Ce jeudi, le cadre est sobre ; bien que l’on soit accoutumé à ce qu’un défilé présenté au Grand Palais s’accompagne de décors pharaoniques, la marque n’a pas succombé à l’appel de la folie des grandeurs. Une pièce est recréée, des murs gris, au sol : du parquet. Un catwalk sinueux, couleur sable sur lequel des femmes serpentent au milieu des spectateurs. La lumière du jour est délicatement filtrée par la verrière de l’édifice, détail dont on ne saurait rappeler l’importance pour un défilé Chloé.
Retour sur une collection sensuelle, sinon essentielle.
Essentielle parce qu’en ce début 2016, écœurés par les (énièmes) révélations retentissantes sur les mannequins et leurs conditions de travail, les scandales liés au plagiat dans la haute couture, le tout sur fond d’accélération du rythme effréné (artistiquement épuisant) de création… force est de concéder que la mode dans la fashion week, on n’y croyait plus.
Essentielle aussi parce que la marque reste fidèle à elle-même. Progressiste et engagée, elle nous sonne comme un rappel. Ode à l’amour, la sensualité, la délicatesse et, par-dessus tout, à la complicité féminine que l’on sait si chère à cette maison.
Aucun doute, l’esprit Chloé est là. Mousseline aérienne que l’on décline en bleu nuit, lie de vin, vert émeraude. Les robes impressionnent par leur légèreté féerique. La collection est empreinte de liberté, saisissante par la fraîcheur qui se dégage des pièces. Jeux de transparence et dentelles incarnent cette délicate désinvolture propre à l’attitude de la marque. Difficile de dire qui, de la femme ou de la robe, Claire Waight Keller vise le plus à sublimer.
Silhouettes lumineuses soulignées par des couleurs pastels esquissées tour à tour sous forme d’imprimés ou de broderies. Qu’il s’agisse de combinaisons motardes ultra féminines ou de cette blouse revêtant la couleur fétiche de la marque. Pièce phare s’il en est, on retiendra l’accord parfait avec les cheveux de la jeune femme et son teint diaphane.
Claire Waight Keller signe une collection inoffensive, loin de la boucherie qui précède les fashion week (avouons quand même le pincement au cœur que l’on peut avoir à l’évocation du nombre d’animaux massacrés en vue de fournir Lagerfeld en fourrure pour une collection Fendi…). En effet, depuis l’ère Stella McCartney, la marque a définitivement tiré un trait sur la fourrure. Cette saison encore, elle nous rappelle qu’élégance et fourrure synthétique ne relèvent en aucun cas de l’oxymore.
Lumineuse et sincère, une collection qui rassure aussi sur le talent dont peuvent faire preuve les jeunes créateurs. Non contente de revendiquer pleinement l’héritage artistique de la marque, Claire Waight Keller s’empare également de tendances nettement plus rock. Les combinaisons motardes ultra féminines insufflent un vent de nouveauté que l’on ne saurait qu’apprécier. En somme, un défilé vivifiant.