Le nouveau projet de Mikano Melting Balloons s’inscrit dans la continuité de ce que le jeune rappeur français avait déjà présenté dans ses travaux précédents : une musique ambitieuse, sensible et intelligente nourrie par l’écoute de ses grands contemporains américains. Sans toutefois tomber dans la copie de ceux qui l’inspirent, Mikano s’empare clés en main des codes du hip-hop alternatif et les fait converger dans un domaine qui est le sien, celui d’une musique irrésistiblement leste.
Comparativement à ses prédécesseurs, Melting Balloons est plus doux. Mikano y explore avec plus d’assiduité sa voix chantée, une voix grave et pleine, imperturbable. S’éloignant du rap, il se rapproche d’un hip-hop langoureux comme l’illustre parfaitement « When It Rains Glitter ». Après quelques accords de synthétiseur, soutenus par une voix réverbérée, le flow percutant de Mikano s’impose sur une rythmique légère, volatile. Alors que la voix résonne encore, s’entremêlant, au passage, avec des bruitages de synthétiseur, la seconde partie du morceau débute. Un piano discret, presque sourd, intervient et tapisse l’espace sonore d’une lasciveté des plus agréables, tandis que la voix nous berce de sa nonchalance indolente. Retentit alors une rythmique tout en suspens dont l’efficacité est plus qu’éprouvée. L’ensemble est pensé de manière à former un morceau harmonieux dans lequel la moindre sonorité complète le tout avec ce je-ne-sais-quoi d’aérien qui laisse l’impression que chaque intervention d’un instrument différent est dosée avec parcimonie et que l’ordre de plénitude qui règne ne peut jamais être dérangé.
Des morceaux sensuels qui épousent tout à la fois une rythmique afro-trap et des mélodies minimalistes courtisant avec la soul ou le jazz.
Le reste du projet est construit à l’image de « When It Rains Glitter ». Des morceaux sensuels qui épousent tout à la fois une rythmique afro-trap et des mélodies minimalistes courtisant avec la soul ou le jazz. En résulte un hip-hop alternatif qui peut rappeler à certains égards celui de Frank Ocean, notamment parce que la musique de Mikano joue aussi de l’utilisation de samples, de l’alternance des points de vue et des formes de discours, mettant ainsi sa voix en dialogue avec d’autres voix qui racontent d’autres histoires et qui trouvent un refuge commun, une caisse de résonance, dans sa musique. Usant la carte de l’inspiration jusqu’au bout, Mikano se refuse à sa langue natale et préfère chanter en anglais, un choix qui aurait pu porter atteinte à la crédibilité du projet, mais force est de constater que le jeune artiste manie l’anglais avec dextérité, aussi bien lorsqu’il l’écrit que lorsqu’il le chante.
Melting Balloons ne représente pas pour nous l’image de ballons en état de fonte, mais il implante l’image contraire dans notre imaginaire, l’image d’une poignée de ballons qui s’envoleraient, hauts dans le ciel, portés par la brise au début d’une soirée d’été.
C’est très bien écrit et expressif. Ça donne envie de découvrir ce jeune rappeur (et ce jeune auteur).