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Interview sans concession avec Biche : chipolatas & walk of shame

Interview sans concession avec Biche : chipolatas & walk of shame

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Frank Alamo chantait « Biche, oh ma biche », une chanson d’amour louant le beau regard d’une jolie demoiselle et c’est dans les yeux que l’on a pu discuter avec les cinq chenapans chevelus de Biche, groupe de dream pop cosmique qui se produisait le week-end dernier au Biches Festival. Ils sont mystérieux, ils sont drôles et on vous conseille fortement de prendre un truc à grignoter car ces biches sont bavardes.

Manifesto XXI – Avant de débuter cette interview, le batteur Carol a tenu à nous expliquer l’origine de son prénom.

Carol : À la base, Carol c’est un prénom de garçon en polonais. Mais je ne suis pas polonais donc cette explication ne tient pas. Les racines de Carol c’est Carl, ce qui veut dire fort/viril.

Manifesto XXI – Ça te représente bien ces adjectifs, tu soulèves de la fonte ?

Carol : Je soulève entre 15 et 20 kg de fonte par jour.

À ce moment là, je vois Takumi, le super bassiste, partir et donc je l’attrape à la volée pour qu’il me parle des raisons pour lesquelles il a quitté son ancien groupe Aqua Nebula Oscillator.

Carol : C’est vraiment une histoire sordide. (rires)

Takumi : Non, c’est juste qu’il y a eu un petit problème dans le groupe. On devait signer chez un label mais un jour il y a eu un malentendu et on s’est limite bagarrés, et David (le guitariste, chanteur) a dit au batteur qu’il ne voulait plus jouer avec lui. Moi je suis resté au milieu de tout ça, j’étais parti trois semaines à Nantes et après réflexion je me suis dit que ce serait mieux d’arrêter. Avec un autre batteur ce n’était plus comme avant.

Manifesto XXI – Et du coup ton passé dans ce groupe t’as permis d’apporter des influences plus dark et expérimentales à Biche ?

Carol : Humainement oui, musicalement non. (rires)

Takumi s’en va.

Carol : C’est vraiment quelqu’un d’insaisissable.

Manifesto XXI – Bon alors les biches, qu’est-ce que ça fait de jouer à un festival qui porte votre nom ? C’est un peu comme une équipe de foot qui joue à domicile, tout est déjà acquis ?

Alexis C. : C’est pas tant acquis que ça. En plus on est passés en premier et il n’y avait pas foule. Mais on est super contents d’être là !

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Manifesto XXI – En arrivant au festival on a discuté avec un agriculteur (Jerôme du stand saucisse) qui nous a dit qu’il voyait à peu près quarante biches par jour dans le coin. C’est pour ça que vous êtes venus en fait.

Carol : Il est spécialisé dans quel genre de saucisses ?

Manifesto XXI – Plutôt chipo.

Carol : Le problème c’est qu’on a deux végétariens dans le groupe donc quand ça parle saucisse les gens baissent les yeux.

Alexis F. : Je mange pas de viande, c’est haram.

Carol : Moi par contre j’aime les saucisses. Il parle un peu de son travail à son stand ?

Manifesto XXI – Il est agriculteur donc tu pourras lui demander.

Carol : Ah mais c’est ses animaux qu’il découpe et qu’il cuit ?

Là nos deux végétariens ne sont pas bien, on les sent pâlir.

Alexis F. : Pour en revenir aux biches, en vrai j’habite dans le sud-ouest de Paris et on répète dans un endroit qui se trouve dans la forêt donc on en voit tout le temps des biches. On n’est pas venus ici pour en voir mais ça nous fait plaisir qu’elles soient la. En même temps avec tout le bruit qu’il y a elles doivent avoir peur.

Carol : Si j’étais une biche, je me ramènerais pas. Surtout avec le monsieur qui cuit les saucisses. (rires)

Manifesto XXI – Bon, on va parler un peu de votre groupe. Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Alexis F. : En fait, on se connaissait pas du tout avant, on s’est rencontrés surtout pour la musique fin 2011. On a vachement répété, on a pris le temps de voir ce qu’on voulait faire. On a fait quelques concerts au début. Le vrai début de Biche, en français c’était en 2013.

Carol : Avant on chantait en anglais, c’était un autre genre de musique. À un moment on s’est vraiment posé la question de ce qu’on voulait faire. On a changé de style et on s’est questionnés sur la langue dans laquelle on voulait chanter. On avait un peu refusé le français pendant un moment et finalement ça nous emmerdait un peu d’être un énième groupe qui chante en anglais mais il faut un peu de maturité pour s’en rendre compte. On s’est aussi dit qu’il fallait changer de nom parce que ça n’avait plus de sens de s’appeler Mrs Wild.

