« United Snakes of America », nouveau titre de Faux Real s’accompagne d’un clip made in USA. Moins romantique, plus punk; on y retrouve le duo qui scande leur horreur face à l’état actuel des États-Unis. Visuellement, ils explorent les codes du rêve américain en dévoilant une sombre réalité à travers leur texte. Une œuvre donc méta moderniste où les messages qui se disent opposés peuvent coexister pour un nouveau dialogue.
Le clip de « United Snakes of America », réalisé par Léo Schrepel, annonce le retour de Faux Real. Les symboles visuels et textuels viennent clasher avec l’allure solaire et pop de leur nouvelle chanson. Les frères n’ont pas peur de prendre du recul sur leur identité américaine pour alerter sur la liberté citoyenne actuelle des États-Unis, surtout au niveau de la visibilité qu’on leur donne sur les décisions passées (retrait brutal d’Afghanistan) et futures (relations diplomatiques avec la Russie et la Chine). On les verra mettre une main sur le cœur, comme lors du chant national, pour ensuite voir le tout se transformer en un mouvement de bras serpentin.
Des gestes sournois qui font référence au serpent et qui fait d’ailleurs de multiples apparitions dans ce clip : dans une décapotable, enrobant les corps, à travers les danses des chanteurs devant la Maison Blanche. Une référence aussi plus subtile à Trump, et sa présidence tumultueuse, qui a souvent été rattachée aux théories complotistes d’humains reptiliens.
Mais au-delà de cette allusion, on notera la date de sortie de ce titre. La chanson sort un an après l’investiture de Joe Biden en tant que président. Si il se fait rare dans les médias par son caractère intègre, il se pourrait que les erreurs faites sur le plan administratif aient toutefois des répercussions sur le long terme. Si Biden n’est certes pas aussi déroutant que Trump, l’absence de plans concrets lui fait perdre la confiance des citoyens. Comme l’indique un article de la BBC, ces indécisions se verraient surtout au niveau des dépenses sociales, et de la transition énergétique.
L’occasion pour Faux Real de rappeler l’importance de rester critique et alerte, scandant dans leur refrain que le public n’est pas dupe et analyse les moindres faits de geste d’un gouvernement « aveugle » (« The blind leading, the blind eye »).
Avec ce nouveau titre, Faux Real s’approprie des productions contemporaines en vogue. On y retrouve plus de vocoder que dans l’EP éponyme sorti en 2020. La présence du synthé est moins aérienne, plus dans les percussions qui viennent structurer leurs paroles et non les envelopper. Une petite transition non anodine qui vient porter le message de leurs textes.
On ne sait pas vraiment si Faux Real aime la pop, ou si c’est une grande blague, mais ce qui importe c’est que ce clip peut être pris au sens littéral comme une critique. Marshall McLuhen disait : « the medium is the message » (le médium est le message). La vidéo est devenue un élément primordial pour l’industrie de la musique qui vient soutenir l’essor d’un·e artiste. La musique ne se base plus seulement sur le son, mais en partie grandissante sur l’esthétique. Qui saura se distinguer des autres ? Qui aura la meilleure équipe de communication ? Tout est ficelé, structuré. On a l’illusion d’être dans une plus grande diversité musicale, mais l’industrie est de plus en plus conformiste. Ceux qui résistent demeurent en marge, au risque de ne jamais toucher un rond sur leur création. Résister ou lutter ! Le choix d’un clip aussi chargé en symboles devient donc le message. Il y a des serpents dans la politique, mais aussi dans l’industrie musicale, surtout dans celle du pays qui dicte les normes du capital culturel mondial. Mais nous avons espoir que tout peut encore changer. Le tout est donc post-ironique, tant Faux Real a dû baigner dans ces logiques et use des codes pour en faire une critique d’autant plus forte.
Au niveau musical, les deux frères restent fidèles à leur nostalgie musicale. Ils nous disaient en 2020 que Faux Real était tributaire du rétro. L’album de l’époque puisait beaucoup plus dans des inspirations 70’s. Aujourd’hui, ils posent en poster boys dans une chambre, scandent en chorale tels les boys band de l’époque et surtout, portent moumoutes, couleurs fluorescentes et lunettes rectangulaires. On les retrouve toujours dans le rétro, mais une décennie plus tard.
Les Faux Real sont malins tout en ayant la classe. En plus, ils ont un grand cœur : les mamies et papis du monde entier pourront apprécier leurs moves inégalables lors d’une future tournée dans les maisons de retraite.
Alors réalité ou rêve, on aimerait tant voir cette vision se concrétiser, car la culture appartient à tous·tes.