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Cinéma 2024, le manifesTOP et FLOP - Manifesto XXI
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Cinéma 2024, le manifesTOP et FLOP

Cinéma 2024, le manifesTOP et FLOP

Alors que le triomphe aux Golden Globes du consternant Emilia Perez (et autres flops) confirme que les 1% du cinéma (comme Audiard) ne comprennent toujours rien à la queerness (sommes-nous surpris·es?), on se réjouit que l’année 2024 ait vu de nombreux films s’emparer de la question des violences capitalistes. Plusieurs films qu’on a aimé ont d’ailleurs mis au centre la question coloniale, prisme critique incontournable pour comprendre l’urgence actuelle de ces enjeux partout dans le monde, de Gaza à la Kanaky. 

Pour combattre le mal qui “sourd, perce, goutte”, pour citer Aimé Césaire dans Discours sur le colonialisme, mais que l’Occident cache, certain·es réalisateur·ices ont  montré sa banalité par la fiction. Dans La Zone d’Intérêt  (lire notre analyse) Jonathan Glazer utilise un hors champ sonore complexe pour évoquer l’horreur d’Auschwitz tandis que Todd Haynes  détourne les codes du mélodrame et de la presse à scandale pour parler de l’inceste et de l’emprise, dans la “comédie” cruelle May/December. Le film de Haynes pose d’ailleurs cette question : la fiction cinématographique peut-elle rendre compte de la réalité (et donc de sa violence) ? Les documentaires Une famille de Christine Angot, Dahomey de Mati Diop, La Fleur de Buriti de Renée Nader Messora & Joao Salaviza et enfin, l’incontournable No Other Land de Basel Adra & Yuval Abraham, semblent répondre par la négative. Ces films nous rappellent toute la puissance du cinéma comme outil de justice, de mémoire, de combat et de dignité.

Le TOP des meilleurs films 2024

May / December – Todd Haynes

20 ans après son scandale médiatique, Todd Haynes s’intéresse à la relation pédocriminelle entre Gracie (36 ans au moment des faits) et Joe (13 ans à l’époque). C’est l’arrivée d’une actrice, devant interpréter Gracie pour un film, qui vient perturber (ou au contraire, ne rien changer ?) au quotidien de ce couple, alors décrit comme « sulfureux » par la presse. Haynes s’attèle alors à jouer des codes du mélodrame et de la comédie grinçante afin d’explorer la complexité de l’emprise pédocriminelle, tout en interrogeant la capacité du cinéma et des acteurices à rendre compte du réel, de la violence et de la vérité (thématique discutée ici dans Manifesto XXI). Une histoire de vampirisation entre actrices (l’une dans sa vie, l’autre à l’écran), portée par Julianne Moore et Natalie Portman, et cela autour de Joe, enfant piégé dans un corps d’adulte à cause de l’emprise que Gracie exerce sur lui. Dans ce rôle, Charles Melton irradie de justesse et de sensibilité, notamment lors d’une scène bouleversante, montrant ce père qui fume son premier joint avec ses enfants dont il pourrait être le grand frère… Un tour de force. 

All we imagine as light – Payal Kapadia

Le plus beau film de la sélection officielle au festival de Cannes – lumineux, comme son titre. Le deuxième long métrage de la réalisatrice indienne Payal Kapadia, qui avait signé le non moins sublime documentaire hybride Toute une nuit sans savoir en 2021, suit le quotidien de trois femmes dans le Mumbai contemporain. Un quotidien âpre, et pourtant rapidement rempli de magie. Celle de l’amour romantique (des scènes de baisers d’une sensualité qui nous manquait !), mais surtout de la tendresse qui unit les trois protagonistes du film.

No Other Land – Basel Adra, Yuval Abraham, Rachel Szor, Hamdan Ballal

Depuis les années 1980, le village de Massafer Yatta en Palestine est considéré, illégalement, par le gouvernement israélien comme zone d’entraînement militaire. Les habitant.es et paysan.es autochtones résistent, et refusent de voir leur village détruit. Parmi elleux, Basel Adra ne cesse de filmer les manifestations pacifiques organisées dans son village et les exactions du gouvernement colonial. À l’image de Cinq caméras brisées (dir. Emad Burnat, Guy Davidi) il y a plus de dix ans, No Other Land documente l’intensification de la colonisation en témoignant d’une solidarité possible. Film collectif, réunissant aussi à l’écran militant.es palestinien·nes et israélie·nes, No Other Land est un documentaire brut, comme la radicalisation d’un pouvoir d’extrême droite qui hâte sans cesse l’avancée des colonies en Cisjordanie. Essentiel, tant il se fait aussi le douloureux écho de l’horreur des volontés génocidaires à Gaza ou en Cisjordanie.

