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Fakear n’a plus peur qu’on le juge sur son côté « pop »

Fakear n’a plus peur qu’on le juge sur son côté « pop »

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En 2014, nous rencontrions pour la première fois Fakear, à l’occasion du festival Les IndisciplinéEs. C’étaient alors les débuts de Manifesto XXI et Fakear tournait avec un nouvel EP, Sauvage. Deux ans plus tard, il est de retour dans nos pages pour nous présenter Animal, son premier album, à paraître le 3 juin, mais aussi revenir sur l’évolution affirmée de sa musique, plus « dansante » et plus « pop ».

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MXXI – Lorsque nous t’avions rencontré pour Les IndisciplinéEs en 2014, tu nous disais vouloir casser les barrières construites avec Fakear et essayer de construire quelque chose de « plus ambient, plus intime et du coup peut-être moins live et moins catchy ». C’est toujours le cas ?

Fakear : Haha tu fais bien de poser cette question. Ce n’est en effet plus le cas… Je pense qu’à cette période je devais explorer cette voie, mais aujourd’hui j’assume un peu plus mon amour des choses « live et catchy ». Je crois que j’avais un peu peur qu’on me juge pour mon côté « pop » !

MXXI – Quelle est la direction que prend ton prochain album, Animal ? Quelles sont les nouvelles « barrières » ?

Fakear : Eh ben du coup, je vais davantage vers le lumineux, le solaire, il y a des choses dansantes et pop, c’est varié mais assez joyeux ! C’est un album inspiré par la rencontre avec ma copine, du coup il est rempli d’amour et de bonnes vibes.

MXXI – Flume a annoncé dans une interview que son prochain album ne serait pas « de la musique de festival ». Est-ce que le fait d’avoir eu l’occasion de faire des « grosses dates » durant l’année a marqué ta manière de composer ?

Fakear : Oui, mais moins qu’auparavant. Le live m’a énormément influencé au début, mais je crois qu’aujourd’hui un certain équilibre s’installe de lui-même. Je reste assez droit dans mon style, en tournée ou non.

MXXI – Que penses-tu de cette idée de « musique de festival », est-ce que l’on ne pourrait pas réconcilier danse et expérience ?

Fakear : Si, mais je pense que ça demanderait d’éduquer le public à la musique, et je ne sais pas si c’est une bonne chose. Finalement, les émotions les plus pures et les plus simples sont celles qui sont dénuées de toute technique. Je trouve que cette idée de musique de festival est réelle, mais qu’elle ne doit pas désigner quelque chose de mauvais. C’est incomparable à la musique expérimentale ou ambient, mais c’est un véhicule d’émotions autant voire plus efficace.

MXXI – L’année dernière tu nous confiais être passé « de rock, à rock progressif, puis à trip-hop, et enfin beatmaking », tout en évitant la culture club. Pourtant des influences house semblent peu à peu ressortir de tes derniers titres. Tu ne serais pas tombé dedans finalement ?

Fakear : Je m’y suis intéressé beaucoup pendant un certain temps, et c’est vrai qu’Animal en portera les traces. Mais finalement, j’en suis rapidement sorti. Il y a des choses magnifiques, mais je crois que ce n’est pas ma vraie nature.

MXXI – Superpoze se produit de plus en plus en dj sets, comme lors de la soirée Together, organisée par nos amis de Decilab (voir l’interview ici), est ce que c’est quelque chose qui t’attire toi aussi et que tu voudrais développer ?

Fakear : Je ne sais pas. Oui, j’aimerais le développer si c’est avec Superpoze ! On a fait quelques B2B, et ça a toujours été très plaisant à faire. Maintenant, je ne sais pas si j’aimerais pousser le concept plus loin, je n’ai pas une si grande culture musicale, je préfère laisser cela aux pros !

MXXI – Dans ton dernier titre, Silver, réalisé en collaboration avec Rae Morris, on note une petite ressemblance avec Lean On, le titre de Major Lazer et DJ Snake en featuring avec MØ, peut-être quelques percussions à la Mount Kimbie aussi. Quels sont les artistes qui influencent Fakear aujourd’hui ?

Fakear : Tu vises assez bien. C’est vrai que Lean On a été une grosse claque pour moi, et que Silver n’est pas dénué d’influences. Tout cela mêlé à une sauce Mount Kimbie… Aujourd’hui je pense que ceux qui inspirent le plus Fakear sont Odesza, Mount Kimbie, Deep Forest, M83, Jon Hopkins et Bonobo, toujours.

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MXXI – Sur ce même morceau, Silver, tu laisses une plus grande place à la voix qu’à l’accoutumée, ta pratique du sample a-t-elle évolué ?

Fakear : Oui, Silver a une recette plus pop, mais c’est la place que je pensais juste de donner à un featuring. Au final, j’utilise mes samples toujours de la même manière sur les autres morceaux de l’album.

MXXI – Auparavant les samples te permettaient de faire voyager l’auditeur, les morceaux étaient assez « localisables » dans le sens qu’ils évoquaient souvent un continent voire un pays. Qu’est-ce que tu cherches à produire lorsque tu composes un morceau aujourd’hui ?

Fakear : Une émotion. J’ai des cycles comme ça, dans lesquels je cherche à décrire soit un paysage, soit une émotion. Là je suis en plein dans le cycle émotionnel. Je vais chercher à susciter la joie, la tristesse, la rage de vivre… J’aimerais produire une musique qui t’apporterait l’émotion que tu recherches dans chaque situation… C’est utopique mais c’est un super motivateur !

MXXI – Tu entretiens beaucoup de relations avec le label Nowadays Records et la scène « Future Beat » française, même si l’on ne sait pas toujours bien ce que cela recouvre… Pour toi, c’est quoi le futur ?

Fakear : Pour moi le futur c’est le spirituel. Dans un sens, tous les courants musicaux ont une certaine spiritualité, acquise au fil du temps. Le rock, le reggae, le progressif, le classique, le jazz… Je trouve que c’est l’aspect qui manque à l’électronique, si on met la transe de côté. Je pense que la hype est l’ennemi du spirituel, et que l’électro a du mal à s’en détacher. Peut-être que le fait que ce soit sur ordinateur n’encourage pas ça non plus… Mais tu vois, c’est là où M83 ou Rone sont forts ! C’est électro, mais tellement profond, tellement grand, que pour moi ça pose les bases d’une sorte de mystique, quelque chose qui casse ce côté hype idiot et consommateur. Si la Future Beat aujourd’hui c’est Superpoze, Dream Koala ou Thylacine, je suis content, parce que ça, ce sont des gars spirituels !!

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