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Visibilité trans, Manifeste des 343, UNEF : Revue de presse #10

Visibilité trans, Manifeste des 343, UNEF : Revue de presse #10

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Bien s’informer, c’est important mais ça demande du temps. Alors chaque lundi, la rédaction de Manifesto XXI vous présente sa revue de presse pour bien commencer la semaine. Dedans, retrouvez des infos essentielles, des enquêtes marquantes, des débats, des images fortes, des actus queers et féministes…

Après une petite semaine de pause, la revue de presse est de retour pour décortiquer quinze jours d’infos, de polémiques, et célébrer ce qu’on a vu de plus fort lors la journée de la visibilité trans. Le 31 mars avait lieu la Journée internationale de visibilité trans, et nous avons souhaité donner une place particulière aux enjeux de transidentité dans cette revue de presse. Enjoy

La semaine en bref

Anniversaire des 343 – Le 5 avril 1971, L’Obs publiait une tribune qui fit date dans la lutte pour le droit à l’avortement : 343 « salopes » revendiquaient d’y avoir eu recours. Cinquante ans après, dans le JDD, 343 femmes appellent à l’allongement des délais légaux d’accès à l’IVG. Parmi elles Najat Vallaud-Belkacem, Vanessa Paradis, Yael Naim, Alice Coffin, Andrea Bescond, Laure Calamy, Isabelle Carré…

Choix des malades – Le 28 mars, un collectif de neuf médecins de l’AP-HP publiait dans Le Monde une déchirante tribune sur la pression hospitalière et les choix qu’elle implique pour les soignant·es. Extrait : « Les soignants feront du mieux qu’ils peuvent mais se tromperont parfois, tant l’exercice est complexe. Enfin, parce qu’ils seront contraints d’agir de façon contraire aux règles élémentaires de l’éthique, ils n’en sortiront certainement pas indemnes. Il y a fort à parier que beaucoup en garderont à tout jamais des séquelles psychiques. À terme, il est bien probable que nombre d’entre eux se détourneront de leur métier de soignant, ce qui dégradera un peu plus la santé de nos hôpitaux. »

Revendications trans Mercredi 31 mars, pour la Journée internationale de la visibilité transgenre, XY Média en profitait pour faire une piqûre de rappel des revendications politiques urgentes pour le bien-être des personnes trans. On vous conseille aussi d’écouter le témoignage de Rosalind sur l’intersectionnalité des discriminations qu’elle subit en tant que jeune femme noire.

Victoire historique pour Sandra Muller – La journaliste initiatrice de #BalanceTonPorc vient de remporter la bataille judiciaire contre le tribunal de Paris. Elle avait été condamnée à verser des dommages et intérêts colossaux pour préjudice moral à celui qu’elle accusait de harcèlement sexuel. Cela avait suscité de vives indignations notamment dans le milieu militant car les procès en diffamation sont très fréquemment utilisés pour dissuader les victimes de s’exprimer publiquement. Le parquet a finalement reconnu que ce tweet avait soulevé « un débat d’intérêt général sur la libération de la parole des femmes avec une base factuelle suffisante ». Rappelons que son témoignage avait lancé un mouvement sans précédent avec 931 240 tweets pour #BalanceTonPorc et 18 millions pour #MeToo.

Suite de l’affaire PPDA – Accusé par une dizaine de femmes pour harcèlement, agressions sexuelles et viols, le présentateur du journal télévisé de TF1, Patrick Poivre d’Arvor, a eu l’audace de porter plainte contre Florence Porcel pour « dénonciation calomnieuse ». Les témoignages de ces femmes ont récemment été publiés dans un article du Monde, au regret du parquet de Nanterre qui s’inquiète de l’influence du débat médiatique sur le travail d’investigation. La justice fera, on l’espère, son travail, mais dans une société où seulement 1% des viols et tentatives mène à une condamnation, il ne manquerait plus qu’on leur exhorte de se taire après toutes ces années de silence.

Séparatisme ou islamophobie ? – C’est une des premières mesures adoptées dans le cadre du projet de loi visant à renforcer « le respect des principes de la République » (aka la loi « Séparatisme » renommée) : ce mardi, le Sénat a approuvé l’interdiction du port de tout signe religieux aux accompagnant·es de sortie scolaire. Les femmes voilées ne sont jamais nommées, mais elles sont bien la cible de cette mesure. Dans la même soirée, une interdiction du port du burkini dans les piscines municipales a été votée, ainsi que l’interdiction des signes religieux visibles pour les mineur·es.

