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Thjerza Balaj : l’exploration hardcore du désir

Thjerza Balaj : l’exploration hardcore du désir

Lors du week-end de clôture du Festival Parallèle à Marseille, la chorégraphe et danseuse kosovare, albanaise et norvégienne Thjerza Balaj a présenté sa pièce Ruzalka, une réhabilitation féministe et viscérale de la figure folklorique slave connue pour séduire les hommes et les entraîner au fond des mers. On a discuté désir, techno et identité avec l’artiste après sa performance. English below

Deux rangs de spectateurices se font face, comme à un défilé de mode, se jetant dans l’obscurité quelques regards curieux. Une musique électronique brutale retentit sous les faisceaux lumineux disposés à l’horizontale, entrecoupés de fumée. Une silhouette sombre et sensuelle se déplace le long des murs, avant de progressivement occuper le runway central. Tour à tour prenant la lumière ou s’en défilant, Thjerza Balaj fait naître sous nos yeux une créature possédée, agitée de mouvements répétitifs, brusques et saccadés, parfois prise d’élans de sensualité. Elle évolue au sol, les cheveux lâches, dans un jean moulant et un corset serré, sans jamais nous quitter des yeux. Ses épaules, son bassin, son corps entier s’animent de va-et-vient qui pourraient être érotiques s’ils n’étaient mus par une sorte de transe qui semble la dépasser. D’une grande puissance, en seulement une vingtaine de minutes, la performance fait émerger une figure qui vient troubler notre perception des genres, endossant une hyperféminité quasi-instantanément perturbée par des postures qu’on jugerait trop vulgaires, trop agressives, trop viriles, trop quelque chose. Dans cette atmosphère techno qui éveille des soupçons de démons nocturnes, Thjerza Balaj vient provoquer la gêne, nous séduit autant qu’elle nous trouble. On pourrait rejoindre la bacchanale, si on ne se savait pas scruté·e par tous·tes les autres, qui nous regardent, elleux aussi.

Intitulée Ruzalka, du nom de la figure du folklore slave connue pour enlacer les hommes de ses longs cheveux et les entraîner au fond de la mer, la performance de Thjerza Balaj redonne toute sa complexité à ce personnage féminin à la mauvaise réputation. Avec une énergie physique intense qui repousse ses propres limites, elle y explore l’essence même du désir, ce qu’il a d’aliénant et d’émancipateur.

Née en 1995, la danseuse et chorégraphe kosovare, albanaise et norvégienne Thjerza Balaj s’est formée à la Danish National School of Performing Arts et au Conservatoire royal d’Anvers. Aujourd’hui basée à Copenhague, elle développe une pratique autour de l’immédiateté et l’intimité, en abordant le regard féminin, les dynamiques de pouvoir et l’étrangeté. Ruzalka est sa première pièce solo. Elle l’a présentée lors du Festival Parallèle le 7 février dernier au Ballet national de Marseille, l’occasion de nous y rendre et de lui poser quelques questions. Elle nous a parlé de son héritage culturel et familial, de son rapport à la danse, à la fête, et de ce qui l’attire dans cette complexe notion de désir.

Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025, Marseille © Camille D. Tonnerre / Parallèle

Ruzalka puise dans mes expériences de fête en tant que femme : c’est un endroit où vos mouvements, votre regard et votre comportement en général sont souvent (mal) interprétés comme une forme de désir et de tentation.
— Thjerza Balaj

Manifesto XXI – Ce qui m’a le plus marquée dans ta performance Ruzalka, c’est ce mélange de sensualité et d’animalité, quasi de monstruosité. Tu mêles des mouvements et des cambrures associés à une féminité à des gestes saccadés, offensifs. Est-ce cela qui t’a attirée dans la figure de Rusalka – l’association de la féminité à une forme de danger, de puissance fatale ? Comment en es-tu venue à travailler sur ce personnage folklorique, comment l’as-tu rencontré ?

Thjerza Balaj : Tes observations me flattent ! Les adjectifs que tu utilises sont ceux qui peuvent décrire ma pratique en tant que danseuse. Depuis petite, j’ai toujours été attirée par des styles de danse plutôt agressifs. Enfant, lorsque je participais aux danses folkloriques traditionnelles albanaises, je rejoignais souvent les sections masculines, car je trouvais que les mouvements et les gestes y étaient plus percutants et me convenaient mieux, à la fois en tant que danseuse et en tant que personne.

