Traditionnellement Latino, bien que désormais très bobo – hipster – yuppie (young urban professional, majoritairement présents dans la ville depuis le développement de la Silicon Valley, grand sujet qui ouvre un débat dense, d’ailleurs abordé par la fresque « This city is not for sale » que vous découvrirez dans la galerie), ce quartier respire la créativité mais aussi le moyen d’exprimer ses revendications grâce au street art qui illumine des ruelles recroquevillées par ci par là. Mission / Dolores District est l’un des plus frappés par la modernisation et la gentrification de San Francisco. Un soir autour d’un verre de vin, je demande à mon colocataire, mexicain vivant depuis vingt ans à San Francisco, de me décrire en quelques mots ce quartier et les évolutions dont il a été témoin durant toutes ces années :
They were almost only Mexicans in the past, many Latino families used to live there. Now with the tech boom, the district is more modern : no more houses but modern housing where young people share the flats ; bars instead of food and new design buildings. Many Latinos left the district and now there’re a lot of Asian, Caucasian, American people because they can afford the rent. This modernity, these changes, don’t bother me. We have to evolve with our society and with our city.
La Balmy Alley représentée sur ces photos, est la plus connue du quartier. Les premières fresques apparaissent au milieu des années 80. Les tags sont régulièrement recouverts pour laisser carte blanche à de nouveaux artistes, de nouvelles inspirations et revendications. C’est comme si cette rue était une sorte de salle d’exposition ouverte à tous, une salle d’expo libre service. Droits de l’homme, gentrification, choix politiques affligeants, discrimination, immigration, système carcéral, port d’armes aux Etats-Unis, tous les thèmes révoltant la population sont abordés dans cette ruelle, véritable porte-parole de plusieurs générations luttant pour la paix et la justice.
Women’s Building, le féminisme qui agit en couleurs
Situé sur la 18ème, non loin de Valencia Street – véritable colonne vertébrale du district – ce monument rayonne parmi tous les autres. Les peintures murales sont incroyablement fabuleuses, à l’image des causes défendues par cette association. Le Women’s Building est un espace communautaire tenu par des femmes qui tend à lutter pour la justice sociale et l’égalité des sexes.
Each year we welcome over 20,000 women and their families, connecting them with social services, community involvement opportunities, the arts, wellness and educational events. (cf. site internet de l’association)
C’est en 1994 (ma date de naissance au passage ! Le 22 décembre, pour être précise si l’envie vous prend de m’offrir un cadeau) que sept artistes Juana Alicia, Miranda Bergman, Edythe Boone, Susan Kelk Cervantes, Meera Desai, Yvonne Littleton and Irene Perez entreprennent cette œuvre gigantesque. Ce monument et ces peintures présentent une ode aux femmes qui, partout dans le monde, ont eu le courage de défendre des causes laissées à l’abandon dans notre société. Il rend hommage à celles qui ont fait l’histoire (on reconnaît notamment Rigoberta Menchu) et qui la feront encore. Ce n’est pas tout, il agit en prolongeant concrètement ces causes en aidant des femmes qui en ont besoin.
Après cette journée forte en découvertes, je retrouve mon QG du samedi, QG de tous les San Franciscains : Dolores Park. Musiciens, masseurs, gens déguisés, gens sous toutes sortes de substances, hippies de contrebande 2.0 qui vendent des bandeaux souvenirs à fleurs (il y a même un bus de touristes « Hippy », je l’ai aperçu dans le Financial District. Etrange expérience.), je passerais mes six mois ici, sur l’herbe perchée sur la petite colline, à regarder passer la population de cette ville si magique et pleine de contradictions. Sur ce, je vous laisse car on parle, on parle mais en attendant je n’ai toujours pas trouvé la maison bleue adossée à la colline. Français, de 9h mon futur, je vous envoie des milliers de French Kisses.