UNEF – Dans le même temps, le syndicat étudiant UNEF est menacé de dissolution par plusieurs responsables politiques. En cause ? L’organisation de réunions en non-mixité. France Info relate ici les différentes étapes de l’escalade. Le Sénat, décidément très en forme, a voté un amendement qui prévoit la dissolution des associations organisant des réunions en non-mixité, dans le cadre de la loi Séparatisme. Le vote a notamment été soutenu par les sénateurs de gauche… 

Transphobie médicale – Quelques jours avant la Journée de visibilité trans, Mediapart publiait un article sur la transphobie au sein du corps médical. La « société savante », structure regroupant divers·es spécialistes chargé·es d’accompagner les parcours de transition, tente de se renouveler en changeant de nom et en s’ouvrant aux associations. La majorité d’entre elles n’ont pas souhaité collaborer avec cette institution dont l’évolution reste, à leurs yeux, superficielle et dont elles dénoncent la transphobie institutionnalisée et médicale. Elles rappellent les violences subies depuis des années, allant du mégenrage aux examens gynécologiques intrusifs jusqu’à la psychiatrisation permanente de la transidentité. Donner la parole aux acteurices concerné·es est une étape insuffisante si elles ne possèdent pas de pouvoir décisionnel sur leur propre corps.

Chemsex – C’est l’autre épidémie du moment, celle dont on parle trop peu mais qui raconte tant de choses sur la solitude et l’homophobie. Dans cet épisode de Foule continentale (France Inter), Caroline Gillet s’inquiète pour « un ami » dont elle découvre qu’il est devenu accro au chemsex, pratique du sexe sous drogue. Pour mieux comprendre ce mal, elle part alors à la rencontre de Thibault Jedrzejewski, médecin de 33 ans spécialisé en santé gay (dont on vous parlait dans la revue de presse #7). L’épisode se conclut sur une lecture bouleversante du poème Tu mérites un amour de Frida Kahlo. Écouter.

Sexisme chez les élites – Depuis plusieurs semaines, la colère monte à l’ENS de Lyon. Après la vague de dénonciations due à #SciencesPorcs, les élèves de l’institution tentent elles aussi de mettre la lumière sur le climat sexiste et les violences sexuelles qui ont régulièrement lieu dans cet établissement prestigieux. Face à elles, une direction qui fait l’autruche et refuse de prendre la véritable mesure de ces problématiques

Presse scientifique – Le coup est très dur pour la presse scientifique : le magazine Science & Vie s’est vidé de quasi tous·tes ses journalistes titulaires. Un départ collectif dû aux nombreux désaccords de l’équipe avec le nouveau propriétaire du média Reworld Media. La menace était présente dès cet été quand une possible fusion entre Science & Vie et le magazine La Recherche avait été mise sur la table. Résultat ? Un magazine totalement vidé d’expertise scientifique, géré par des « chargé·es des contenus » et une agence de communication. Inquiétant dans une période de crise de confiance envers la presse et l’expertise scientifique…

L’endométriose au programme – Il faut en moyenne 6 ans à une femme entre la détection des premiers symptômes de l’endométriose et son diagnostic. La raison est simple : les médecins sont rarement formé·es. Aujourd’hui, bonne nouvelle, l’endométriose entre au programme de second cycle en médecine ! Cela faisait quinze ans que l’association EndoFrance réclamait cette mesure, désormais entérinée par un arrêté. Reste un gros morceau pour améliorer la détection de la maladie : la formation des soignant·es.

Loi Sécurité globale – Lundi 29 mars, une réunion en commission mixte paritaire (CMP) entre député·es et sénateur·rices a permis d’aboutir à une version unifiée du texte. Des modifications ont été faites, comme l’explique Mediapart. L’article 24, sur l’interdiction de diffuser des images, se retrouve scindé en deux infractions. Le problème n’est plus de filmer ou de diffuser mais plus largement de constituer une base de données sur des fonctionnaires ou de provoquer l’identification d’un policier. L’article 21, sur l’utilisation des images par le ministère de l’Intérieur, a également été modifié, la diffusion des vidéos dans les médias à des fins de communication a été écartée. L’article 22, sur l’usage des drones, n’autorise désormais plus que la captation d’images, avec des possibilités réduites de leur usage. L’Assemblée et le Sénat ont encore à voter deux fois, les dates ne sont pas encore annoncées

Morts de la rue – 535, c’est le nombre de personnes mortes dans la rue en 2020. La liste de leurs noms est consultable sur La Croix. Ce sont ces invisibles de la société que le Collectif Les Morts de la rue tient à mettre en lumière. Un hommage public et des enquêtes sociales qui permettent de ne pas perdre le lien avec une réalité facile à occulter. « Plus personne dans les rues à la fin de l’année » disait le Président Macron en juillet 2017… 

Numéros verts – Le média Frustration a sorti une enquête en triptyque sur les lignes d’écoute psy, la solution de crise qui a le vent en poupe au gouvernement (pour les étudiant·es qui souffrent de la faim et de la dépression), dans les hôpitaux (pour les soignant·es en burn-out) ou les entreprises (pour les salarié·es exploité·es). La première partie explique comment ces solutions permettent aux administrations de se déresponsabiliser, d’individualiser le mal-être en le psychologisant et de casser la mobilisation collective. La deuxième partie se penche sur le fonctionnement opaque de ces plateformes qui ubérisent le métier de psy. La troisième partie sonde le mode de financement de ces plateformes privées, cotées en bourse, qui se rémunèrent sur nos données dans un discours idéologique quantified human – comme si la tech allait soigner nos têtes.