Une famille – Christine Angot 

Après l’écriture, Christine Angot passe au cinéma documentaire pour continuer son exploration des ravages de l’inceste. Caméra en main, elle retourne à Strasbourg, là où tout a commencé, et va à la rencontre des personnes de son entourage pour les interroger sur l’inceste qu’elle a subi de la part de son père. Au-delà de sa famille, c’est aussi les spectateurices et la société (notamment en revenant sur la récéption médiatique de son roman L’inceste) qu’elle confronte en nous obligeant à investiguer notre complicité collective avec l’inceste. On notera notamment une scène rare (si ce n’est jamais vue) dans le cinéma documentaire: l’entrée imposée d’Angot et son équipe, presque par effraction, chez sa belle-mère, pour y régler ses comptes et rétablir la vérité/dignité. En résulte un film bouleversant de sincérité et d’intelligence, qui dénonce les stigmates de l’inceste, mais également la violence du silence qui l’entoure. Magistral.

Miséricorde – Alain Guiraudie 

Du cruising forestier, deux frères ennemis, un curé porté sur la chose, des policiers aux méthodes iconoclastes, l’Aveyron et Catherine Frot sont la matière avec laquelle Alain Guiraudie a savamment composé Miséricorde. Auréolé cette année du prix Jean Vigo pour l’ensemble de sa carrière, le réalisateur de L’Inconnu du Lac développe depuis ses premiers films une petite musique qui lui est propre et avec laquelle il nous raconte sa campagne et ceux qui l’habitent. Les genres s’y confrontent alors que les corps tentent de se mêler. Il est réjouissant de voir que des comédies françaises aussi étranges, que des films queers si singuliers puissent exister. Espérons enfin que Guiraudie ne cesse de nous perdre dans la forêt, autour d’une rivière où au sommet d’une montagne. 

Les reines du drame – Alexis Langlois

C’était sûrement le film français le plus attendu par les queers cette année. Il raconte l’impossible amour entre  Billie Kohler, chanteuse de punk et Mimi Madamour, gagnante de télé crochet la propulsant en superstar à la manière de Britney ou Lorie. Ce grand film pop et queer est truffé de clins d’œil à la culture télé et internet mais aussi au cinéma de Brian de Palma, Douglas Sirk ou Jean Genet. Au delà de ces références, le film propose une vraie reflexion sur l’amour queer, ce(ux) qui l’empêchent et sa violence. Hybridant de nombreuses formes d’expressions visuelles et accompagné d’une bande originale entêtante signée Yelle, Rebeka Warrior, Louis Bsx ou encore Pierre Desprat, Les Reines du Drame explore toute l’ambiguïté du désir de célébrité, de sa violence (et la folie qu’il crée) ainsi que des sacrifices, tant politiques qu’intimes qu’ils peuvent induire. Alexis Langlois (lire notre interview) s’adonne à montrer l’envers du décor du système capitaliste de la célébrité et propose une ode aux ringardes dont on sort ému·e et avec l’envie d’aimer. Mention spéciale aux acteurices et en particulier à Bilal Hassani qui crève l’écran en commère des réseaux sociaux. Comme le chantent Mimi et Billie, on a été « fisté jusqu’au cœur » par ce film. 

La fleur de Buriti – Rénée Mader Messora, Joao Salavizza

Embrassant une forme hybride entre fiction et cinéma documentaire, La fleur du buriti raconte trois époques du peuple autochtone Kraho vivant dans le Tocantin, au Brésil. À travers les visions d’une enfant qui pressent la menace, c’est l’histoire et la dignité de tout un peuple qui est documenté. Peuple qui va, au fur et à mesure, s’organiser et se mobiliser pour s’opposer au fascisme fossile de Bolsonaro. Un grand film poétique et politique. 