En ce qui concerne Rusalka, elle vient aussi de mon enfance. Rusalka est une figure du folklore slave que ma mère, qui a grandi en Yougoslavie, m’a racontée quand j’étais petite. Rusalka est souvent vue comme un genre de croque-mitaine, et de ce fait, elle a mauvaise réputation. En grandissant, j’ai réalisé qu’elle ne méritait probablement pas cette image négative. De là est venue l’idée de la réhabiliter comme une héroïne féministe.

Mon père me demandait toujours : « D’où viens-tu ? » Et à chaque fois, je répondais : « Du Kosovo. » Cette question et cette réponse m’ont façonnée. Il y a cette peur d’oublier ou d’être effacée. Je m’y accroche.
— Thjerza Balaj

Peux-tu me parler de ton parcours, humain et artistique ? Qu’est-ce qui t’a menée là où tu es aujourd’hui ? 

J’ai grandi avec des parents qui ont dû tout laisser derrière elleux, d’abord à cause de la situation politique, puis à cause de la guerre. Repartir de zéro dans un pays riche a apporté à la fois de la sécurité et un profond sentiment de dissonance. On travaille dur pour s’intégrer, pour prouver sa valeur, mais certaines choses échappent à notre contrôle. Même quelque chose d’aussi simple que trouver un emploi a été un vrai combat parce que nous avions des noms étrangers. Mais cela ne nous a jamais arrêté·es. Ma famille fait preuve d’une détermination sans faille. Mes parents et mes frères tiennent bon, quoi qu’il arrive. C’est ce avec quoi j’ai grandi. Chaque défi m’a motivée à redoubler d’efforts pour prouver que j’étais capable de réussir par mes propres moyens. Mon père me demandait toujours : « D’où viens-tu ? » Et à chaque fois, je répondais : « Du Kosovo. » Cette question et cette réponse m’ont façonnée. Il y a cette peur d’oublier ou d’être effacée. Je m’y accroche. Je ne laisserai pas cela se produire.

J’ai toujours été assez créative. Mon père est un peintre talentueux et possède un grand savoir-faire, notamment en menuiserie et dans tout ce qui peut être fabriqué à la main. Ma mère travaille les textiles, elle réalise des tricots, coud et crée des vêtements en utilisant des techniques transmises de génération en génération.

La danse fait aussi partie intégrante de notre culture. Elle a toujours été naturellement présente dans la vie familiale, à chaque événement, anniversaire et mariage. Quand on grandit avec des Albanais·es, la danse n’est jamais juste une performance. Le mouvement n’est pas quelque chose qu’on apprend, mais quelque chose dont on hérite. Mes passions d’enfance étaient le hip-hop, le dessin et la danse. J’apprenais les chorés des clips de Missy Elliot et je les associais à des pas de danse folklorique traditionnelle albanaise, c’était un drôle de mélange, mais cela avait du sens pour moi. Cela dit, je n’ai jamais pensé faire de la danse une carrière. Je l’imaginais comme quelque chose que je ferais à côté, mais même cela ne s’est jamais produit. Et je n’ai reçu de vraie formation qu’à partir de la fin de mon adolescence. Lorsque j’ai finalement décidé de m’y engager sérieusement, cela m’a demandé beaucoup d’efforts. Ma mère m’a soutenue immédiatement. Mon père a eu besoin de temps. Mais je voulais prouver que je pouvais le faire, prouver qu’iels n’avaient pas à s’inquiéter, ça contribuait à me motiver.

La performance est-elle ton medium principal, et pourquoi ?

En y repensant, ça me semble inévitable que je me sois retrouvée dans la performance. Depuis enfant, j’ai toujours passé beaucoup de temps dans ma tête, à créer des mondes et à me projeter dans des univers qui n’existaient pas. Cette capacité à imaginer est toujours l’un de mes outils les plus puissants. Je n’ai pas toujours un studio ou un espace pour travailler, mais tout apparaît et se déroule très clairement dans mon esprit, comme un film. La performance est la manière la plus naturelle pour moi de donner vie à ces visions. C’est brut et immédiat. Ça se passe et puis c’est fini. C’est ce qui la rend puissante.

Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025, Marseille © Camille D. Tonnerre / Parallèle


Dans Ruzalka, on est d’emblée entraîné·e par cette musique techno puissante, dans une atmosphère sombre, éclairée de quelques faisceaux et plongée dans le brouillard. Qu’est-ce qui t’a amenée à travailler avec ce genre musical ? As-tu un rapport particulier avec la fête et le monde nocturne ? Rusalka est-elle pour toi une allégorie de la fête comme tentatrice, lieu de perdition ?

