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Lulu Van Trapp, le groupe qui est bien dans ses santiags

Lulu Van Trapp, le groupe qui est bien dans ses santiags

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Ils sont Lulu Van Trapp. Ils jouaient aux Grands Voisins le 29 septembre et ils étaient aussi déchaînés qu’ils avaient l’air heureux. Chemise hawaïenne, patte d’eph blanc, santiags blanches, cheveux blonds décolorés, chaussettes à flammes ; ça popait, ça swingait, ça rockait. Les deux chanteurs, Rebecca et Maxime, dégagent une énergie à la Rita Mitsouko. Elle chante avec une voix de lady soul, s’enroule dans son micro pour jouer aux synthés. Il joue de la guitare, il a la voix grave, très grave, elle danse, ils se parlent. Ils sont accompagnés de Nico, aux machines et à la batterie, et de Manu à la basse. Quelques jours après le concert, nous les avons rencontrés pour qu’ils nous parlent un peu plus d’eux, de Lulu, des Lulus.

Manifesto XXI – D’où vient Lulu ?

Rebecca : Lulu à la base c’est venu avec Max quand on était encore dans notre ancien groupe La Mouche.

Maxime : On avait envie de faire aussi des chansons où on laisserait plus de place au texte. On s’est mis tous les deux à bidouiller un peu ce qui est devenu, quand la Mouche s’est arrêtée, les premières chansons de Lulu.

Rebecca : Depuis notre premier concert, ça va bientôt faire un an qu’on existe!

Mais qui est Lulu  ?

Rebecca : Pour la petite histoire, Lulu c’est comme les super-héros qui ont un faux nom. C’était une espèce d’avatar que je m’étais inventé à l’époque de la Mouche. Vu qu’on était en mode total auto-prod’, j’avais inventé ce personnage pour faire la fausse manageuse : je répondais au téléphone en disant : « Oui c’est Lulu Van Trapp ! »

Lulu Van Trapp, c’est un duo ou c’est un groupe?

Rebecca : Dans notre groupe d’avant, on chantait tous les deux, pour Lulu aussi.

Maxime : C’est plus Rebecca qui est la chanteuse principale, même si j’ai mes chansons. Il y a les chansons de Max, mais je ne suis pas le chanteur du groupe.

Rebecca : Moi je nous vois comme un groupe à deux chanteurs.

Rebecca : On avait déjà commencé à bosser avec Nico, à porter une troisième personne pour faire des concerts, même si on n’avait rien de précis en tête. Et après, les copains de Faire nous ont demandé d’ouvrir pour eux à la maroquinerie. C’est à ce moment-là que Manu a rejoint le groupe. En deux mois on s’est monté un set. Ce concert, c’est l’acte de naissance de Lulu Van Trapp comme c’est maintenant.

Maxime : C’est devenu un groupe.

Rebecca : Si avant ça, c’était juste tous les deux ; à partir de ce moment-là on s’est mis vraiment à penser ce groupe comme un duo à quatre personnes. L’identité est la même, c’est Max et moi qui la portons. C’est nous qui écrivons les bases des compos ensemble, qui écrivons les paroles. Il y a ce truc pop qui vient de nous deux. Après, Manu et Nico prennent de plus en plus de place dans l’arrangement et le processus créatif.

Maxime : Le squelette se fait à deux, l’habillage est vraiment à quatre. On fait fleurir nos compos avec les autres. On vient avec un couplet, un refrain… et en jouant avec les autres, il y a une énergie qui se développe. Au-delà de l’arrangement, chacun amène ses idées, ce qui nous en donne de nouvelles, et ça se construit comme ça.

Vous écriviez en anglais, vous avez commencé à écrire en français. Qu’est-ce qui a changé? 