Alexis F. : Brice est arrivé un peu plus tard, en mars 2016.

Brice : Alexis avait le rôle de guitariste avant, il ne faisait pas de clavier. J’ai un autre groupe qui s’appelle A Rainmaker et on avait fait une date avec Biche au Bus Palladium où on a vraiment bien accroché. De fil en aiguille je me suis retrouvé à jouer avec eux.

Manifesto XXI – Vous avez fait beaucoup de dates de concert, à Paris notamment, et pourtant il n’y a pas beaucoup de votre musique disponible sur Internet.

Alexis F. : On a une démarche un peu particulière, on est un peu control freak sur les enregistrements et tout ce qui sort sur Internet. On essaye de proposer quelque chose d’assez abouti. On a surtout fait beaucoup de répétitions à cause des dates de concerts qui s’enchaînaient. On ne s’est jamais vraiment octroyé de moment pour enregistrer en studio. Quand on a commencé à le faire, ça n’a pas tout de suite marché mais là on est en train de bosser sur un 45 tours qui fait office de préambule à l’album qui va suivre. L’album va sûrement sortir en 2017. Il y a aussi un joli clip qui arrive.

Manifesto XXI – Il y aura des biches dans le clip ?

Carol : Ah sûrement !

Manifesto XXI – Info ou intox ?

Carol : Nous en interview on donne 50% de vrai, 50% de faux, ce sera à toi de faire le tri. Peut-être qu’à la fin on te dira chaud ou froid. En fait Alexis n’est pas vraiment végétarien. (rires)

Alexis F. : Tu as dû voir la vidéo du live qu’on a tourné sur la péniche dans une serre. Tous nos potes étaient là c’était cool !

Manifesto XXI – Sur le titre « As-tu Peur du Matin », ça parle de walk of shame après un one-night stand ? Le moment gênant où tu dois te casser en douce.

Carol : Moi dans ma tête le walk of shame c’est quand tu rentres hyper tard d’une soirée et que tu croises des gens qui se lèvent tôt pour aller au boulot.

Alexis C. : Il y en a plusieurs des walk of shame, dont celui de Game of Thrones.

Carol : Cela dit le point commun qu’il y a entre le walk of shame de Game of Thrones et celui de la fin de soirée (où tu as niqué ou pas), c’est que dans la série tout le monde dit « shame, shame, shame » et quand tu rentres de soirée dans le métro ce sont les yeux des gens qui te crient « shame, shame, shame ». T’es affalé dans la ligne 2, t’es dégueulasse, tu pues la bière, les yeux explosés. Là t’as Jean-Pierre 40 ans en costume qui, lui, se rend sur son lieu de travail, qui est sûrement DG à la Société Générale. Là tu as l’histoire !

Alexis F. : En vrai c’est nettement moins obscur ou violent. Ça raconte plus quelque chose d’un peu idéal, de deux personnes qui passent la nuit ensemble et qui se demandent s’ils ont vraiment envie que ça se termine. Est-ce que t’as peur du matin ? Est-ce qu’on n’est pas mieux là ?

Carol : Mais ce qu’on aime bien dans nos textes c’est aussi laisser une grosse part à l’interprétation. On pose les bases des situations et on aime bien laisser le flou sur le lieu, le moment de la chanson. On sait tous ce que c’est qu’un matin qui vient, un soir de pleine lune… C’est des sensations si tu veux.

Alexis F. : C’est le but d’écrire en français aussi. On a une super belle langue très évocatrice. C’est cool de pouvoir proposer des textes à un public et qu’il en fasse ce qu’il veut.

Manifesto XXI – Pendant votre live j’ai entendu un de vos titres pour la première fois, « Sous le Cercle jaune ». Elle parle de quoi cette chanson ?

Alexis F. : C’est une histoire en fait. L’histoire d’un type qui cherche, qui avance dans un genre de désert, qui court après une sorte de mirage, quelque chose d’insaisissable. C’est comme une petite aventure.

Manifesto XXI – Alexis, j’ai une petite question piège pour toi. Étais-tu au festival Fnac Live ?

Les biches en chœur : Oooooh mec t’es grillé !!

Carol : Le troll de qualité supérieure.

Alexis C. : J’avoue j’ai un autre groupe.

Manifesto XXI – Le mieux c’est que j’ai eu cette info via le dernier vlog d’EnjoyPhoenix qui était au festival et on te voit dans un coin te foutre de la gueule d’une fille qui chante faux.

Carol : Alexis Croisé est dans une vidéo d’EnjoyPhoenix ? Elle fait des millions de vues cette meuf !

Alexis C. : Mais c’est qui cette fille ?