Tout d’abord, je tiens à remercier le compositeur et producteur Santi Rieser. Dès le moment où j’ai entendu sa musique, j’ai su qu’il fallait qu’il crée le son de cette pièce.

La techno et la musique de fête ont plusieurs rôles pour moi. J’aime sortir et danser pour m’évader, mais j’ai aussi une relation professionnelle à la danse, et la techno reste une source d’inspiration infinie. Cela dit, Ruzalka puise dans mes expériences de fête en tant que femme : c’est un endroit où vos mouvements, votre regard et votre comportement en général sont souvent interprétés, et parfois mal interprétés, comme une forme de désir et de tentation. C’est une expérience complexe et souvent conflictuelle, et mon idée était de canaliser ces nuances au cœur même de la performance.

Cette pièce est née pendant le covid. Au lieu de cultiver des levains ou de brasser du kombucha, je me suis retrouvée avec une envie irrépressible de danser. Un désir qui, tout comme les expériences culinaires susmentionnées, avait besoin d’un soin et d’une attention particuliers.

On ne peut pas ignorer l’impact qu’a eu le covid sur la pièce, mais même avant que le confinement ne nous fasse tous·tes rêver de festivités, j’avais très envie de l’orienter dans une direction techno-party hardcore, presque agressive. À l’époque, beaucoup des performances auxquelles j’avais assisté à Copenhague et dans les pays scandinaves me paraissaient lentes, trop académiques, et parfois un peu timides. Je voulais créer quelque chose qui place la danse au centre, quelque chose qui fasse en sorte que le public ne se contente pas de regarder mais ressente l’envie de s’y joindre.

Le désir crée une dynamique de pouvoir, souvent en fluctuant entre cellui qui désire et cellui qui est désiré·e. Déconstruire le désir est un défi, car il est ancré en nous culturellement et individuellement.
— Thjerza Balaj

La notion de possession est très présente dans la performance, qui prend la forme d’un rituel. Ton regard se plonge dans les yeux du public, ton visage se tord d’un rictus, comme possédé, en transe. On y lit une forme de désir et de pouvoir, on est à la fois gêné·e et séduit·e. Selon toi, le désir crée-t-il un rapport de pouvoir ? Moi, je vois le désir comme l’un des endroits les plus difficiles à « déconstruire » par la théorie et la pensée féministe. Comment est-ce que tu traverses ces réflexions ?

J’essaie de représenter comment le désir crée une dynamique de pouvoir, souvent en fluctuant entre cellui qui désire et cellui qui est désiré·e. Déconstruire le désir est un défi, car il est ancré en nous culturellement et individuellement. Même en théorie, le désir semble complexe, ambigu. Dans cette pièce, j’explore la tension inhérente au désir, qui est quelque chose que nous contrôlons et qui nous contrôle à la fois.

Je suis née avec des yeux assez grands, et tout au long de ma vie, depuis mon jeune âge jusqu’à aujourd’hui, on m’a souvent dit – principalement des hommes, c’est intéressant – que je devais faire attention à la manière dont je regarde. C’est simplement un trait génétique, mais mon regard est souvent interprété de manière à amener les gens à se demander si je veux me battre ou coucher avec eux. En général, ce n’est ni l’un ni l’autre, sauf s’ils demandent, auquel cas c’est la première option. Ces expériences m’ont amenée à établir des parallèles assez évidents avec le mythe de Rusalka, et il m’a donc paru naturel de faire de ce regard ambigu (sanglant-)lubrique un élément clé de la pièce.

Quelle est la suite pour toi ?

En ce moment, je suis attirée par la création d’expériences immersives, de performances qui envahissent tout l’espace et entraînent les gens. Dans mon travail, j’explore la mentalité de foule, l’énergie collective, et le moment où les gens se perdent dans quelque chose de plus grand. Mes deux prochains spectacles – Antagonist et SWEAT – sont tous deux construits autour de ces idées, de manières différentes. C’est vers cela que je me dirige, vers une exploration plus profonde de ces états et de ces transformations. Puis je vais revenir en France ce mois-ci pour présenter Ruzalka le 29 mars à Bagnoler, un artist-run space à Paris !


Thjerza Balaj: a hardcore exploration of desire

The interview was originally conducted in English. The introduction of the article was first written in French and has been translated with an AI.

Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025, Marseille © Camille D. Tonnerre / Parallèle

During the closing weekend of the Parallèle Festival in Marseille, Kosovo-born, Albanian, and Norwegian choreographer and dancer Thjerza Balaj presented Ruzalka, a visceral, feminist reimagining of the Slavic folkloric figure known for seducing men and dragging them to the bottom of the sea. We caught up with the artist after her performance to talk about desire, techno, and identity.

