Le duo Bitter Moon présente son premier long-format : The World Above, sur le label La Suisse Primitive. Séjour en orbite dans une bande-son cinématographique ambient pour une exploration sonore atmosphérique plus harmonieuse qu’amère.
L’été 2020 marque un tournant historique dans la conquête spatiale avec le début de l’exploration et de l’exploitation de la planète Mars par trois États. La sonde émiratie Mars Hope va examiner l’atmosphère de la planète Rouge, Tianwen-1 étudiera sa géologie pour la Chine, la Nasa compte pour sa part sur la réussite de la première étape de Mars Sample Return afin de ramener sur Terre des échantillons de sol du cratère Jezero. Alors que les dispositifs sont déjà à plusieurs kilomètres au-dessus de notre planète, Réka Csiszér et Simon Bernardoni (Bitter Moon), planent eux-aussi en orbite avec leur premier album The World Above, parfaite bande-son pour un détour au plus près des astres.
Pour décrire cet opus, leur label, La Suisse Primitive, qualifie volontiers ces neuf morceaux captivants d’ « audio-cinema », mais pas seulement puisqu’ils illustreraient sans complexe la bande originale d’une œuvre cinématographique. Ces plages sonores sont sans conteste inspirées des bandes originales des films de l’âge d’or du Nouveau cinéma allemand. L’album est caractérisé par sa dimension qui prête à voyager à travers une palette sonore aux échantillons rétro-futuristes oniriques, sur lesquels une voix lancinante, parfois susurrante, vient contraster, en anglais ou en allemand – à l’instar de « Kontaktseinheit » –, l’univers glacial du chant robotique des machines. « Images », « Formlos » et « Gloria » sont les seules véritables chansons de cette création sonore en majeure partie instrumentale.
Des germanophones coincés dans l’espace
Rétrospectivement, la musique allemande des années 1970 a particulièrement innovée et inspirée les musiciens Britanniques à travers le Krautrock. Même si ces groupes n’ont pas tous une identité sonore commune, leur utilisation des synthétiseurs marque une recherche dans l’expérimentation qui se détachait de celle du rock psychédélique anglo-saxon et qui influença par la suite les genres post-punk, synth-pop et toute la synth-wave, mais également l’émergence des musiques électroniques. Aussi désigné par le terme kosmische musik, ces compositions pouvaient être de réels voyages sonores cosmiques où les nappes de synthétiseurs façonnent des paysages futuristes et des soundscapes interstellaires.
Le duo suisse Bitter Moon pique dans la même veine pour modeler des textures et ambiances sonores finalement pas si lointaines de celles créées par Tangerine Dream, Ash Ra Temple, Cluster, Harmonia, Wolfgang Riechmann, etc. Est-ce un hasard si l’album a été masterisé par l’ingénieur du son londonien, Simon Heyworth, qui a compté parmi sa clientèle Brian Eno, King Crimson ou encore … Tangerine Dream ? Sûrement pas, The World Above gravite dans l’ambient, inspiré par la galaxie kosmische et par les expérimentations d’Eno.
Dutch’s psychedelic touch
Composé dans leur jardin secret des Alpes lépontines (situé entre la Suisse et l’Italie), l’album a ensuite été enregistré sur les collines de Lisbonne dans le studio du multi-instrumentiste Jacco Gardner. Reconnu pour sa musique psychédélique, le producteur néerlandais était un choix des plus judicieux pour accentuer la dimension onirique de la production. C’est à l’un de ses compatriotes et fidèle collègue, Nic Mauskovic, batteur du groupe Altın Gün, qu’a été confié toutes les parties de percussions. Les deux musiciens généralement habitués des scènes rock ont apporté leur touche pour un résultat qui envoie l’auditeur graviter loin de la monotonie terrestre.
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Photo en une : © Ronny Hunger