Un album épuré aux consonances électro, arabisantes, jazz, sur une voix suave, l’EP We Don’t Need To Be Enemies de Sabrina Bellaouel, signée chez InFiné, est une réussite tant par son éclectisme que ses mélodies puissantes. Une véritable invitation au voyage car non, l’été n’est pas encore terminé.
Presque pensé de manière indépendante, les différents morceaux proposés par Sabrina Bellaouel sont d’une polyvalence et d’une complémentarité qu’on l’on connaît déjà de l’artiste franco-algérienne, douée dans cette hybridation entre les genres, qu’elle parvient à rendre parfaitement fluide. « J’ai composé cet EP pendant le confinement/ramadan. À vrai dire, je voulais juste m’amuser à mêler mes loops et les bruits ambiants que j’enregistre avec mon iPhone. Au fur et à mesure, ma session Logic s’est transformée en bande son des différents voyages que j’avais fais les derniers mois. »
Balade entre les ambiances, les 5 morceaux transportent l’auditeur au gré des envies de Sabrina dont les émotions vacillent entre un « We don’t need to be enemies », ambiance clubbing, synthés, percussions, et voix hypnotisantes, jusqu’aux mélodies aériennes, presque christiques de « La chute », qui rappelle les liturgies paroissiales. « Nasser », quant à lui, « ne devait pas figurer dans l’EP. C’est Alexandre mon boss chez Infiné qui m’a poussé à l’inclure. J’ai beaucoup écouter les Tehillim de Steve Reich. J’ai voulu créer une sorte de spirale avec mes propres voix que j’ai samplé. Elles devaient venir d’un brouillard épais puis s’affirmer d’un coup, le morceau vient de ma recherche personnelle de vouloir rassembler les nations arabes et l’Afrique. Le panafricanisme ça me parle ». «If», seulement 48 secondes, d’une voix soul, posée sur une instru unique, un piano, qui permet de sublimer avec une douce simplicité, la tonalité suave de la voix de Sabrina, « if we control too much we may get lost in the ways to find love ».
C’est une sorte de mantra qui m’aide à lâcher prise.
« Pulse », dont le début ressemble à une expérimentation psychédélique, surprend par l’arrivée de trompettes qui offrent aux tonalités jazz, un mysticisme presque déstabilisant, « je suis fascinée par tous les type de transe qui existent dans la musique. Et c’est fou parce que lorsque le cerveau enregistre un pattern rythmique, le corps s’oublie et devient un instrument ».
Sabrina ose, en 10 minutes 50, faire du son, des bruits, des respirations, des instruments à part entière. En surprise, presque en proie à une sensation de flottement, l’écoute des derniers morceaux de l’artiste est une vraie expérience sensorielle, « comme je suis synesthète, et que je vois la musique en couleur, c’était comme de peindre un tableau avec les sons. Je me suis vraiment lancée dans une exploration de textures et de rythmes qui me parlaient puis j’ai poussé l’expérimentation au maximum pour créer des ponts entre les genres » assure Sabrina. Aucun doute, l’artiste est loin d’avoir fini de nous surprendre.