Il y a bientôt deux mois on se rendait à Biarritz pour un festival pas comme les autres. Enfin du moins, pas comme les autres événements dédiés au surf sur le territoire basque : le Queen Classic célèbre l’inclusivité et la solidarité féministe dans le surf.
Exit la masculinité bodybuildée clichée que l’on associe constamment à ce sport ; durant les deux jours du Queen Classic Surf Festival, c’est l’inclusivité qui prime. C’est un rassemblement joyeux, gratuit, festif et en ébullition constante qui se déroule sous nos yeux. S’il s’agit au premier abord d’une simple compétition sportive féminine, rassemblant des surfeuses venues des quatre coins du monde, c’est aussi toute une organisation dédiée aux personnes à la marge dans le monde du surf. Un événement pour questionner ce sport, ses pratiques, son image et son inclusivité, mais surtout le célébrer plus que jamais.
Co-fondé par Amaya, Margaux et Aimée, le Queen fêtait en 2023 sa troisième année sur la plage des Basques. « Il y a quatre ans, avec les filles, on s’est dit qu’on aimerait bien faire quelque chose de différent, un festival. On ne savait pas trop comment exactement, mais on savait qu’on voulait rassembler plein de choses et une grosse partie sociale parce qu’on a grandi ici. » explique Amaya.
Cette plage de Biaritz est un enjeu symbolique pour le trio qui a grandi ici et souhaitait donner un nouvel élan au surf par leur pratique personnelle pour redonner la place aux femmes, aux queers, et plus généralement, rendre la culture surf plus accessible à toustes. Amaya expose la situation en détail : « On voulait vraiment mettre la culture de ce territoire et des personnes qui y vivent en avant, on voulait se réapproprier un peu cette plage sur laquelle on ne surfe presque plus parce qu’il y a 40 écoles de surf qui se la disputent. Le constat aujourd’hui, c’est que si vous ne pouvez pas vous payer un Airbnb à 200 € la nuit et prendre un cours de surf à 50 €, vous ne pouvez pas surfer là. »
Sans expérience particulière dans l’événementiel, les trois amies ont donc lancé ce pari audacieux, créer un moment unique à Biarritz pour se réapproprier les lieux et montrer les visages du surf dans sa pluralité. Cela passe notamment par mettre en avant des surfeuses qu’elles ont pu rencontrer à travers le monde, venues du Mexique, du Brésil, du Maroc ou encore d’Australie. Il y a cette volonté affirmée de montrer la variété des corps, d’origines et d’expériences. Cette affirmation s’est également traduite dans des animations variées et réfléchies qui ont eu lieu tout au long du week-end du 2-3 septembre.
Performances, DJ set, discussions et concerts ; c’est surtout cela qui a rythmé notre venue sur le festival. La dynamique créée tout au long du week-end permettait de découvrir le surf mais aussi le territoire sous un autre angle : « Au-delà du sport, on voulait aussi parler de sujets qui sont plus des sujets sociaux, donc on s’est dit qu’on allait faire un podcast. On a créé une émission qu’on fait le dimanche ici sur le site et qui ensuite est retransmise avec des sujets comme l’homophobie dans le surf, l’hypersexualisation de la femme dans le marketing du surf… Il y a des sujets beaucoup plus légers aussi ! Par exemple, cette année, on parle du topless et de l’évolution du topless dans le temps.«
Sous forme de stands les associations sont à l’avant-garde de l’événement ; avec notamment association venant en aide aux migrant·es de la frontière espagnole et l’association LGBT+ du Pays basque. C’est un moment de l’année important pour ces organisations : ainsi le festival a grandement participé à faire connaître le Club de Surf Queer. Inspirée par des formations similaires à l’étranger, Jihane a créé ce club avec sa copine pour pouvoir faire du surf un sport collectif, pour se rencontrer entre personnes queers. L’idée de l’asso est aussi de se donner confiance et d’apprendre ensemble, pour faire communauté, dans un territoire où les membres de la communauté LGBT+ peuvent se trouver isolé·es les un·es des autres.
C’est en grande partie là que le festival trouve tout son sens : se rassembler et célébrer. L’organisation avait vu juste cette année du côté de la programmation musicale qui était une ode sincère à la fête et au vivre ensemble. Chaque soir la plage est devenue un dancefloor géant, gratuit et accessible à toutes et tous. Barbara Butch — et son single désormais culte « Muy Bien, Muy Lesbienne » — le passionnant collectif Feminxst Projection Projet (retrouvez notre interview avec elles ici), puis le djing et le voguing irrésistibles des bordelais·es de La Sueur en clôture du festival : on pouvait difficilement faire mieux.
« Inclusif, solidaire et gratuit », le festival a su tenir toutes ses promesses, et il vient pallier un vide béant en France. Si à l’étranger on retrouve de plus en plus d’organisations ou d’associations dédiées à l’inclusivité dans ce sport — comme « Textured Waves » (Etats-Unis) ; « Brown Girl Surf » (Etats-Unis) ; « Surf Proud » (Australie), ou « Queer Surf Club » (Royaume-Uni) —, il reste du chemin à parcourir par chez nous. Pas de doutes que les meufs badass du Queen Classic Surf Festival sauront remplir cette mission. Alors, on se retrouve l’année prochaine ?
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Image à la Une : © Julien Binchbinet
Relecture & édition : Apolline Bazin