À l’occasion de son premier live pour le Capsule Festival à Lamballe, nous sommes allés à la rencontre de Julien Henry, producteur briochin officiant depuis peu sous le nom de Voyou.
Manifesto XXI – Peux-tu te présenter en quelques mots ? Depuis combien de temps fais-tu de la musique électronique ? Peux-tu donner un petit aperçu rapide de ton parcours dans la musique ?
Julien Henry : Je vis près de Saint-Brieuc, j’ai 36 ans, et je fais de la musique depuis une vingtaine d’années ! J’ai commencé par jouer de la guitare dans un petit groupe de pop-rock au lycée, puis dans un groupe de trip-hop, ce qui m’a permis de me mettre à créer de la musique électronique, chose que je croyais inaccessible à l’époque. J’ai ensuite fondé Rafale en 2007 avec mon pote Marc, on a fait pas mal de dates et un album produit par Arnaud Rebotini (Blackstrobe). C’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé à créer mes propres compositions.
Pour le moment, tu n’as sorti que trois morceaux, sous la forme d’un EP gratuit sobrement intitulé #1. Quelle est l’idée directrice de cet EP ?
Ce sont des titres qui me ressemblent beaucoup. Ils représentent bien ce que je recherche en composant. Quelque chose de dansant, mais aussi mélancolique, avec de belles mélodies, de beaux accords, de l’émotion.
Que représente la pochette de cet EP ? Qui en est l’auteur ?
C’est moi qui l’ai créée. Elle représente les jambes d’une fille qui forment le V de Voyou. Je tenais à faire ressortir le côté féminin de ces trois titres.
Tu sembles très influencé par le label britannique Young Turks (SBTRKT, Jamie xx, The xx, John Talabot). Qu’est-ce qui t’inspire dans cette scène ?
C’est vrai, tu as vu juste, tu aurais même pu ajouter Burial ou Four Tet. Je ne sais pas, les belles mélodies inévitablement, le son aussi, ce côté brut, underground et sincère, « fait dans la chambre », tout ça me plaît. Mais sûrement aussi les artistes, je me reconnais en eux, ils ont l’air gentils ; c’est bizarre, j’ai la sensation qu’on aurait été potes si on avait été ensemble à l’école !
On ressent dans ta musique (notamment dans le traitement des voix) une envie de nous emmener vers des contrées plus novatrices, futuristes, loin de l’éternel regard en arrière d’une majorité de la house contemporaine. Tu accordes une grande part de ton travail à l’innovation ?
Même si je cherche évidemment à créer une musique qui n’a pas déjà été faite, tout ça reste plus un truc de feeling qu’une ligne directrice. Je n’ai pas de prise de position radicale là-dessus. Par exemple, pour mon titre « J’t’aime », j’ai samplé la chanson « Take Me Coco » de Zap Mama qui date de 1991 ; sur « Sushi », il y a un sample de « Trick Me » de Kelis sorti en 2003… J’aime le principe de mêler l’ancien au moderne. Souvent, ça crée de bonne surprises.
Tu te produis pour la première fois en live ce week-end, pour le festival Capsule à Lamballe : il faut s’attendre à quoi ?
Mes concerts représentent tout ce que j’aime faire, je veux m’y amuser. Même si je ne chante pas, je m’y livre. Je joue avec mon vieux Juno 60 capricieux mais incroyablement magique qui prend une grande place dans mes compositions. Il y a aussi des pads remplis de reverbs, de delays, de filtres, bref, je veux que tout ça vive sur scène.
Parmi tes premières productions, on retrouve des remixes des Bretons Im Takt et Totorro, quels sont tes liens avec eux ?
Il y a des liens artistiques dans le sens où j’adore vraiment ce qu’ils font, j’écoute régulièrement les maxis d’Im Takt et les deux albums de Totorro. Et il y a bien sûr aussi des liens amicaux, on a tous des potes en commun, et notre parcours musical fait qu’on s’est souvent croisés avec nos anciens groupes.
Avec les Briochins de Colorado récemment passés aux Trans Musicales et Capsule, il semble y avoir une très forte émulation dans les Côtes d’Armor en ce moment. C’est quoi votre secret ? Il y a un lien avec le fort taux de nitrates dans les rivières ?
Ah ah ah ! Ça vient peut-être de ça, effectivement ! Mais ça ne date pas d’aujourd’hui, avant on avait une super scène métal : je trouve qu’il y a toujours de bons groupes venant des Côtes d’Armor. Souvent ces groupes ne doivent rien à personne. On est entre Rennes et Brest, il n’y a pas de programmations gigantesques ici, alors quand on veut faire quelque chose, on s’applique et on se donne à fond pour tenter de tirer notre épingle du jeu. C’est ce qu’a très bien fait Yelle par exemple, et c’est ce que font très bien aujourd’hui les jeunes organisateurs du festival Capsule, à qui je souhaite la même évolution que celle du festival Panoramas qui a démarré dans des conditions semblables.
Ce week-end pour Capsule, tu partages l’affiche, entre autres, avec Mall Grab (dans les « Top 100 DJs 2016 » de Resident Advisor, DJ Mag et Mixmag !). Tu abordes ça comment ?
Je ne suis pas du genre stressé, mais d’habitude je joue en groupe dans Menthol ; or, la perspective d’être seul sur scène, ouvrant pour Mall Grab, Kane West, The Hacker et Parfait me donne une petite poussée d’adrénaline !
Pendant les Bars en Trans, tu as passé des disques pour la carte blanche au Capsule Festival. Si tu devais nous conseiller cinq morceaux, quels seraient-ils et pourquoi ?
– SBTRKT, « Hold On » : magnifique chanson émouvante, avec la voix transportante de Sampha.
– Burial, « Shell of Light » : je suis capable de l’écouter en boucle durant des heures, la fin est une véritable cerise sur le gâteau.
– Daniel Avery, « All I Need » : la personne la plus réticente du monde à la danse ne pourrait pas résister à ce track parfait.
– Four Tet, « The Track I’ve Been Playing… » : le titre qui rend fou, qui fait tout basculer vers une soirée où on ne maîtrise plus rien !
– Jamie xx, « Sleep Sound » : la plus cotonneuse des musiques, le morceau ultime pour finir en douceur.
À quoi travailles-tu en ce moment ? Quels sont tes futurs projets ?
En ce moment, je peaufine de nouveaux titres, je compte les sortir sur un maxi pendant le premier trimestre 2017. Je vais aussi m’atteler à trouver des dates de concerts, pour partager ce tout nouveau live avec un maximum de monde !