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 Call me by your name. Ancora l’amore?

 Call me by your name. Ancora l’amore?

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Petit bijou, Call Me By Your Name est enfin en salles. Entre exaltation du désir et premier amour, la magie opère si tant est qu’on laisse son cynisme à la caisse du cinéma.

Classic with a twist

À l’heure où Hollywood récuse les standards de films romantiques pour proposer des love stories aussi originales (The Shape Of Water) que modernes (The Big Sick), Call Me By Your Name peut paraître un peu convenu.

Adapté du roman culte d’André Aciman, la prémisse du film ne promet rien d’extraordinaire : Eté 1983, dans une maison familiale du Nord de l’Italie, Elio (Timothée Chalamet), 17 ans, tombe sous le charme d’Oliver (Armie Hammer), 24 ans, un universitaire américain en résidence pour l’été dans sa villa. C’est tout. Basta. A priori, on a déjà vu ce film. Sous un autre nom, dans une autre langue, avec d’autres personnages. Que nenni.

Call Me By Your Name s’intéresse moins au factuel, à l’intrigue, qu’à l’être humain et à ses sentiments. Esthétiquement parfait, Luca Guadagnino ne filme pas seulement l’idylle de deux hommes blancs et bourgeois mais la naissance du désir et les difficultés qui l’accompagnent.

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Premiers baisers

Dernier volet d’une trilogie sur le désir, entamée avec l’excellent Amore et poursuivie avec A Bigger Splash (remake dispensable de La Piscine),  Call Me By Your Name aborde la naissance de celui-ci.

Elio, dix-sept ans, est un petit génie, un érudit. Il sait tout faire mais admet volontiers qu’il « ne connaît rien » – surtout pas le désir. Puis un jour il est là, il arrive avec Oliver, l’américain parasite à qui il doit céder sa chambre. Un après-midi, lors d’une partie de volley, Oliver a un geste pour Elio. Ce n’est presque rien mais c’est déjà suffisant. Le désir, feu sauvage, est en lui.

Sentiment mystérieux et personnel, le film rappelle que le désir naît à un âge égoïste, à un moment où l’on se fiche de se construire sans épargner ceux qui nous entourent. Comme tous les ados, Elio est guidé par ce désir. Intelligent et instinctif, il comprend l’intérêt de l’assouvir, moins pour le partager que pour y trouver plaisir et jouissance. En attendant d’avoir Oliver, il se fait la main. Une femme, une pêche, tout pour lui devient instrument de plaisir.

Sans le savoir, Oliver a amené le désir avec lui. Et celui-ci se diffuse, comme en orbite autour de lui. Il se réveille chez Elio mais aussi chez les personnages féminins : Marzia (Esther Garrel) et Chiara (Victoire du Bois). Bien que leur quête soit identique, elles ne trouvent pas la même chose qu’Elio. Par là, le film souligne l’aspect injuste du désir. Peu égaux devant celui-ci, nous sommes tour à tour du côté de ceux qui jouissent et de ceux qui souffrent. Bien souvent, on est même plutôt du côté des derniers.

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Le temps de l’amour

Non content de découvrir le désir et le plaisir, Elio expérimente aussi l’amour. Pas une scène ne se passe sans que l’on ne saisisse un mouvement qui atteste de l’amour fou qui dévore le jeune homme. Elio aime Oliver et Oliver l’aime aussi. Spoiler alert, il leur faut plus d’une heure pour se l’avouer. Pas d’effusion, de déclaration, juste quelques mots (« call me by your name and I’ll call you by mine »). À les entendre on sourit, les mots d’amour des autres font un effet étrange, et on sent comme une frustration de ne pas faire partie de leur histoire.

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Leur amour est sauvage. Tantôt Elio est heureux avec Oliver, tantôt il ne l’est plus. Il l’aime mais se sent malmené. Incapable peut-être de se détacher de la représentation qu’il a de lui, il semble réduit à le subir, à attendre dans sa propre maison un geste ou une parole qui lui soit destiné. De plus, cet amour n’existe que dans un espace et un temps défini : Crema, la piscine, la chambre d’Elio. Une fois l’américain reparti, l’été fini, l’amour n’est plus. Avant de rencontrer Oliver, Elio ne savait pas que la vie était étrange. Ce qu’elle apporte, elle le reprend. L’amour, le premier surtout, ne dure qu’un temps bref.

En définitive Call Me By Your Name est un film qui file mais ne s’achève pas. Quand le générique de fin commence, il s’ouvre un peu plus au monde. Dans une scène où s’entremêlent la mélancolie juvénile et le chagrin d’un jeune adulte, Elio glisse vers le monde réel. Il s’échappe et le spectateur reprend sa vie, la gorge un peu serrée.
Une telle histoire n’est donc pas si banale, difficile même de s’en détacher. Car Call Me By Your Name est un film unique qui nécessite un moment d’absorption. Longtemps on reste bousculé par cette aventure, ce temps suspendu, cette atmosphère qui rassure autant qu’elle trouble et ces personnages en prise avec leur propre développement. Tous nous préoccupent mais c’est Elio qui nous marque le plus. On pensera à lui souvent, on se demandera ce qu’il devient, comment il va, mais surtout on voudra savoir si, avec le temps, il s’est accommodé de la singularité du désir et s’il s’est fait au choc de l’amour.
Si c’est le cas, qu’il nous appelle par son nom pour nous donner quelques éléments de réponse.

 

Arthur Banier

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