Qu’on en regarde ou pas, le commun des mortels sait que la majorité des films pornographiques prennent vie dans un monde absurde où les plombiers (arrivent à l’heure) préfèrent les faveurs sexuelles de leur cliente à une augmentation de leur SMIC et où les femmes ont des orgasmes uniquement par pénétration. Mais si cet univers bizarre tente d’imiter maladroitement la vie que nous partageons tous et toutes, les vidéos réalisées par Inside Flesh semblent se dérouler dans un cosmos où les codes habituels de la pornographie ont sombré depuis belle lurette, et où l’ambiance sombre et mystérieuse semble avoir été mise en place par Marc Jacobs ou John Galliano.
Inside Flesh est un projet fondé en 2007 par le collectif d’artistes SUKA OFF axé sur l’art vidéo et la photographie. A sa tête, un couple qui crée une synergie entre pornographie, art et haute couture pour créer un contenu sensuel, esthétique et complexe ; sans limite.
Inside Flesh c’est combiner les médiums mais également collaborer : en 2014, le couple débute des coopérations avec divers créateurs de mode comme par exemple Barbara Bologna, Leonard Wong, Alice Auaa, Majesty Black…
Dans le dystopique univers d’Inside Flesh, il n’est pas hasardeux de croiser un couple enchaîné aux visages bandés, empêtré dans des mètres carrés de cuir, submergé par une mer de latex ; il n’est pas impossible de tomber nez à nez avec ses plus grandes craintes : la nudité, la pénombre, la douleur… Que ce soit dans les vidéos ou les photos, les corps sont recouverts de matériaux élégants, de pièces de lycra luisant, de vinyle quasi liquide qui viennent trancher avec la crudité des gestes et des positions presque macabres. Au sein de ces performances, les cris de plaisir sont remplacés par une bande sonore rythmée, cardiaque, cadencée qui nous plonge dans une atmosphère sombre où l’on pourrait entendre le battement de nos cils.
Parce qu’artiste et acteur sont deux métiers comme les autres, Inside Flesh a ouvert une page Patreon où il est possible de les rémunérer librement, donnant ainsi accès à différentes contreparties, notamment un lien vers l’ensemble des vidéos.
«Certaines personnes, après avoir regardé nos films, tentent de nous convaincre que nous ne faisons pas de la pornographie mais bel et bien de l’art», a déclaré Sylvia Lajbig, co-créatrice de Inside Flesh. «On nous explique que nous avons tort de qualifier nos œuvres de pornographie, de nous bannir et de nous imposer un fardeau. Mais comment appelle-t-on un film qui présente un acte sexuel détaillé? Pourquoi la pornographie et l’art seraient-ils incompatibles?»
En plus des différents supports sur lesquels se concentre Inside Flesh, le couple a également rédigé un court manifeste scindé en dix points mettant en avant les valeurs que véhicule le projet :
En somme, Inside Flesh exploite la carnalité humaine sous tous ses aspects biologiques et/ou physiologiques ; il tente de redéfinir les normes du genre en brouillant les codes sexuels culturellement assignés aux hommes et aux femmes. Le collectif tente de se réapproprier les mythes classiques et les idées philosophiques par le biais de l’utilisation du langage visuel contemporain. Il recherche et exploite des formes de communication alternatives et radicales basées sur la symbiose entre le corps humain et les appareils électroniques via une esthétique postindustrielle créant un contraste entre la chair et l’acier, la peau et le béton.