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Le courage de les appeler fascistes

Le courage de les appeler fascistes

A 100 ans presque jour pour jour de la Marche sur Rome, le coup d’Etat qui a permis à Benito Mussolini de prendre le pouvoir, le fascisme a remporté les élections en Italie grâce à l’union des droites de Silvio Berlusconi, Matteo Salvini et Giorgia Meloni. 

Le rêve mussolinien absolu est réalisé : le parti fasciste a été élu démocratiquement, sans besoin de recourir à la persuasion brutale. Le peuple a sciemment choisi le fascisme. 

En France, on se berce d’illusions en parlant encore de « montée » du fascisme et de « possibilité » que Marine Le Pen gagne en 2027 : Marine Le Pen est déjà au pouvoir avec ses quatre-vingt neuf député·e·s à l’Assemblée Nationale. Son parti arrive au deuxième tour depuis vingt ans.

A celles et ceux qui perdent leur temps à se demander si « oui ou non » on doit les appeler fascistes : penser que le fascisme en 2022 se manifeste selon les mêmes modalités qu’en 1922, c’est d’une naïveté déroutante. 

Le fascisme a un siècle d’histoire et en un siècle, une idéologie évolue et modifie ses langages et symboles. Le fascisme est une façon de regarder le monde qui s’oppose de manière presque manichéenne aux féminismes et aux théories queers. Le fascisme est une foi, et la foi, ne meurt pas en abattant simplement son Créateur. 

Historiquement, il est inexact de parler de fin du fascisme. Après la guerre, il fût impossible en Italie et en France d’éradiquer les fascistes des institutions. Le chercheur Mimmo Franzinelli montre dans ses ouvrages (Il fascismo é finito il 25 aprile 1945, 2022) le continuum fasciste au sein des instances de justice, éducation, police italiennes : Mussolini était certes mort, mais ses fidèles étaient partout. L’Etat était gangréné par ses fonctionnaires fascistes. 

Le continuum fasciste est présent également en France, où des lois vichystes persistent dans nos codes (L’héritage de Vichy – Ces 100 mesures toujours en vigueur, Cécile Desprairies, 2012), où la police ayant participé aux rafles n’a pas pu être épurée de tous les collaborationnistes, où la collaboration fût bien plus active que la résistance. 

Il faut avoir le courage de les appeler fascistes. Ne pas nommer cette idéologie, c’est collaborer. 

Les journalistes, hommes politiques, intellectuel·le·s qui tergiversent à appeler les fascistes avec leur nom ont une responsabilité historique dans leur prise de pouvoir. 

S’intéresser au fascisme ce n’est pas faire de l’archéologie, mais une plongée dans la fragilité de nos démocraties.

Voir Aussi

Mimmo Franzinelli,
Il fascismo é finito il 25 aprile, 2022

La pensée féministe, queer intersectionnelle est l’antidote aux fascismes. C’est en contre-pouvoir que nous devons nous organiser. La révolution romantique (relire l’article ici) est et restera l’élan vers la justice, la responsabilité de l’amour politique et le renouveau de nos démocraties.

Iels veulent notre disparition parce que nous pouvons provoquer la leur. Tôt ou tard les démocraties seront queers.

Et nous écrirons les pages de l’Histoire que les générations futures seront fières de raconter, quand le 25 septembre 2022 ne sera qu’un terrible et honteux souvenir. 


Image à la Une : Giorgia Meloni lors d’une allocution sur la chaîne Youtube de Fratelli d’Italia le 22 août, capture d’écran.

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