Une Langue Universelle – Matthew Rankin 

Bizarrerie canadienne sortie en catimini avant les fêtes, Une Langue Universelle est reparti du festival de Cannes avec le prix du public de la Quinzaine des Cinéastes. Quelque part entre Wes Anderson et Guy Maddin, Matthew Rankin poursuit avec son second long-métrage la création d’un univers personnel, visuel et sensible. Winnipeg y devient une enclave persane au Canada, on y parle farsi et le commerce de dindes semble être le cœur battant d’une économie parallèle et florissante. Une fois passée la surprise de l’étrangeté, on assiste aux retrouvailles d’un fils avec sa mère, d’enfants avec leurs parents. Véritable ôde au multiculturalisme, Rankin invente un Canada où se façonne une autre identité Iranienne, hors de l’autoritarisme de Téhéran, mais sans pour autant se coller au moule d’une minorité en quête d’intégration. Rares sont les films dans lesquels chaque plan nous apparaît comme un tableau. D’autant plus rares sont ceux qui parviennent à transcender cette beauté plastique pour en faire la matière dé réflexions complexes, d’émotions universelles.

Dahomey – Mati Diop

26 trésors royaux, volés par la France lors de la colonisation, sont rapatriés, chez eux, du musée du Quai Branly au Bénin (ancien royaume de Dahomey). À la frontière entre documentaire et fiction, Mati Diop signe un poème politique. Le film interroge la colonialité et le retour de ses œuvres dans leur pays d’origine comme un objet de débat radicalement ancré dans le présent et l’affirmation de l’indépendance du peuple béninois, en particulier sa jeunesse. En effet, la première partie, contemplative, lors de laquelle la caméra ne quitte jamais ces trésors des yeux (même pas dans la soute de l’avion) laisse place à une deuxième partie de discussions entre étudiant·es de l’université Abomey-Calavi. Que faut-il faire de ces trésors ? Le choix de les exposer dans un musée n’est-t-il pas la continuation d’un prisme de la conservation imposé par les colons ? Pourquoi la France n’en rapatrie que 26 et pas plus ? Ne faut-il pas réintégrer ces objets, bien que centenaires, dans les pratiques quotidiennes qu’elles avaient avant leur vol ? Tant de questions complexes et passionnantes, le tout ponctué de la poésie magnifique de l’auteur haïtien Makenzy Orcel. Un chef d’œuvre. 

Diamant Brut – Agathe Riedinger

À travers les espoirs, les désillusions et le rapport tumultueux au monde de Liane, une jeune femme issue des marges populaires, le film dessine un portrait touchant et nuancé des féminités subalternes. Le premier atout du film est indéniablement l’interprétation magistrale de l’actrice principale, jouée par Malou Khobizi. Liane n’est jamais figée, elle est à la fois vulnérable, audacieuse, confuse, blessée et complexe. On est captivé·e par son cheminement, et Riedinger évite l’écueil des récits larmoyants ou sensationnalistes. Constamment hypersexualisée par les regards extérieurs, la relation de Liane avec son corps et son désir est empreinte de malaise et de gêne. Cette tension illustre combien les oppressions façonnent les protections que l’on érige, autant de carapaces difficiles à briser. Peu d’œuvres abordent cette complexité avec autant de justesse. Visuellement, le film est un bijou. Avec son  filtre « glamour », la caméra nous plonge dans le regard de Liane, qui rêve d’un monde scintillant, et le contraste avec sa réalité brutale est saisissant.  Le film n’est pas parfait : certaines scènes traînent en longueur, et la fascination de la réalisatrice pour la téléréalité et les milieux populaires tend parfois à la fétichisation. Pourtant, on a été séduit·es par ce récit d’apprentissage qui brille par son humanité et son authenticité. Derrière les carapaces, les rêves et les failles, Riedinger dévoile un véritable diamant brut.


LE DUEL: The substance, Coralie Fargeat 

Qu’on l’apprécie ou qu’on le déteste, The Substance est probablement le film le plus commenté et discuté de l’année. Cela méritait bien un petit duel d’avis contradictoires au sein de la rédaction.

POUR : Travaillant une imagerie pornographique et publicitaire, accumulant les effets et outrances à la truelle, Coralie Fargeat n’y va pas avec le dos de la cuillère. Pourtant, c’est dans son maximalisme que la réalisatrice arrive à dénoncer l’âgisme et le sexisme. On notera notamment le presque court-métrage dans cette scène où Demi Moore devant son miroir, dans cette salle de bain où tout est mis à nu, se maquille et se remaquille, avant qu’elle ne pose un lapin à son date, écrasée par la haine de soi. On discute, on débat et pourtant, difficile de sortir le film de la bisserie d’exploitation qu’il a toujours été. Et finalement si c’était ça qui était vraiment étrange dans The Substance: que les cinéphiles bien éduqués, de Cannes à Hollywood, s’intéressent à un film aussi viscéralement mainstream, une comédie noire qui aurait pu faire les grands jours des vidéoclubs?

