C’était la dernière, la dernière émission politique pour faire changer d’avis les indécis. Chaque candidat avait donc 15 minutes pour briller, pour convaincre une dernière fois avec leur programme — et pas « leurs punchlines » avait confié Michael Field (directeur de l’information à France TV) à Sonia Devillers. Fin de la « politique spectacle » à quelques jours du premier tour.
J’attendais avec impatiente l’émission et… Je me suis ennuyée. Tout en disant « pas de politique spectacle », on demande aux candidats d’apporter un objet qu’ils emmèneront sur leur bureau à l’Élysée. Je n’ai pas saisi l’intérêt. En revanche, cela a donné l’occasion à Fillon de montrer qu’il était un rebelle en étant le seul à être venu les mains vides (alors qu’il lui avait été demandé de rendre l’argent et les costumes). Macron a laissé « sa grammaire » en loge, pour témoigner à la place son soutien à la famille du policier abattu aux Champs Élysées dans la soirée.
Les objets sont l’occasion de rappeler le populisme de Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan, qui mettent en scène avec pathos des cadeaux offerts par un artisan et un jeune garçon handicapé. Cheminade rappelle son excentricité et sa passion pour la préhistoire avec ses silex. Poutou paraît plutôt sincère. Mais honnêtement, cela ne donne pas grand chose à voir.
Les onze candidats se relaient, interrogés par David Pujadas et Léa Salamé. Les interviews sont plates et il y a peu de place pour la spontanéité, puisque 2 précisions de programmes, 2 questions internationales et une carte blanche doivent être abordées par chacun(e).
Les photos-malaise
Puis, pour finir, on présente une vieille photo du candidat avec cette question : « vous vous attendiez à en être là aujourd’hui?« . Même les candidat(e)s sont mal à l’aise devant ces vieilles photos. Encore une fois, à part apprendre que Macron voulait écrire ou faire du théâtre et que Fillon voulait être journaliste, et donc rire un peu : information zéro.
Puis il y a cette belle question pour conclure : « Qu’est-ce que vous regrettez de cette campagne ?« . Ceux qui ont le plus de choses à se reprocher ne regrettent rien, a.k.a. Marine Le Pen et François Fillon. Macron tente une excuse sur la guerre d’Algérie, « pour avoir blessé certaines personnes« . Hamon et Poutou regrettent que l’émission ne soit pas un débat. Bref, ce n’est pas le moment de faire de vagues de toute façon.
Ces moments où je me suis réveillée
L’actualité a forcé les candidats à modifier quelque peu leur discours. Outre cela, il y a bien eu quelques moments moins platoniques.
- Ce moment où Mélenchon explique qu’il n’a pas l’intention de quitter l’Europe, répondant une fois de plus à cette interrogation.
- Ce moment où Marine Le Pen a utilisé l’attaque contre les policiers pour affirmer une fois de plus sa xénophobie.
- Ce moment où on a parlé d’acheter une baguette en Euro-franc, la « monnaie-flexible » de Nicolas Dupont-Aignan.
- Ce moment lecture, où Nicolas Dupont-Aignan relate un échange de textos avec un patron de presse le menaçant pour qu’il rejoigne François Fillon (Serge Dassault ?).
- Ce moment sexiste de François Fillon : Léa Salamé lui pose une question à propos de son programme de sécurité sociale, et… « Je comprends que vous me posiez la question parce que vous avez été absente, et je vous en félicite ; mais j’ai déjà répondu 20 fois« . Une petite référence à sa grossesse qui selon lui l’aurait empêchée de suivre l’actualité.
L’ennui est sûrement venu du fait que rien de nouveau n’a été apporté, à trois jours du premier tour, et c’est tout à fait normal. À force de vouloir nous offrir un spectacle sans contrarier qui que ce soit, on ne nous offre plus rien du tout.