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Yugnat999. Meme pas peur

Yugnat999. Meme pas peur

De la hype parisienne au pink washing, sur son compte Insta, Yugnat999 nous délecte avec ses memes en franglais impudiques. Doux Jésus, le meme serait-il la nouvelle frontière de l’art contemporain ? Va-t-on bientôt être envahis par une vague de hashtags #memeartist ? Peut-on, en toute conscience, laisser Yugnat assassiner ses contemporains à coups de captions au vitriol ? Drogue, trafic d’armes, alcool : plongée dans les tréfonds de l’univers du jeune meme lord.

Alerte : il semblerait que Yugnat est en train de pénétrer les arcanes de Manifesto. À bientôt pour de nouveaux terrifiants épisodes. 

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Crédits : Yugnat999

Yugnat, peut-on rire de tout ?

Franchement je pense que oui, ça dépend avec qui et de quelle manière. Tu peux rire sans être haineux d’une situation, d’une personne, d’une religion ou même d’une orientation sexuelle. L’important, je pense, c’est que ça ne tourne pas à l’obsession ; que tu te moques que de ça parce qu’à ce moment-là ça veut dire que t’as clairement un problème avec.

Et si le meme était le futur de l’art contemporain ?

Ça serait cool, ça voudrait dire que je suis un artiste autodidacte et que, si j’ai une descendance, elle sera trop fière de moi. Je sais pas si c’est le futur de l’art contemporain : j’espère que non, en vrai. J’espère qu’il y a de vrais artistes qui apporteront un peu plus que des images avec des captions.

Meme et dessin satirique : même combat ? Comment le meme peut-il être un élément disruptif dans le monde des médias ?

Je pense pas qu’on puisse rapprocher les deux. Le dessin satirique, c’est une caricature de l’actualité. C’est figé sur un fait ou une personne. En fonction de ce qu’il se passe à un moment c’est l’imitation, la chose imitée. Du coup c’est la multiplication des transformations apportées à un template, une image ou une caption qui caractérise un meme. Si tu le sors d’Internet, tu lui donnes une forme définitive et non modifiable. Les memes c’est un truc qui marche bien parce que ça parle à tout le monde. C’est facile, c’est visuel, c’est drôle, ça permet de taguer ses potes et de se marrer un bon coup en vitesse. La viralité et la possibilité de s’approprier le truc en deux secondes, c’est ce qui fait la force du meme.

Un meme réussi est…?

Un meme qui fait marrer les gens et dans lequel ils peuvent se retrouver. C’est bête mais généralement ça se voit direct au nombre de likes sur la publication. Et si les gens le reprennent.

Crédits : Yugnat999

Et si tu devenais une star des réseaux ? Que ferais-tu de cette influence ?

Je gratterais des trucs à des marques, je me ferais inviter dans des soirées et des vernissages pour faire le pique-assiette comme tous les influenceurs. C’est ça, le but ultime du blogueur Insta : c’est gratter le max – même des trucs qu’il aime pas -,  juste pour le plaisir de recevoir des trucs gratos. Ça sert à rien sinon d’être influenceur (et encore, j’espère que j’en suis pas un, parce que je suis pas un exemple à suivre)… je vais pas faire la Miss France à dire des banalités à la con sous prétexte que j’ai des gens qui me suivent sur les réseaux sociaux.

Le statut d’influenceur, honnêtement : cool, pas cool, tu t’en fous, tu le voulais mais tu l’assumais pas, tu t’y attendais pas, c’est exactement ce que tu voulais ?

Franchement, je pense pas être un influenceur. T’as envie de suivre les conseils d’un mec qui fait des memes toi ? Que j’aie un public, que mes conneries fassent marrer : ok. Mais de là à dire que je les influence, je pense pas. Enfin j’espère pas parce que c’est une mauvaise chose. Après, je m’attendais pas à ce que tout ça prenne autant d’ampleur. Ça me dépasse un peu, peut-être, mais c’est cool que mon délire fasse autant d’émules.

… je vais pas faire la Miss France à dire des banalités à la con sous prétexte que j’ai des gens qui me suivent sur les réseaux sociaux.

Konbini vient te voir pour une collab, ils perçoivent le potentiel coolitude de la chose, ils te créent un créneaux type fast & curious en memes. Tu dis quoi ?

Je leur demande s’ils sont prêts à allonger la thune et je leur sors des « bouses de dernière minutes » comme dans 99 francs [le livre de Frédéric Beigbeder, ndlr]. Plus sérieusement, je suis pas sûr que j’accepterais un truc du style avec eux. J’ai tellement bashé que ce serait pas très honnête intellectuellement. Mais si y a cinq chiffres sur le chèque, je veux bien ranger mes convictions au plus profond de mon cerveau.

Tous ces « washings » c’est cramé à 15 000 km, c’est un truc de pubard des années 1990.

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Tes engagements politiques ?

J’en parle jamais le premier soir, ça va peut-être un peu trop vite entre nous. De toute manière il y a une citation qui dit que les opinions politiques, c’est comme les MST : vaut mieux garder ça pour soi.

Pink washing, woman washing, trans washing : ta position ? T’as pas peur de tomber toi aussi dans le nettoyage de conscience généralisé pour faire de l’audience ?

Tous ces « washing » c’est cramé à 15 000 km, c’est un truc de pubard des années 1990. Ça fonctionne pas et c’est tant mieux. Au lieu de faire des campagnes dans ce style, les sociétés feraient mieux de balayer devant leur porte avant et de régler un certain nombre de choses. Je pense pas que je sois concerné par ce souci. Je fais des memes sur ce que je vis, ce qui m’entoure. Et si ça devait parler de la communauté LGBTIA, ce serait au cas où je suis amené à côtoyer quelque chose qui me permettrait de faire un meme. Je fais pas des trucs pour plaire à une partie de la population, je fais des trucs pour faire marrer les gens. Tant mieux si ça parle plus à une communauté à un moment donné.

Crédits : Yugnat999

Tes recherches Internet récentes ?

Pourquoi certaines personnes se font plus piquer que d’autres par les moustiques. Ou sinon des trucs relatifs aux memes et aux tendances.

Où vont les médias online ?

Aucune idée. Je suis pas vraiment un pro de ce type de médias, je saurais pas dire.

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