sont responsables de 70% des émissions de carbone. Promouvoir le changement uniquement par le pipi sous la douche et le composteur relève au mieux d’une illusion, au pire d’un décalage conscient et donc hypocrite.

Est-ce que la culpabilisation de la population, et plus particulièrement des classes populaires n’est pas un moyen convenable de se donner une conscience écologique à peu de frais et sans trop se mouiller ? Ou dans ce cas précis, de se donner une bonne image sur Internet et alimenter ses réseaux sociaux sans se mettre personne à dos ? Oui.

Révolution écologique, révolution politique

Les multiples attaques envers Greta Thunberg semble étayer cette thése de seul un écologisme insta-compatible est audible : déprimante, effrayante, pas souriante, pas rigolote voire même pas assez plantureuse selon certains… Greta s’attire les foudres car elle tient un discours profondément politique mettant en cause les dirigeants des grandes puissances au lieu d’acheter de jolis petits sacs à vrac en coton bio, tout en souriant pour la caméra.

Emmanuel Macron a lui-même demandé explicitement aux jeunes qui le prennent à partie dans les rues “d’aller plutôt ramasser les déchets sur les plages” : encore une manifestation explicite d’un écologisme petits bras qui demande aux derniers-nés de nettoyer des décennies de dégâts. On atteint le comble de l’hypocrisie quand Ségolène Royal, ancienne ministre de l’Ecologie, appelle à la répression du mouvement écologiste radical Extinction Rebellion, suite à une action de blocage du centre commercial Italie 2 en concertation avec les Gilets Jaunes. On parle pourtant ici d’un mouvement qui revendique le pacifisme et s’interdit toute provocation face à la police…  

Fasse à ces multiples tentatives de nos élites pour minimiser et dépolitiser au maximum la lutte pour le climat, c’est au contraire le moment de lâcher Instagram et de demander des comptes aux industriels et aux politiques responsables.

L’écologie est profondément politique et l’a toujours été : le faire oublier, ce n’est que reculer pour mieux sauter.

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