Two rows of spectators face each other, like at a fashion show, exchanging a few curious glances in the dark. Brutal electronic beats blast under horizontal beams of light, pierced by smoke. A dark, sensual figure moves along the walls, before gradually taking over the runway. Alternating between stepping into the light and slipping back into the shadows, Thjerza Balaj brings to life a possessed creature, her body thrashing with repetitive, jerky movements, at times erupting in moments of sensuality. She moves across the floor, her hair loose, dressed in tight jeans and a corset, never once breaking eye contact with the audience. Her shoulders, hips, and entire body shift in fluid motions that could be erotic, were it not for the trance-like state that seems to overtake her. In just twenty minutes, this powerful performance gives birth to a figure that challenges our understanding of gender, embodying an almost hyper-feminine persona, which is then disrupted by postures that feel too vulgar, too aggressive, too masculine — or just too much. In this techno-inspired atmosphere, which suggests the presence of nocturnal demons, Thjerza Balaj both seduces and unsettles us. It’s tempting to join the bacchanal, if only we didn’t feel so intensely watched by the others, who, like us, are also caught in her gaze.

Titled Ruzalka, after the Slavic folklore figure who lures men to the depths of the sea with her long hair, Thjerza Balaj’s performance reclaims this vilified female character, adding complexity and nuance. With intense physical energy that pushes her limits, she explores the very essence of desire, revealing both its alienating and liberating aspects.

Born in 1995, Thjerza Balaj, a Kosovo-Albanian-Norwegian dancer and choreographer, trained at the Danish National School of Performing Arts and the Royal Conservatoire of Antwerp. Now based in Copenhagen, she has developed a practice that focuses on immediacy, intimacy, and exploring the female gaze, power dynamics, and the uncanny. Ruzalka is her first solo work, which she performed at the Parallèle Festival on February 7 at the Ballet National de Marseille. We took the opportunity to attend and ask her a few questions. She spoke to us about her cultural and family background, her relationship with dance and celebration, and what draws her to the complex idea of desire.

Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025, Marseille © Camille D. Tonnerre / Parallèle

Ruzalka draws from my experiences as a woman at parties, where your movements, gaze, and overall demeanor are often (mis)interpreted as a form of desire and temptation.
— Thjerza Balaj

Manifesto XXI – What stood out to me most in the Ruzalka performance was this mix of sensuality and animality, almost bordering on monstrosity. You combine movements and postures traditionally associated with femininity with sharp, aggressive gestures. Is this blend of femininity with danger and fatal power what drew you to the character of Rusalka? How did you come to work with this folkloric figure? How did you first meet her?

Thjerza Balaj: Your observations flatter me! Those adjectives you’re using are ones that can describe my practice as a dancer. Ever since I was a small child, I’ve been drawn to more aggressive dance styles. Growing up, when participating in Albanian traditional folk dances, I often joined the male sections, as I found the movements and gestures there to be more punchy and better suited to me as both a dancer and a person.

In relation to Rusalka, she also comes from my childhood. Rusalka is a Slavic folklore figure that my mother, who grew up in Yugoslavia, told me about when I was little. Rusalka is often seen as a kind of boogeyman, and because of that, she has a bad reputation. As I got older, I realized she probably didn’t deserve the negative portrayal of her. From there came the idea of rebranding her as a feminist heroine.

Can you tell me about your journey, both personal and artistic? What has brought you to where you are today?

I grew up with parents who had to leave everything behind, first because of political unrest and then because of war. Starting over in a wealthy country brought both safety and a deep sense of dissonance. You work hard to fit in, to prove yourself, but some things are beyond your control. Even something as simple as getting a job was a struggle because our names did not belong. But that never stopped us. My family is relentless. My parents and my brothers keep going no matter what. That is what I grew up with. Every obstacle just fueled me to push harder and prove that I could make something of myself on my own terms. My father used to ask me, ‘Where are you from?’ And every time, I answered, ‘Kosovo.’ That question and that answer shaped me. There is a fear of forgetting or of being erased. I hold on to that. I will not let it happen.

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My father used to ask me, ‘Where are you from?’ And every time, I answered, ‘Kosovo.’ That question and that answer shaped me. There is a fear of forgetting or of being erased. I hold on to that.
— Thjerza Balaj

I was always quite creative. My father is a skilled painter and possesses great craftsmanship, especially in woodworking and anything that can be made by hand really. My mother works with textiles, producing knitwear, sewing, and creating clothing using techniques that have been passed down through generations.