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Carol : Mais dans quel monde vis-tu ? Elle est super connue. Imagine Norman mais en version meuf qui parle de maquillage et de coiffure. Moi je regarde tous ses tutos.

Manifesto XXI – Parlez-moi un peu de vos inspirations musicales ? Ça fleure bon le Tame Impala et le Pond, mais vous écoutez quoi en vrai ?

Carol : Il y a beaucoup de Nicolas Ker, mais dans une inspiration plus psychique. Il faut que vous regardiez son passage à On n’est pas couché.

Manifesto XXI – Vous en avez pensé quoi du dernier album de Tame Impala ? Choqués et déçus ?

Carol : Moi je connais pas.

Alexis F. : Moi je m’en fous.

Carol : Pour répondre à ta question il aurait fallu que tu vois cette scène où on s’est tous retrouvés un jour de répet’, c’était le lendemain de la sortie de Currents. J’étais peut-être celui qui attendait le moins cet album. Normalement les moments de répet’ sont assez joyeux et là c’était un moment très triste. (rires)

Alexis F. : C’était la première et dernière écoute d’ailleurs. C’est hyper cohérent avec ses pensées en fait. Dans ses interviews, Kevin Parker raconte qu’il a une grande fascination pour les artistes pop comme Katy Perry, du coup tu comprends un peu le cheminement. Un mec qui vient du psyché et qui a une fascination pour des artistes pop, tu vois ce que ça peut engendrer sur l’évolution de sa musique. Je pense qu’il veut toucher un maximum de gens mais en restant pointu.

Carol : Ce qui est intéressant avec Tame Impala c’est pas tellement la continuation de sa musique mais au-delà de ça c’est intéressant dans ce que ça raconte : l’intégration dans le système d’un groupe underground à la base. On arrive avec deux albums très pointus musicalement avec un public intelligent. Il y a un moment où ces groupes qui rencontrent un certain succès sont en fait réintégrés par des gros médias comme les Inrocks et leur musique suit et se formalise.

Alexis F. : Après c’est vrai que Tame Impala, Pond ou Melody’s Echo Chamber ont su poser les nouvelles bases de la « dream pop ». C’est un genre dans lequel on s’inscrit particulièrement. Mais avant Tame Impala il y a tellement de choses. On a adhéré à la modernité dans ce son typiquement rétro mais à la base c’est les Beatles, Tom Rundgren, beaucoup de groupes des années 60-70. Sinon dans les années 90 j’adore Stereolab, Broadcast…

Carol : Sinon moi je me butte à Chris Cohen. Jacco Gardner évidemment. D’ailleurs il est bassiste dans le groupe Eerie Wanda.

Alexis F. : Ah c’est génial ça, complètement Broadcastien. Il y a Dungen aussi qu’on adore.

Manifesto XXI – Qui compose et qui écrit dans le groupe ?

Alexis F. : Moi je bosse beaucoup tout seul. Je compose et j’enregistre en même temps. L’avantage que j’ai c’est que je joue de tous les instruments. Sur la composition je chapote un peu tout puis ensuite on met en commun. Pour l’instant c’est moi qui écris les textes parce que j’essaye toujours de travailler dans un esprit un peu conceptuel, de continuité, de cohérence.

Manifesto XXI – Parlez-moi un peu de « La Nébuleuse de Sienne ». Vous êtes inspirés par l’espace ? Vous croyez aux extraterrestres ?

Alexis F. : Bien sûr ! Comment peut-on ne pas y croire ? C’est évident vu le nombre de planètes.

Brice : Le père de Jodie Foster dans Contact disait : « Si on était les seuls dans l’univers, ce serait un beau gâchis d’espace. »

Carol : La vraie question n’est pas les extraterrestres. La vraie question est plus celle des mondes parallèles. Là on arrive dans le vif du sujet. C’est-à-dire, est-ce que là, à côté de toi, il n’y a pas une autre version de cette réalité.

Alexis F. : La physique quantique te dit que dans chaque réalité il y a une réalité différente qui se passe, et toutes ces réalités différentes où est-ce qu’elles vont ?

Carol : En termes de paranormal on aime les trucs assez pointus. On pourrait faire une interview entière là-dessus avec des sources balaises. Tu peux pas te contenter de dire « Les fantômes, MDR ! » ou « Les OVNIS pourquoi pas ». Non, dans ces cas-là on rentre dans les faits et là c’est inquiétant. C’est une interview qu’il faut faire à la tombée de la nuit et qu’on trace un cercle au sol. Plus sérieusement, c’est un côté qu’on partage pas mal, cet attrait pour le mystique.

Manifesto XXI – Allez, dernière question : c’est pour quand le prochain concert ?

Alexis F. : À l’Espace B en octobre avec Mild High Club !

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