The Fifth Season : La prophétie utopique de Lafawndah

Manifesto XXI - Lafawndah

Après un premier album Ancestor Boy, Lafawndah dévoile un an plus tard son nouveau disque, The Fifth Season, sur le label Latency, présageant le renouveau d’un monde dévasté.

Depuis son premier EP Tan sorti sur Warp Records en 2016, puis Ancestor Boy en 2019, Lafawndah, artiste résolument multiforme, renverse les frontières, à la recherche de nouvelles explorations musicales sur chacun de ses projets. On l’a retrouvé ces dernières années sur d’autres collaborations : au Barbican Centre à Londres aux côtés de la percussionniste japonaise Midori Takada ou encore pour Honey Colony en compagnie de Tirzah, Bonnie Banane, Elheist et Kelsey Lu. Évoluant à travers d’autres spectres artistiques, comme le cinéma, l’art contemporain ou la mode, elle a collaboré également avec Laure Prouvost pour la Biennale de Venise ou Jeff Mills pour Courrèges. Lafawndah, c’est une voix unique, baignée par des influences artistiques rares, qu’elle confirme une fois de plus avec ce nouvel album, The Fifth Season.

Manifesto XXI - Lafawndah
© Charlotte Krieger

Empruntant son nom à la trilogie de science-fiction de l’écrivaine N.K Jemisin, « Les livres de la terre fracturée », The Fifth Season semble-nous inviter dans un monde décimé, dans lequel on entend raisonner « des chansons pour une pluie de cendres, des ballades pour un monde renversé » – c’est ce qu’a déclaré Lafawndah dans son communiqué de presse -, habitée par les percussions annonciatrices de Valentina Magaletti, les cuivres visionnaires de Theon et Nathaniel Cross mêlés aux claviers de Nick Weiss. Des espaces ravagés se dressent à perte de vue, dans lesquels les échos se rencontrent, libérant le champ des possibles, donnant naissance à une liberté musicale et innée. Une ouverture spontanée qui laisse entrevoir le lendemain après la fin d’un monde, où les silences sont présents et l’avenir encore incertain. The Fifth Season, est inquiétant et rassurant à la fois, la voix mystique de Lafawndah semble être celle d’une prophétesse annonçant l’arrivée d’un futur proche. 

L’album est baigné par les influences artistiques de Lafawndah. On retrouve des interprétations d’artistes inspirant.es : « Don’t Despair » de l’artiste trans Bervely Glenn-Copeland sorti en 1970, un poème de Kate Tempest « The Woman the Boy Became » dans « You, At the End », mais aussi l’adaptation d’une pièce orchestrale de Lili Boulander de 1917 dans « Old Prayer ». Un disque transcendant, on pourrait presque dire possédé. Entre free-jazz et musique minimaliste, un chaos envoûtant règne sur toutes les pistes, on pense à croire que l’on assiste à la cérémonie commémorative d’un monde consumé.

Arrive enfin « Le Malentendu » sur lequel figure la rappeuse Lala &ce accompagné d’un clip, réalisé par les réalisateurs de Jessica Forever, Caroline Poggi et Jonathan Vinel, sublimé par Claire Mathon en directrice photographie (qui a gagné le César de la meilleure photographie pour Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma). Ils mettent en scène Aomi Muyock, Nadia Moussa, Sanaa Morsali et l’artiste elle-même. Tourné en 16mm, Lafawndah apparaît comme une créature céleste, habillée d’une échine de fer, chevalière et libératrice.

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Lafawndah livre l’album du monde prochain, une majestueuse bande originale d’un passé ébranlé, sonnant le renouveau d’un meilleur lendemain.

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