Dance is also something deeply ingrained in our culture. It has always been a part of family life, a natural presence at every gathering, birthday, and wedding. Growing up with Albanian relatives meant that dancing was never just performance. Movement was not something learned but something inherited. Growing up my passions were hip-hop, drawing and dancing. Learning steps from Missy Elliot music videos and coupling them with traditional Albanian folk dance was a strange mix, but it made sense to me. That said, I never thought of dance as a career. I imagined it as something I would do on the side, but even that never happened. And I never received any formal training before my late teens. When I finally decided to pursue it seriously, it took a lot to push through. My mother supported me immediately. My father needed time. But proving I could do it, proving that they did not need to worry, became part of my drive.

Is performance your primary medium, and why?

Looking back, it feels inevitable that I ended up in performance. Since I was a child, I have spent time in my head, creating worlds and dreaming myself into places that did not exist. That ability to imagine is still one of my strongest tools. I do not always have a studio or a space to work in, but I see everything so clearly in my mind. It plays out like a film. Performance is the most natural way for me to bring these visions to life. It is raw and immediate. It happens and then it is gone. That is what makes it powerful.

Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025 © Camille D. Tonnerre / Parallèle


From the very start of Ruzalka, we’re pulled in by the powerful techno music, set in a dark atmosphere lit by a few beams of light and shrouded in mist. What made you choose this genre of music? Do you have a particular connection to nightlife and parties? For you, is Rusalka an allegory of the party scene as a temptress, a place of damnation?

First, I’d like to give a shoutout to composer and producer Santi Rieser. From the moment I first heard his music, I knew I had to have him create the sound for this piece.

Techno and party music serve different purposes for me. I enjoy going out and dancing as a way to escape, but I also have a professional relationship with dance, and techno remains an endless source of inspiration. That said, Ruzalka draws from my experiences as a woman at parties, where your movements, gaze, and overall demeanor are often interpreted, and sometimes misinterpreted, as a form of desire and temptation. It’s a complex, often conflicting experience, and my idea was to channel these nuances into its core.

This piece was my Covid baby. But instead of cultivating sourdough starters or brewing kombucha, I found myself with a deep craving for dance. A craving that, much like the aforementioned culinary experiments, needed careful nurturing and feeding.

The impact of Covid on how the piece turned out cannot be ignored, but even before lockdown made us all long for festivities, I had a strong desire to take it in a hardcore, almost aggressive, techno-party direction. At the time, much of the performance I encountered on the Copenhagen and Scandinavian scene felt slow, overly academic, and at times a bit timid. I wanted to create something that placed dance at the center, something that made the audience not just watch but feel the urge to join in.

Desire creates a dynamic of power, often shifting between the one desiring and the one desired. Deconstructing desire is challenging because it’s ingrained in us culturally and personally.
— Thjerza Balaj

The theme of possession is very present in your performance, which feels almost like a ritual. Your gaze locks onto the audience, your face twists into a grimace, as if possessed, in a trance. There’s a sense of both desire and power, making us feel uneasy and captivated at the same time. Do you see desire as a form of possession? Do you think desire always involves a power dynamic? Personally, I find one’s own desire one of the hardest things to ‘deconstruct’—even when one is fed with feminist theory. How do you engage with these thoughts?

I’m trying to represent how desire creates a dynamic of power, often shifting between the one desiring and the one desired. Deconstructing desire is challenging because it’s ingrained in us culturally and personally. Even in theory, desire feels complex, ambiguous. In this piece, I explore the tension of how desire is something we both control and are controlled by.

I was born with rather large eyeballs, and throughout my life, from a young age to this day, I’ve often been told – mainly by men, interestingly – that I need to be careful with the way I stare. It’s simply a genetic trait, but my gaze is often interpreted in a way that makes people question whether I want to fight or fuck them. Usually, it’s neither, unless they ask, in which case it’s the first option. These experiences led me to draw quite obvious parallels to the Rusalka myth, and therefore it felt natural to incorporate this ambiguous (blood-)lustful gaze as a key element in the piece.

Where do you want to go next?

Right now, I am drawn to creating immersive experiences, performances that take over a space and pull people in. My work explores crowd mentality, collective energy, and the moment where people lose themselves in something larger. My two upcoming shows –  Antagonist and SWEAT – are both built around these ideas in different ways. That is where I am heading. Deeper into these states and these transformations. And then I will return to France in March when I’m set to show Ruzalka at Bagnoler, an artist-run project space, in Paris!


Photos : Thjerza Balaj, Ruzalka, Festival Parallèle 2025, Marseille © Camille D. Tonnerre / Parallèle

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