CONTRE Quel dommage de dépenser tant de moyens pour un body-horror au ras des pâquerettes…  Si le film fait de l’ultra référence, il reste vide et on cherche en vain des subtilités de scénario, pour finir par ne jamais atteindre la qualité des films cités. Fargeat s’engouffre dans ce conte monstruoféministe avec la finesse et la subtilité d’un vieux man : par trop vouloir dénoncer le male gaze, on finit par en faire. La scène finale vaut le détour en performance VFX, pour le reste on cherche encore les raisons de lui attribuer le Prix du Scénario à Cannes.


Le FLOP, nos pires films de 2024

Anora – Sean Baker

Autre grosse déception du palmarès cannois, autre film de vieux man. La rencontre pleine de clichés entre une jeune travailleuse du sexe américaine et le fils d’un oligarque russe (ou sont-ils arméniens ? Le scénario passe d’un langage à l’autre, d’une nationalité à l’autre comme dans un grand « bloc de l’est »). L’énergie du film s’épuise très vite face à un scénario cousu de fils blancs – pour finir par nous embarrasser de moralisme sur la sexualité de la protagoniste.

L’Amour Ouf – Gilles Lellouche 

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L’Amour Ouf c’est très grave. Gilles Lellouche et sa clique en font des caisses et le font sur du gros son. 35 millions de budget pour 2h40 d’amour passionnel et violent, qu’on aurait pu penser daté si le film n’était pas un tel succès, en particulier auprès des jeunes. L’amour ouf serait donc un amour où les femmes sont éplorées et désœuvrées, attendant qu’un homme vienne offrir un sens à leur existence. Problème, l’amour ouf c’est également un monde où les hommes sont violents à tendance mutique. Bref, l’amour ouf c’est une sorte de patriarcat glorifié, qui serait totalement ringard s’il n’était pas musical et dansant. A voir si une esthétique clipesque suffit à nous faire oublier l’odeur rance et avariée de l’hétéropatriacat.

Emilia Pérez – Jacques Audiard 

Askip les « wokes » ont gagné, pourtant en 2024 on peut encore faire un film crasseusement ignorant des réalités politiques et culturelles du personnage principal et du pays dans lequel il vit. Et être récompensé pour ça. En effet, Emilia Pérez est un chef d’œuvre d’arrogance. Il en fallait une bonne dose pour réaliser ainsi l’histoire de cette femme trans, ex-narcos devenue patronne d’une ONG dédiée aux victimes de son trafic… en comédie musicale. Comme l’a très justement écrit Paul B. Preciado dans Libération : « Audiard se rêve en Demy, Almodóvar ou González Iñárritu sur fond de Notre Dame de Paris au Mexique, mais sans partager ni le regard ni l’expérience trans, queer et mexicaine, il finit par nous embarquer dans un voyage de tourisme trans-raciste. » Ce navet de luxe ne va pas arranger la réputation des Français·es au Mexique, où le public est à juste titre unanimement indigné par la manière dont sa culture est malmenée. Dire que c’est peut-être le premier film d’Audiard qui passe le test de Bechdel, ce qui a sans doute demandé un gros effort d’imagination mais remet en question le bien fondé du proverbe « Mieux vaut tard que jamais ». Parfois, mieux vaut s’abstenir que d’étaler sur 2h son incapacité à écrire des personnages féminins justes. On salue quand même la reine Karla Sofía Gascón dont la simple présence sauve le film et nous évite de soupirer en continu pendant la projection. Qu’on lui écrive des rôles à sa mesure. 

Love Lies Bleeding, Rose Glass 

Notre déception n’est-elle que le résultat d’un plan marketing efficace ? Pas tout à fait. Oui, on s’attendait à voir une histoire d’amour torride sous stéroïdes entre Lou (Kristen Stewart) employée d’une salle de boxe, et Jackie (Katie O’Brian) une culturiste ambitieuse dans les années 80 aux États-Unis. Oui au final, on a vu à peine 5 minutes de sexe lesbien complètement survendues au milieu d’un déluge de violences, patriarcales ET conjugales. Mais surtout, Love lies bleeding laisse un sentiment de gâchis. Les bons ingrédients (casting, photo et bande-son) étaient réunis et il y a par moments des mélanges de registres intéressants. Mais le gore ne parvient pas à divertir de l’écriture grossière des personnages et leur dynamique toxique. Les daddy issues de Lou (et sa lâcheté) prennent toute la place quand le personnage de Jackie finit par être réduit à l’état de simple monstre. Bonjour les clichés. Encore un clou dans le cercueil « des représentations LGBTQ+ inédites » dont on devrait se réjouir par principe.

