Lors de mon récent road trip en Europe, je me suis arrêtée plusieurs jours au sein de la capitale allemande. Après avoir suivi les habituels circuits touristiques (salut à toi Mur de Berlin ! Ciao l’Alexander Platz), mangé plusieurs spécialités locales et bu des litres quelques bières, j’appris au détour d’une conversation et des dernières bouchées de mon Schnitzel l’existence d’un lieu qui raviva tout de suite mes envies d’aventures : le SpreePark de Berlin-Est.
Histoire et évolution du SpreePark
Création de l’Union Soviétique à la fin des années 60, le Kulturpark Plänterwald (nom d’origine jusqu’à la réunification de 1989 où il fut rebaptisé « SpreePark ») enjoua les habitants de Berlin-Est jusqu’à sa fermeture en 2002. Couvrant une superficie de 29,5 hectares, il fut le seul parc de divertissements de l’histoire de la RDA et le seul de l’agglomération berlinoise post-réunification allemande. À l’époque il attirait plus d’1,7 million de visiteurs par an tel un petit Disneyland sauce soviétique.
L’histoire de ce parc est assez étonnante. En 1991, après que l’Allemagne est redevenue un état uni, Norbert Witte est choisi comme étant l’heureux élu qui aura la chance de prendre la direction du site et ainsi apporter de nombreuses nouveautés à ce mythique parc d’attractions. Adoptant un modèle plus occidental, de nouvelles attractions sont ajoutées et les décors sont revus afin de satisfaire l’imaginaire des petits et des grands.
Cependant, les rumeurs locales (confirmées par nombreux Berlinois croisés sur notre chemin) racontent que le dirigeant du parc s’en alla quelques années plus tard, en janvier 2002, s’installer à Lima au Pérou, accompagné de ses collaborateurs ainsi que des six plus grandes attractions du parc. Sentant arriver la faillite, Norbert Witte a préféré prendre la fuite.
Le parc se retrouve à l’abandon, malgré quelques visites touristiques organisées durant quelques temps par Mme Witte en personne. Norbert Witte quant à lui, essayera sans grand succès d’ouvrir un nouveau parc d’attraction au Pérou et sera condamné à sept ans de prison pour tentative de contrebande : en effet, on retrouva 180 kg de cocaïne cachés dans les mâts de son attraction « Les tapis volants ». Depuis, le parc est à l’abandon, protégé par la ville face aux investisseurs locaux qui souhaitent, semble-t-il, le détruire pour construire à la place de nouveaux logements.
SpreePark : à la recherche du temps perdu
Armée de mon appareil photo, de mon intrépide compagnon et de mes baskets pailletées, j’ai pris la route sous un soleil de plomb pour Berlin Est, direction le SpreePark. Une fois arrivés dans le bois, encore faut-il trouver le parc. Après de longues minutes, un bout de grande roue apparaît à la cime des arbres. Le SpreePark se tient devant nous, derrière un imposant mur de grillage et de barbelés.
Après plusieurs tentatives, nous avons trouvé un trou sous le grillage, creusé sûrement par de précédents curieux, et nous sommes faufilés à l’intérieur du parc. Au milieu des ronces, des buissons et des aboiements lointains des chiens des gardiens, nous avancions tant bien que mal à la recherche d’une attraction. Et l’aventure commença.
Durant une heure, dans un silence total, nous nous sommes promenés au milieu des attractions abandonnées, délabrées, nous avons retrouvé des wagons de montagnes russes dans des arbres, au milieu des buissons, des pédalos en forme de cygnes perdus dans les allées du parc, des rails de montagnes russes grignotés par les branches des arbres de la forêt encerclant le site.
Quelle étrange sensation que de se promener dans un parc à l’abandon, comme au milieu d’un cimetière, imaginer qu’ici, il y a quelques années, des millions de personnes venaient pour passer des journées de détente et de joie. L’ancienne entrée du parc laisse derrière elle de vieilles caisses enregistreuses rouillées et le sol jonché de pellicules Kodak inutilisables à notre époque. Malgré les nombreuses griffures de ronces et piqûres d’orties qui décoraient maintenant nos jambes et nos bras, nous étions heureux de vivre pendant quelques minutes au sein de ce lieu rempli d’histoires.
Nous avons vécu une expérience hors du commun, sur la pointe des pieds, à escalader des murs de branches, suivre des vieux chemins de fers, nous promener au milieu d’un décor unique qui lutte contre le temps. La nature reprend ses droits, des milliers de personnes, de graffeurs, de squatteurs, de visiteurs, ont laissé leurs marques en décorant, et hélas, parfois en détériorant, de nombreuses attractions faisant ainsi se confronter passé et présent, mêlant différentes époques qui donnent à ce parc des aspects de machine à voyager dans le temps. Planté au milieu d’une des plus grandes villes européennes, le Spree Park résiste tant bien que mal, abandonné, comme posé là sans que personne ne le sache.
Je vous laisse découvrir les images qui démontreront beaucoup mieux que mes mots, une idée de l’ambiance unique qui réside au détour des vieux manèges.
A bons entendeurs, ouvrez grands les yeux.
Droits images : Manon PETIT /wonderworldweb.over-blog.com/Geoworld Magazine / Louis Lepron
Les photos viennent aussi d’autres sites Internet. S’approcher des attractions est en effet très compliqué car tout est très strictement surveillé.
2011, c’était le festival Luft und Liebe au Spreepark et Around de Noir & Haze (Solomun vox remix) … Merci de faire resurgir de très bons souvenirs dans ce lieu fantasmagorique!