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Exclu et interview : « Grosse Pierre », l’amour à la plage façon cailloux par Musique Chienne

Exclu et interview : « Grosse Pierre », l’amour à la plage façon cailloux par Musique Chienne

Sarah-Louise Barbett est une femme à chiens. Alors, sous l’évident pseudonyme de Musique Chienne, elle compose une musique électronique expérimentale à la croisée entre house, techno et pop percussive, en célébration de tous les canins. Il y a quelques mois, elle sortait La Maison de Billy chez nos voisins suisses de Cheptel Records, un premier disque qui affirme son univers bricolé et touchant, déjà remarqué dans ses précédentes compilations lo-fi.

Au fil des huit pistes qui le composent, on s’amuse à découvrir le quotidien insouciant du meilleur ami de l’homme à travers le regard de Billy : ses grandes balades dans la nature, son questionnement sur les humains, sa rencontre avec Youki et son amour pour les croquettes. Avec de faux airs de comptines pour enfants (on pourrait presque croire que certains sont samplés de jouets électroniques), les textes sont souvent l’œuvre des copains de Sarah-Louise. Ses compositions tiraillées entre complexité et légèreté, et sa voix d’une nonchalance maîtrisée accompagnent parfaitement l’émerveillement pour les petites choses simples de la vie, racontées dans « Cocktail de voix », « Tous les matins du monde » ou « Ding Dong ». Des petites douceurs poétiques qui ont aussi charmé l’ami Flavien Berger puisque l’album a l’honneur de faire partie de sa Sélection pour les Disques du Festival Permanent.

Musique Chienne nous présente aujourd’hui le clip de « Grosse Pierre » où, sur une plage imaginaire, « des milliers de graviers prennent un bain de soleil ». Tourné en VHS par Tom Gagnaire, on y voit littéralement des petits cailloux faire bronzette, et, sous son parasol, une grosse pierre trôner en maître nageur sur une chaise métallique. Le tout est à l’image de sa musique : quelque part entre premier et second degré, d’une simplicité directe, et d’un surréalisme fascinant. On vous laisse regarder ça juste ici, et découvrir notre interview juste en-dessous.

Manifesto XXI – Mais quelle musique fait Musique Chienne ?

Musique Chienne : Difficile à dire. En ce moment, j’expérimente des trucs un peu nouveaux, en utilisant les logiciels, en essayant de les comprendre et d’apprendre à m’en servir. C’est ce que j’ai fait pour La Maison de Billy, c’est quelque chose de plus cohérent. Avant, je faisais pas ça : je faisais que de la musique pour le plaisir, pour moi, un morceau par-ci par-là que je mettais en ligne directement sans vraiment travailler le mixage ou le mastering. Là, je travaille sur la perfection de ma musique. Mais ça ne l’est pas du tout, donc je pense que ça va prendre beaucoup de temps, j’ai encore beaucoup à apprendre. Je suis dans l’étude.

Dans quelles conditions as-tu composé La Maison de Billy ?

Avant, je faisais tout sur Garage Band, et on m’a conseillé de passer sur Ableton Live. J’ai donc fait que des bases sur Live, donc j’avais plein de trucs, plein d’expérimentations. Je suis allée en Suisse et j’ai retravaillé chaque piste, chaque morceau avec deux amis. On a fini les morceaux ensemble.

Ta musique tire beaucoup d’influences techno, dance, house mais aussi de sons légers qu’on croirait presque tirés de jouets électroniques : comment se passe ton processus de création et est-ce que tu utilises des outils particuliers ?

Pour le dernier album, j’ai utilisé que des sons qui étaient sur Ableton, tout ce qui est xylophone, marimba… En fait je viens de la percussion, donc j’ai essayé de retrouver ça. Sinon, avant, j’utilisais des petits synthés Casio où chaque son est déjà sur l’instrument : tu peux pas les modifier alors que sur Ableton tu peux vraiment tout modifier, tu cherches vraiment le son qui te plaît. 

Si tu viens de la percussion, pourquoi avoir cherché ces sons sur Ableton plutôt que de les enregistrer toi-même ?

J’ai enregistré des maracas, des trucs comme ça ; mais, en fait, le plus gros de mes instruments est resté chez mes parents, donc j’avais pas trop le choix. Mais, à l’avenir, j’aimerais vraiment avoir mon studio, avec tout mes instrus à disposition que je pourrais enregistrer directement.

Et ces sonorités japonisantes, ça vient d’où?

C’est vrai qu’on me l’a souvent dit, mais ça vient simplement des sons que j’utilise. Ils m’ont interpellée mais c’est pas une esthétique que j’ai cherché à obtenir.

Le côté DIY dans ta musique, c’est quelque chose que tu revendiques ? Tu parlais de perfectionner ta musique, est-ce que ce côté lo-fi va tout de même rester ? 