La semaine en images 

Transgender Day of Visibility – Ce 31 mars 2021, Joe Biden a fait officiellement entrer au calendrier le Jour de de la visibilité trans alors que plus de quatre-vingts décrets américains mettent en péril leur peu de droits. Le Jour international (celui-ci) de la visibilité trans a été lancé dans un objectif de joie et d’empowerment le 31 mars 2009 par l’activiste américaine Rachel Candall, constatant que la seule journée dédiée aux droits trans était le douloureux Trans Day of Remembrance consacré au souvenir des victimes assassinées en raison de leur transidentité. L’activiste @pinkmantaray a consacré pour cette occasion une publication sur comment soutenir activement la cause (« il n’y a pas d’allié·e passif·ve »).

À cette occasion, l’illustrateur américain Jett Allen a fait revivre les badges de groupes transactivistes des années 90 et début 2000. Une belle façon de rappeler l’historicité de ces luttes, bien loin de la rhétorique de l’effet de mode !

Marche pour le climat – Le 28 mars se retrouvaient, selon les organisateur·rices, 700 associations et 110 000 personnes dans 180 manifestations. Motif : la loi Climat qui méprise la Convention citoyenne, fixe des seuils d’émission qui ne permettront pas d’atteindre 10% des objectifs initiaux pour 2030, alerte par sa vacuité les hauts conseils mandatés par le pouvoir lui-même. On retrouve dans la rue des alliances entre écologistes, féministes, anti-racistes, anti-classistes, anti-précarité qui font advenir un nouveau paysage politique. Portfolio à voir sur Mediapart.

Voir Aussi

Règles trans – La marque de culottes menstruelles Moodz a révélé une mini-campagne avec 3 hommes trans pour la sortie de son boxer menstruel. Les témoignages de Noa, Noam et Hanneli sont à découvrir sur leur compte Insta.

Rouge ou bleu ? – Vous avez peut-être déjà pu voir passer des posts vous invitant à vous habiller en bleu pour « lutter contre l’autisme ». Attention ! Cette initiative est promue par des associations comme « Autism Speak » qui colporte des visions eugénistes et n’est absolument pas gérée par des personnes autistes. Pour mettre en lumière les personnes autistes et leur combat, il est plutôt conseillé de porter du rouge ! 

Matière à penser

« Black authors are not your medecine » – La romancière Yaa Gyasi, américaine d’origine ghanéenne et très remarquée pour son premier roman No Home – il retrace une lignée familiale dont une branche est restée au Ghana et une autre a été réduite en esclavage –, lâche sa tribune dans la mare, publiée dans le Guardian. Elle y dénonce l’utilisation par les blancs des lectures d’auteur·rices noir·es pour se donner bonne conscience, sans questionner ou déranger réellement les rapports raciaux.

Lesbianisme et transitude – Alors qu’une Dyke March (« marche gouine ») s’organise le 25 avril pour manifester en faveur de la PMA pour tous·tes, une question de fond est soulevée : les hommes trans sont-ils à leur place dans un cortège de tête en non-mixité lesbienne ? Ils sont certes parmi les plus discriminés pour accéder à la PMA mais sur le site Les guérillères, Max L. explique, depuis le récit de ses propres transitions, en quoi selon il·elle, le cortège de tête en non-mixité lesbienne devrait être occupé uniquement par des femmes, trans ou cis. Car si les hommes trans peuvent y accéder, où se situent alors les femmes trans lesbiennes ? Ne serait-ce pas une façon contre-productive de ramener les trans à des assignations identitaires dont iels aspirent à se décharger ? Quelle que soit notre position, Max L. aborde le sujet avec finesse et fait avancer les réflexions.

Cultures queers et transféministes

Racisme et influence – Aux États-Unis et au Royaume-Uni, les voix des influenceuses racisées s’élèvent avec force pour dénoncer les énormes écarts de rémunération entre elles et leurs comparses blanches. Et en France ? Entre refus « de voir les couleurs » et tokenisation, les agences et les marques dansent au bal des hypocrites et les influenceuses racisées peinent à se faire une place dans l’Hexagone. Une enquête à lire chez Madmoizelle.

Drag queens Street Press nous fait découvrir une compétition de drag queens française en ligne. Lancée le 11 janvier dernier, la seconde édition du Drag Contest prenait vie sur Instagram. Un lieu virtuel de création et de soutien qui fait chaud au cœur en ces temps difficiles pour la culture et qui n’épargnent pas le milieu queer.

Sélection et rédaction : Albane Barrau, Apolline Bazin, Salvade Castera, Anouk Durocher, Anne Plaignaud

Image à la une : © Oriel Frankie Ashcroft

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