De temps en temps les week-ends, la rédaction de Manifesto XXI met en avant un clip récent qui l’a marquée, avec un mot de la réalisatrice ou du réalisateur. On vous propose le clip « Credo » de Morfine, réalisé par Thibault Prevost (prod : Absolt), premier extrait de son nouvel album Blinding Nights prévu pour le 15 avril.
C’est dans une chambre bien trop étroite, qu’une jeune fille, Emma, compte le temps qui passe. Un piano et une partition inachevée dans un coin, et une lumière au motif spatial tournoie contre les murs mansardés. Le clip de Morfine réalisé dans les contrées normandes, échappe à un présent maussade et nous plonge dans la rêverie d’une enfant. Attiré par un chant lointain, l’imaginaire ici prend toute sa place et se déploie au sein d’un édifice sacré (Église Saint-Pierre d’Yvetot), baigné par une lumière irradiante. La mélodie s’élève, presque mystique, et les voix retentissent, comme une sorte d’incantation. D’abord spectatrice de ce rêve, Emma va finalement reprendre le contrôle, en actionnant « les voix célestes » de sa musique, devenant la pièce maîtresse de son tableau onirique.
La frontière entre le réel et l’imaginaire est fine grâce à des éléments laissés de part et d’autre de ces deux mondes : un symbole circulaire, des notes de musiques et des couleurs vives. Morfine et Thibault Prevost réalisent un clip aux allures de court-métrage sublimant l’imagination débordante d’une enfant et la prise en main de sa propre vie. Il y a aussi beaucoup de messages cachés dans cette vidéo, iels en parlent dans leur note d’intention.
« Le morceau « Credo » de Morfine, aux accents mythologiques et méditatifs, sorte de chant sacré électronique, est ici traité comme un appel vers un horizon plus vaste. Emma y répond avec détermination, jusqu’à reprendre les rênes de la musique, de sa musique, en cheffe d’orchestre de sa vie. Véritable parcours initiatique, le film se déploie sur une seule et même journée, de l’aube au crépuscule, de l’enfance à l’âge adulte, métaphore en filigrane de la vie d’une femme.
Il est enfin une réflexion autour du genre féminin et ses diverses représentations : la femme que l’on est, celle que l’on rêve d’être et celle que l’on s’invente parfois. Le casting du clip est d’ailleurs 100% féminin.
Le tournant du clip intervient lorsque l’artiste vidéo Camille Grigaut (≈sheglitchr) déforme, transforme les images par son travail autour des glitches générés par ses machines analogiques, aux confins de l’art vidéo. Ils sont un éloge aux artefacts, et prolongent ainsi les enjeux narratifs traversant tout le film : la perméabilité entre le réel et l’imaginaire, la frontière entre le concret et le fantasme. » – Morfine et Thibault Prevost
Image à la une : extrait du clip « Credo » de Morfine