Oui, j’ai l’impression que ce coté DIY va toujours rester. On m’a reproché que le mixage de l’album était bizarre, qu’il y avait des choses qui n’étaient pas mises en avant. Peut-être que j’ai les oreilles qui déconnent et que ça fonctionne pas comme il faut, donc ça sonne bizarrement. Mais bon, moi, c’est comme ça que je l’ai ressenti. Après, j’ai envie de retrouver une écoute agréable parce qu’apparemment ça gêne, surtout en live, mais c’est super dur à gérer. Là, justement, je cherche une résidence pour bosser ça, mais pas sûre que ça change grand-chose.

J’avoue ne t’avoir jamais vue sur scène. Musique Chienne en live, ça donne quoi ? 

Ça ressemble pas mal à l’album. C’est les tracks pré-enregistrées, j’ai enlevé quelques instrus que je joue en live et je chante aussi par-dessus. J’ai un peu arrangé les morceaux pour que ce soit un peu plus long, plus progressif, un peu plus dansant. Mais ça ne l’est pas vraiment au final. Il y a des parties dansantes mais elles sont très courtes. C’est pas une musique qui est entraînante tout au long du live, c’est très changeant. Et je change à chaque fois la tracklist.

Comment tu ressens la réception du public face à ta musique ?

Ça change tout le temps, et c’est très perturbant. Je suis assez sensible à ça, je suis toujours obligée de voir comment ça se passe dans le public. Je suis ultra-timide, et même si dernièrement j’ai fait plein de lives, c’est toujours difficile. J’essaie aussi de discuter, d’avoir des échanges, mais c’est super compliqué.

Quand je fais écouter ta musique à mon entourage, beaucoup me disent qu’ils la trouvent « marrante ». Tu en penses quoi ?

Je suis pour que ce soit marrant, tant mieux. Ce sont des paroles un peu abstraites, qui parfois ne veulent rien dire, donc ça interpelle. Et puis il n’y a pas vraiment d’histoire concrète, c’est un chien qui est dans un studio de musique et il se passe des trucs. 

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Tu es illustratrice également, et tu réalises souvent tes propres clips. Quelle place prennent l’image et le visuel dans ta musique ?

Ce sont des pratiques que j’ai commencées en même temps, qui sont très différentes mais qui se complètent au final. J’ai envie d’amener ça au maximum. J’ai pensé à demander à quelqu’un d’autre de faire la pochette de l’album mais, au final, je lui aurais demandé un truc que j’aurais fait moi-même, donc je l’ai fait. C’est bizarre, c’est comme deux cerveaux différents qui se rassemblent.

Dans ton esthétique DIY dont on parlait tout à l’heure, y a un truc assez nineties que l’on retrouve dans tes clips. Je pense à « Je m’appelle Véronique », par exemple. 

Pourtant ça a été filmé avec l’iPhone. Je ne sais pas, c’était juste une envie de raconter l’histoire de ce morceau. La musique avait été faite par un copain, et avec un autre copain on a improvisé ces paroles-là. On était à Paris et on a tourné le clip en une aprem, comme ça. C’est un jeu en fait, il n’y a pas cette envie de faire un truc ultra-propre. Je suis un peu dépassée par tous les clips où tu vois qu’il y a plein de matos, plein de budget, où c’est à celui qui fera le plus original et tout. Ça m’effraie un peu. Il y a plein plein d’idées trop cool, mais moi j’arrive pas à me dire que je suis là-dedans. Donc je préfère faire les choses avec ce que j’ai. Même si par la suite j’aimerais bien essayer.

Mais pour « Grosse Pierre », c’est Tom que j’ai rencontré sur Internet qui m’a contactée et qui voulait absolument faire ce clip. Et là, c’est une esthétique vachement 1980-1990 pour le coup, parce que c’est filmé en VHS. C’est vraiment une esthétique à part, je suis pas forcément pour, mais j’ai accepté.

D’où te vient ta passion pour les maisons et pour les chiens ?

Déjà, le chien c’est depuis toute petite, parce que je suis fille unique et quand je sortais avec mes parents je m’embêtait un peu avec les adultes, et parfois y avait des chiens et c’est avec eux que je me sentais le mieux, disons. J’exagère, mais ça part de là. Ils sont fascinants. Tiens il y en a un là, attends je vais te le chercher.

*Sarah-Louise sort du champ de sa webcam et revient avec un joli chien brun et blanc*

Sarah-Louise et Youki, flous mais mimis

En fait, lui c’est Youki. Je l’avais gardé l’année dernière et c’est de là que vient le morceau « Youki ».

Pour les maisons, je sais pas, mes parents sont dans le milieu de l’architecture. C’est un peu une construction incroyable de l’homme, avec plein de facettes. J’aimerais bien avoir une maison en vrai, et j’aime bien les dessiner et voir aussi les maisons typiques des régions de France. Celle de Billy, elle est inventée. C’est pas la maison idéale mais c’est une facilité graphique.

LFSM : Carte Blanche à Inès Drésel et invitées le 29 novembre.

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