Avec 173 000 personnes atteintes, les enjeux de la lutte contre le VIH/sida restent de taille en France. Le titre de l’exposition actuellement présentée au MUCEM « l’épidémie n’est pas finie ! » nous le rappelle. Pourtant depuis l’ouverture de la campagne électorale, le sujet est resté largement ignoré par les différentes personnalités politiques en lice.
Cinq des candidat·es regardent l’horizon et sur leur dos un slogan : « Aujourd’hui pour faire face au SIDA, il n’y aucun candidat ». Ce sont les affiches de la nouvelle campagne de sensibilisation de l’association AIDES qui lutte contre le virus. Dans un édito paru pour l’occasion, la présidente Camille Spire précise que l’État s’est engagé à mettre un terme à la propagation de la maladie d’ici 2030. D’après l’association « aucun programme ne prend suffisamment en compte cette problématique de santé et ne peut prétendre à casser la courbe de l’épidémie ». L’idée n’est pas de placer tous les candidat·es à égalité mais bien d’affirmer que les programmes sont insuffisants. L’ONG a d’ailleurs choisi d’ignorer les candidats d’extrême-droite et propose des affiches présentant des candidat·es sur un spectre politique large et jugés·es « reconnaissables ».
L’association qui aurait pu être consultée pour constituer les programmes a pourtant publié une brochure complète de 20 pages déroulant des propositions pour atteindre l’objectif 2030. Aucun candidat ne s’en est pour l’instant saisi. Alors que les hétérosexuels sont la catégorie la plus représentée dans les chiffres des nouvelles contaminations, AIDES précise tout de même que certaines communautés sont toujours surexposées : les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (43% des contaminations), les hétérosexuel·les né·es à l’étranger (38%) et les usager·ères de drogues par voie intraveineuse (1,5%).
L’association se fait le relais des expériences des personnes séropositives. Elle demande au futur ou à la future Président·e de lutter activement contre les discriminations sérophobes « telles que l’accès à l’emprunt, à l’assurance sans surprimes, et à tous les métiers. Il faut aussi repenser la formation des professionnels-les de santé pour pallier aux refus de soin ».
Le quinquennat qui s’achève fut d’ailleurs dans la continuité des précédents : décevant et timide. L’Élysée refuse une approche communautaire et s’entête à ignorer les spécificités des contaminations en milieu pénitencier. AIDES et les autres associations de lutte contre le VIH innovent et font de la prévention à grande échelle toujours sans soutien de l’État. Emmanuel Macron s’était engagé en 2019 à verser au Fond Mondial (lutte contre le VIH dans les pays du Sud) 1,3 milliards d’euros sur 3 ans. Pour l’instant 60% des versements ont été effectués, le reste sera sûrement livré avec un an de retard. Là encore, les associations pointent un désengagement du corps politique qui perdure.
« Les propositions publiques formulées par AIDES sont toujours globalement ignorées » résume l’ONG. Détourner le regard face au sida demeure une mauvaise habitude de nos gouvernements.