Maxime : On n’a pas changé, c’est venu naturellement. Ça partait d’une phrase que j’avais dite un jour sur le sommeil. Avec Rebecca ça faisait super longtemps qu’on voulait écrire des trucs en français. Il y a plus des états où t’as envie de parler en français, et d’autres paysages que t’as plus envie de chanter en anglais. Parfois parce qu’il y a plus un truc rêve américain. C’est ce qu’on a toujours un peu prôné, si on a besoin de chanter dans une langue qu’on ne maîtrise pas forcément mais qu’on trouve fun, et qui se marie hyper bien avec la musique, l’esprit, les paroles : on le fera.

Rebecca : On aborde chaque chanson d’abord avec une mélodie. À partir de là, avec cette mélodie, des émotions viennent, et certaines se retranscrivent mieux dans une langue que dans une autre. Chaque langue a ses ambiances. Il y a plein de chansons où j’ai écrit des paroles en anglais, et puis en français. L’anglais venait naturellement parce que ça fait plus longtemps qu’on écrit en anglais. Le français, c’est vraiment un travail d’orfèvre.

Maxime : Tu galères un peu à trouver de l’or, mais quand t’en as trouvé, c’est pas pareil.

Crédits : Myriam Stamoulis

Rebecca : L’anglais c’est un truc malléable, comme du chewing-gum. Et donc du coup quand tu chantes des trucs un peu soul, alors là, l’anglais laisse la place pour un débordement d’émotions. Et le français, c’est vachement plus intello. En plus, vu que pour le moment on joue en France, il y a quand même un poids de chanter en français, tu dois faire attention à tes mots.

Maxime : C’est le problème du français : il y a une limite entre le « un peu niais » ou le « carrément prétentieux », et c’est dur de nager entre les deux. Pour l’instant, on s’en sort bien, on n’est pas dans le truc trop neuneu, et j’ai pas l’impression qu’on se la raconte.

Rebecca : En plus, pour l’instant notre public est français. Il y a un truc, d’être sur scène face à des gens de ton âge, de tous les âges, et de chanter en français. T’as un pouvoir. Il y a des trucs à faire passer par ton langage, par ton attitude, par tes vêtements, par le fait qu’on soit des garçons et des filles hyper fluides dans la manière d’aborder notre genre. Et le français est devenu une arme hyper kiffante pour ça, et de plus en plus j’ai envie de bien l’utiliser dans ce sens-là. Mais après, il y a des trucs hyper mélodiques, hyper lyriques où c’est juste du sentiment pur : et là l’anglais s’y trouve vachement mieux.

Vous faites de la musique sentimentale, mais vous mettez le feu. C’est normal ?

Maxime : Lulu, ça s’inscrit un peu dans la mouvance pop/soul/rythmes and blues. Mais je veux que ça se distingue aussi parce qu’on vient de La Mouche, d’un truc vachement plus punk, vachement plus rock.

Rebecca : On doit garder cette énergie-là. On fait de la musique naïve et pleine de sentiments, mais on ne veut pas être « la chanteuse poupée de chiffons » et « les garçons mignons ».

Maxime : C’est pas naïf notre musique.

Rebecca : Je trouve que ça a un pouvoir de ouf le naïf.

Maxime : C’est pas de la naïveté, c’est de la simplicité parfois. Et tu peux dire des choses assez simples avec une espèce de rage. C’est une question d’orchestrer le truc. C’est un peu ça que tu avais par exemple dans les années 1980 chez The Specials.

Sur scène, vous dégagez une énergie à la Catherine Ringer et Fred Chichin ! 

Maxime : Ça revient souvent. On a une connexion avec les Rita Mitsouko : on s’assume complètement sans se mettre d’étiquette. Il y a un truc unique avec les Rita. Quand ils ont percé, en France il y’avait pas mal de yéyés, ou de filles (que j’adore) un peu « nunuches ».

Rebecca : On se sent obligés de mettre une étiquette sur les femmes artistes : c’est la poupée, non, la meuf assumée, non, la meuf rock. Moi, j’ai envie d’être la meuf qui chante, comme j’en ai envie. Parfois fleur bleue. Parfois en mode je casse tout.