Pauvres Créatures – Yorgos Lanthimos 

L’interprétation époustouflante d’Emma Stone ne suffit pas à sauver Pauvres créatures. Les nombreuses récompenses que le film a raflées non plus. Les fans de Yórgos Lánthimos retrouveront la débauche d’effets visuels caractéristique de son cinéma, mais la malice de ses premiers films en moins. La créature principale de ce film, c’est Bella : un cerveau de nouveau-né dans un corps de jeune femme. Pendant deux très longues heures, on assiste à sa fuite avec un avocat libidineux, puis son éveil et son apprentissage – purement sexuels évidemment. Le réalisateur tout-puissant fait d’Emma Stone sa marionnette, et le film qui se voulait sulfureux et féministe s’avère en réalité prétentieux et affligeant. 

Eat the night – Poggi & Vinel 

Un film qui bouffe à tous les râteliers du cool, ambiance La Horde et Balenciaga, pourtant basé sur une idée géniale : le deuil de la fin d’un jeu vidéo en ligne à la World of Warcraft grâce auquel une sœur et un frère ont appris à s’aimer et à communiquer. Bien que certaines scènes de jeu vidéo soient très réussies, la relation frère-soeur est délaissée au profit d’une romance homosexuelle sur fond de trafic de taz et de rivalité de gang sans intérêt. Le tout dans une campagne périurbaine qu’on montre bien pourrie tout en fétichisant ces éloignés du cool dont on ne veut garder que l’esthétique TN/jogging (mais surtout pas l’accent!) façon mauvais porno gay (on imagine qu’il fallait jouer la carte “territoire et ruralité” à la commission CNC pour les financements). Le faux auteurisme habite chacun des plans, du travail du son (pourquoi tout sonne vide et étouffé ?) aux scènes de sexe malaisantes, Eat The Night est un film complétement statique et creux où l’ennui nous mange des les premiers plans. 

Le Deuxième Acte – Quentin Dupieux

Il fut un temps où Quentin Dupieux était un cinéaste underground, faiseur habile de comédies burlesques et méta. Qu’on les apprécie ou non, Steak, Rubber ou plus récemment Le Daim sont des propositions de cinéma originales, où dialogues surréalistes et images léchées entrent en collision pour créer de l’humour, et ce sentiment d’étrangeté que Dupieux développe depuis son premier film, le bien nommé Nonfilm. Si Dupieux a toujours la présence d’esprit de faire des films courts, rarement dans l’histoire du cinéma des films aussi courts que Daaaaaali! Et Le Deuxième Acte auront semblé aussi longs. L’humour de petit malin était probablement moins gênant quand les films étaient fauchés, et qu’on y retrouvait pas les stars bankables du moment. Si l’on reconnaîtra qu’il arrive de tourner en rond, de se répéter et de manquer d’inspiration, on a du mal à voir qui force Quentin Dupieux a nous infliger deux films par an. Et en même temps si ça marche, pourquoi devrait-il se priver ? Peut-être enfin devrions-nous le boycotter, mais en même temps s’il devait refaire un bon film nous nous retrouverions alors à le rater?

Vaina 2 – Dana Ledoux Miller, Jason Hand, David Derrick Jr.

Cumulant à ce jour plus de 8 millions d’entrées sur le seul territoire français, Vaiana 2 est une improbable réussite. Improbable oui, car au départ ce film n’en était pas un. Pensé, écrit et même réalisé pour être une série pour la plateforme Disney+, c’est probablement une étude de marché qui a fait comprendre aux studios qu’ils avaient bien plus à gagner en remontant la série pour en faire un film exploitable en salles. On se retrouve alors avec une piètre suite mollement animée et aussi vite vue qu’elle sera oubliée. En espérant que les grands studios n’oublieront pas que malgré les plateformes, les suites de suites et autres doublages par intelligence artificielle, les enfants comme les plus grands méritent des films à la hauteur de leur imaginaire. 


Rédacteurices : Benjamin Delaveau, Louise Malherbe, Samy André Ali, Léane Alestre, Anne-Charlotte Michaut, Apolline Bazin

Image à la Une : Les Reines du drame, Alexis Langlois

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