Joanna pointe du doigt le viol avec « Pétasse », nouveau clip qui résonne avec l’urgence des agressions faites aux femmes. Plongée dans la psyché de l’agresseur, elle démonte l’autojustification sexiste et patriarcale qui pousse les violeurs à agir. Une manière de transcender l’agression qu’elle a elle-même subie.
Légèrement grave, la voix monte, posée, calme. Cette voix, c’est celle de Joanna. Révélée l’an dernier avec « Séduction », la chanteuse sort aujourd’hui « Pétasse », avant un EP début 2020. Dans ce nouveau titre clippé, la jeune femme raconte le viol qu’elle a vécu… en prenant le point de vue de son agresseur. Détour stylistique fort, trop malheureusement nécessaire, pour faire comprendre à certains hommes l’impunité tacite qui les pousse à agresser et/ou à violer.
Je veux montrer la violence d’un acte malheureusement banal dans nos sociétés, où tout est fait pour faire culpabiliser les victimes. Ce n’est pas parce que l’on est sympa avec un homme qu’on lui appartient. Ce n’est pas parce qu’on est souriante ou avenante avec un homme qu’il peut disposer de notre corps.
Joanna
Une chambre, un lit, des bouts de verre au sol. Le refus d’une femme. Et c’est un énième viol qui vient de commencer. La faute à qui ? Certainement pas celle de l’homme, pourtant véritable agresseur. La seule responsable, c’est la femme : cette pétasse qui aguiche, qui cherche, qui montre « qu’elle le veut bien ». Des mots durs, toujours faux, et qui constituent pourtant le fond même du discours de défense des agresseurs.
Un discours d’agresseur
Un discours nourri par un patriarcat millénaire et un sexisme féroce, et que Joanna tente ici de mettre en pièces – avec succès. Agressée elle-même, la jeune femme apporte ainsi sa pierre à l’édifice du combat pour les femmes… sur un terrain, certes symbolique, mais ô combien important, dans la mesure où il infuse dans les mentalités et les comportements : la musique.
Nous avons besoin d’être considérées, respectées, protégées. On ne veut plus avoir peur de rester seule ou de rentrer tard la nuit, on ne veut plus craindre les hommes, on ne veut plus vivre avec ces trauma et cette charge mentale totalement injuste. On est fatiguées d’être constamment testées, dominées, d’éprouver du ressentiment. On en a marre de se taire.
Joanna
Au 3 décembre, 139 femmes étaient mortes assassinées par leur conjoint ou leur ex-conjoint depuis le début de l’année, d’après le collectif Nous Toutes. Une manière de nous rappeler que le combat doit avoir lieu sur tous les fronts et dans tous les domaines. Et que la musique elle aussi peut être (et doit être) politique.
Article : Bryan Ferreira