Maxime : C’est le XXIème siècle. On est tous des personnages complexes. Il n’y a pas marqué : pot de confiture à la fraise. Tu vas mettre ta main dans une boite et tu sais jamais sur quoi tu vas tomber. Nous, on prône à fond ce truc-là, même dans toutes nos influences : ultra soul, doo-wop, rythm and blues des girls bands… Les Ronettes, The Chiffons, The Supremes, Otis Redding, Shannon and the Clams, Etta James, Wendy Rene…

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Crédits : Lulu Van Trapp

C’est vrai que vous êtes difficiles à étiquetter. C’est une bonne chose non? 

Rebecca : Peu importe comment on nous regarde, il faut être honnête. C’est pour ça qu’on fait plein de styles différents. On s’ouvre juste complètement.

Maxime : Ce qu’on nous reproche tout le temps.

Rebecca : Il y a pleins de gens qui nous disent « J’aime bien les trucs dans ce style-là, mais pas quand vous faites ça ».

Maxime : C’est le truc que je ne comprends pas. Pour moi c’est notre force, on est ultra variés. T’écoutes YouTube deux secondes, t’as envie d’écrire quatre chansons dans quatre styles. Même si on a notre patte : si on fait du punk, on ne va pas jouer comme un punk, mais comme nous qui jouons du punk. Pareil quand on fait de la musique des îles ou asiatique : je ne suis jamais allé en Corée ou à Hawaï, c’est notre version de la chose.

Rebecca : On a tellement de chance d’avoir accès à des encyclopédies de musique, c’est juste trop décevant de se limiter à un seul style.

Maxime : C’est archaïque de se dire qu’il y a des catégories. Nous on est Lulu. On a notre gloubi-boulga.

Qu’est-ce qui vous plait dans la musique aujourd’hui ?

Rebecca : La liberté des scènes hip-hop, trap, l’éclectisme de plusieurs groupes britanniques. En France on aime beaucoup Quinzequinze, et le duo qui en est issu, Moutarde &Miel.

Maxime : On est hyper bien dans notre époque, dans nos pompes.

Rebecca : On est hyper bien dans nos santiags. On a l’impression que le paysage défini par l’industrie de la musique est très fermé. Il y a un standard à respecter, mais en dessous, il a tellement de choses ! En France, à Paris, au-delà de la musique il y a une façon de faire que j’adore.

Crédits : Juliet Casella

Vous avez l’intention de sortir un EP, sûrement en mars. D’autres projets ?

Rebecca : J’ai co-réalisé un clip avec Adriel Angeico aux Etats-Unis. La chanson s’appelle « Valley of Love », c’est inspiré d’un chapitre de Désert Solitaire, d’Edward Abbey. Un chapitre qui raconte l’histoire d’un petit garçon qui se perd dans le désert. Il est complètement paumé, et il commence à perdre la tête parce qu’il a mangé un datura. On a passé trois jours dans le désert et on a tout filmé en décor naturel, en lumière naturelle. Je joue le petit garçon et son double féminin. J’ai vraiment hâte. On a aussi enregistré un titre avec Azzedine Djelil, qui a produit Minuit et le dernier album de Catherine Ringer. On s’est rencontrés sur le tournage d’un clip de Catherine, je lui ai filé le nom de Lulu. Il nous a contacté en nous disant qu’il avait envie de produire un titre avec nous. Et c’était génial.

 

Lulu Van Trapp sera en concert à l’International le 22 octobre. En attendant, ils organisent au Point Ephémère une soirée « Eastern Delight » mercredi prochain, mercredi 10 octobre. Une soirée avec des groupes qu’ils adorent, qui mélangent musiques arabe, turque, balkanique, avec une vibe de groupe de rock d’ici. Sont programmés karaoké et danses folles, mais surtout sont programmés Sarah Maison, Wistiteast et Murman Tsuladze.

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