Sur le tout nouveau label danois Intercourse, la multi-instrumentaliste Sofie Birch propose en plein printemps un nouvel album, Holotropica. L’habituée de la radio NTS reste fidèle à un univers visuel et sonore poignant, proposant ici une excursion sensitive tout en douceur. Par ses compositions aux frontières de l’asmr et du sound design, mais toujours implantées dans le genre ambient, elle offre ici une nouvelle réflexion sur la perception de notre enveloppe corporelle.
Motivée depuis ses débuts par les pouvoirs de guérison que peuvent offrir les sons, Sofie Birch, se considère comme étant une « sound artist », faisant honneur au genre ambient et enchaîne depuis 2017 des puissantes sorties. Le nouvel opus proposé cette année apparaît à la suite de sa collaboration en 2021 avec Johan Carøe pour l’album Repair Techniques. Ses compositions, qu’elle perçoit comme étant thérapeutiques, projettent l’auditeur·ice dans un paysage sonore rêvé surprenant de clarté.
Plus calme et personnel, l’album Holotropica présente la quête d’une paix intérieure. Se décrivant comme turbulente, aux humeurs bondissantes, des instants de « self-care » sont essentiels pour elle. Entre yoga, nature et médiation, chaque point de tranquillité recherché se retrouve dans ses créations. Des heures d’enregistrements et de reconstructions de morceaux plus tard, font surgir un ambient doux qui agit tel un câlin apaisant l’âme.
L’appel de la nature en guise d’inspiration, des séances de méditation en forêt sont à l’origine des prémices du projet et de cette profonde connexion avec le corps. L’album sera peaufiné et terminé durant la première grossesse de l’artiste, une étape clé du processus de création en lien avec la fragilité et la découverte, sensations émanant de ses dernières compositions. Cet ensemble est à l’image du terme « holotropique » utilisé pour l’album. Une technique de respiration plongeant dans les pensées, réunie par un sentiment puissant de plénitude. Le projet agit telle une thérapie, une ode à la méditation pour une artiste qui a toujours axé sa musique autour de sa nature soignante.
Avec un univers à peine discernable, aux frontières de l’ambient, de l’expérimental ou encore du jazz, Sofie Birch se sert volontiers d’instruments acoustiques pour sublimer ses compositions électroniques. On retrouve du saxophone aux tonalités graves sur le morceau d’introduction « Observatory (feat. Nana Pi) ». Celui-ci agit comme contraste avec les abondants bruits aigus électroniques. La compositrice joue avec les éléments organiques joués sur synthétiseurs analogiques pour développer leur écho dans un vaste monde aux sonorités aquatiques. Le morceau « Hallu » illustre avec brio ces mélanges improvisés. Birch démontre une capacité à manipuler l’espace et le temps dans ses productions sonores. Quand un élément agissant seul s’arrête, il laissera soudainement place à un amas d’éléments clairs et colorés. Les arpèges complètent alors l’espace, dispersant toutes émotions pouvant être perçues.
Sombre par instants, « Tide Rose » est un excellent exemple de la variété que peut proposer un projet d’ambient / art pop sans tomber dans l’inaccessible. Ce sont presque 8 minutes de progressions aux fondations musicales noires et spectrales qui laissent place après plus de 6 minutes de mélanges d’éléments dissonants à une clarté nécessaire. Le morceau « Surface Pan » joue pareillement sur ces caractéristiques de progressions, des compositions dissonantes, mais évolutives vers de passages beaucoup plus lumineux, que l’on retrouvera sur la partie visuelle du projet.
En plus du projet musical, les œuvres visuelles qui l’accompagnent offrent une toute nouvelle perception face aux corps microscopiques, à ceux qui créent le vivant, à ceux qui le composent. De la vidéo à l’artwork, ces détails visuels engagent l’auditeur·ice à travers sa forme déstructurée et évasive de l’album. Elle collabore avec l’illustratrice Wiesia Ruta pour le clip d’ « Observatory », le graphiste Rikard Lassenius pour « Hallu », ainsi que la réalisatrice Pernille Kjær pour « The Sun XiX ». Tous·tes présentent à leurs manières des stades embryonnaires, des cellules, un aspect organique aux déconstructions mathématiques, visibles sur le visuel d’ « Observatory ». Ces fragments représentés à l’image et au rythme des fréquences sonores sont aussi flous que leur perception par le biais d’un microscope.
L’artiste est à retrouver sur scène lors du Fiber Festival à Amsterdam le 16 juin, au Copenhagen Jazz Festival (accompagnée par sa proche collaboratrice Nana Pi) le 24 Juin, ainsi qu’au Festival Norberg en suède le 7 juillet.
Image à la une : Sofie Birch par Natasha Post Penaguiao