Mountain Mountain, c’est un quatuor qui éclot en 2016, c’est un premier album Aerial, c’est un peu de Lyon et un peu de Rennes, pas mal de nostalgie et un poil d’esprit torturé. Dans le fief musical français, le groupe explore une indie-pop assortie d’œillades répétées au rock psychédélique.
Mountain Mountain voit le jour sur le quai d’une gare, quand Nicolas Baucheron et Sébastien Roux se rencontrent, heureux hasard dont découle une jolie histoire. Comme eux, leur musique est sur le départ, moteur allumé, main tendue à celleux qui voudrait rejoindre le voyage. Le premier album de la formation a l’allure d’un avion dans son envolée, grosse machine planante qui fait voir le monde de haut. Dans ses notes qui s’échappent et ses mélodies bagotantes, Aerial prend la forme d’une fenêtre ouverte à l’expérimentation. Et comme un.e impressionniste apporterait, touche à touche, toutes les couleurs nécessaires à la naissance de son paysage, la force de Mountain Mountain réside dans leur sens du détail, la précision des éléments en sous-couche qui donnent aux morceaux toute leur consistance. Si l’album dans sa globalité est une réussite, c’est à la loupe que l’on découvre l’ampleur du travail. En se penchant sur les contrastes et complexités qui constituent les titres, et les chemins inattendus qu’empruntent les musiciens. On y découvre une production fournie qui n’en finit jamais de révéler ses atouts.
Si la musique est solaire, les textes qui s’y collent laissent, eux, planer le goût du regret. Les Mountain Mountain se remémorent ce qu’ils « auraient pu » et ce qu’ils « auraient dû », revisitent leur passé, chargés de tous leurs fantômes, pour tenter de nous expliquer que finalement, c’est pas grave si tu souffres, puisque tout ira mieux après. « Forget the past, embrace the future, today is all that matters for you » nous clame Nicolas, voix du groupe, dans « King Of The Universe », comme pour chasser le spectre du souvenir qui déambule dans ce disque. Main tendue vers l’avenir, Mountain Mountain promet des jours – et sûrement des projets – plus beaux pour demain.
Mais à l’inverse, pour créer cet album introspectif, les quatre bonhommes ont dû parcourir le chemin dans l’autre sens. C’est dans leur passé qu’ils ont trouvé les matériaux créatifs pour écrire ce projet futur, en revenant sur leurs propres pas pour proposer une réponse alternative à ce qu’ils avaient laissé derrière eux. Et ainsi, proposer un récit plus éclatant de leurs exploits précédents. C’est pourquoi certains titres de leur premier EP, Open & See sorti en 2016 chez Echo Orange, sont présents sur Aerial, métamorphosés, méconnaissables. Le travail accompli rend les morceaux plus riches, plus précis, plus intenses et profonds, faisant étalage de la marge de progression parcourue.
Ce qu’ils ont rapporté de leurs propres limbes, ce sont des sons électroniques distendus qui rivalisent avec ceux, plus enjoués, qui cavalent nerveusement le long de la route. Ce sont des airs de piano, valsants et romantiques, qui rompent avec la continuité de l’album, et s’immiscent avec étonnement dans cette grosse machine planante. Ce sont des détours inattendus, des tentatives remarquables, des morceaux aux rebondissements surprenants, des changements d’ambiance saisissants. En proposant une sorte d’album ovni, flottant quelque part entre les genres, qui confond subtilement les sentiments de joie, de remords et de nostalgie, Mountain Mountain gravit les hauteurs de l’indie-pop et offre un premier long projet remarquable.