La post-club music émerge de la liste des nouvelles étiquettes de genre apposées souvent compulsivement. Mais alors qu’est-ce que c’est exactement ? Le deuxième nom de la post-club est plus explicite : la deconstructed club music s’ancre dans une tendance intellectuelle contemporaine de remise en question des idées et des rythmes.
Sorte d’amplification exagérée de styles comme la trap, le grime ou le ball room, marquée par un héritage industriel et porteuse d’un concept théorique fort voire de thèmes politiques qui nuancent son résultat de teintes agressives, apocalyptiques, apathiques ou carrément euphorisées. Le courant s’est structuré au début de la décennie en assemblant à l’infini les différents traits de personnalité et préoccupations de la génération qui l’a modelé. Après une naissance à Brooklyn notamment chez Fade To Mind suivie très vite d’une exportation européenne au club Janus à Berlin ou chez Night Slugs, la Java semble ambitionner de se poser comme le phare français sur la carte de la musique dé-formatée.
Si la déconstruction évoque plutôt l’analyse de grands concepts et des apéros houleusement politisés, elle s’applique bien à la musique électroniques et aux dancefloors endiablés. Plus rarement, cette tendance peut aussi être désignée par l’appellation Club Not Club. La musique post-club se débarrasse des codes et barrières rigides qui ont aussi effet dans toutes les variations de l’EDM. Elle s’autorise à les redéfinir à sa guise, à se débarrasser d’un rythme 4/4 automatisé, à fusionner à coups de percussions avec à peu près tout ce qu’on pourrait avoir envie de l’associer.
La dimension politique est omniprésente mais aux déclinaisons multiples, se justifie par les racines qu’elle prend dans une décennie qui ne laisse plus le choix du déni ou de la neutralité. La Post-Club défait autant les cloisons des normes musicales qui l’oppressent que celles des normes sociétales et sociales qui agissent de la même façon sur ces acteurs et consommateurs. Elle s’inspire et sert à la fois les causes féministes, queers et anti-racistes, s’appuie sur les questions de genres et de décolonisation, se tourne vers le numérique, le futur ou l’écologie.
A Paris, la programmation du club bellevillois se tourne vers le genre en dénichant les noms qui feront suite aux références Arca, Lotic, Sophie, Yves Tumor ou le bien-nommé Total Freedom. A commencer par la Temporisation de vendredi 26 avril, portée par Petit Singe, à la croisée des genres, qui réussit la prouesse de mêler sans fausses notes dub, pop, tribal, expérimental et autant d’autres combinaisons inédites qu’elle manie sans pareil. Surélevée par la trap- iste canadienne Brat Star, Sene le sculpteur de son et la fournisseuse de bruits de la passion Rahim, la soirée vous offre une bonne introduction à la déconstruction des archétypes du clubbing.
Le digging post-clubiste de la Java se poursuivra, avec une nouvelle édition des soirées Professeur Promesses : lancées par un duo de DJ, le label « thermomètre de la scène club du XXI siècle» comptera parmi ses invité.es un certain Mad Rey.
Le dernier rendez-vous en date pour rattraper son retard en post-clubbing sera chaperonné par le magazine Couvre x Chefs dédié (ça tombe bien) à la musique club émergente. Avec toujours plus de valeurs sûres du futur comme le label de référence latine NAAFI, Bob Sleigh ou le producteur mexicain Zutzut, autres héritiers de cette lignée d’artistes élevés dans la soundcloudosphère, laboratoire de leurs injections expérimentales de trap et reaggaton dans le noyau de la club traditionnelle.