1er Septembre. L’été bientôt se fane, emporte avec lui voyages, piscines d’eau parfois, et le Paris désert des plus infortunés. Entre apéros juilletistes et open airs, pétanque-pastis et festivals aoutiens, les plus chanceux d’entre vous n’auront pas ménagé leurs efforts hépatiques. Les occasions de boire s’étioleront-elles face au labeur retrouvé ? Que nenni !
L’automne approche, et avec lui l’art contemporain reprend ses droits, ses vernissages et ses foires. Autant de prétextes à ne pas lever le pied, à défaut du coude. Parmi ces occasions multiples de voir de l’art, ou de faire semblant, de rencontrer, du moins, ceux qui font les arts visuels émergents, à plus forte raison de trinquer avec eux, Manifesto XXI en a sélectionné 5 ce mois-ci, et espère que vous viendrez y croiser ses rédacteurs. Retour aux affaires coulantes.
Exposition plagiste : Marée Basse
Samedi 8 Septembre – 15:00 – Plage de Trouville, 14360 Trouville
Qu’est-ce donc ?
Le prétexte à une villégiature tardive : Marée Basse réquisitionne la plage de Trouville, le temps d’une après-midi que l’on espère ensoleillée. Et y installe une belle palanquée d’artistes, souvent jeunes et talentueux. Le projet de Kirill Ukolov, dont la direction artistique est assurée par Sylvia Varagne, sera un festival d’art à même le sable, qui mêlera installations, performances, conférences et concerts dans des cabines de plage. Une initiative louable, à la genèse troublée, l’opposition socialiste ayant regretté un manque de rigueur chez certains intervenants. Morceau choisi du débat municipal :
« Vous avez dit qu’une bouteille serait jetée à la mer par l’un des artistes, à 18 h, au plus bas de la marée. Mais, le samedi 8 septembre, c’est à 17 h 38 que la marée sera la plus basse et non à 18 h. »
Fluctuat nec mergitur.
Une bonne raison d’y aller ?
Pour le côté Palais-de-Tokyo-sur-mer du festival, qui déménage une bonne partie des jeunes artistes vus en ces murs l’an passé (Alexandre Bavard, Emile Degorce-Dumas, Vincent Voillat, Elsa Lefèvre…). Pour l’audacieuse délocalisation Bagnolet-Trouville du ballet chamanique de Pierre Gaignard, résident du Wonder/Liebert. Enfin, pour l’intrépide programmation d’Emma Daumas, concert à la hauteur des nostalgies les moins avouables.
Quotient Pique-Assiette : 5%
Comme le prix du pastis au Casino Barrière limitrophe. Et le pourcentage du billet aller-retour que vous pourrez régler après vos folies estivales.
Portes ouvertes : DOC !
Samedi 8 Septembre – 14:00 – 26, rue du Docteur Potain, 75019 Paris
Qu’est-ce donc ?
Modèle de squat, offrant des conditions de création exemplaires à de jeunes artistes depuis 3 ans maintenant, le DOC fait sa rentrée en ouvrant, le temps d’une après-midi, les portes de ses nombreux ateliers. Au programme, pas vraiment de programme encore, mais sont annoncés expositions, concerts, projections, repas, comme autant d’occasions d’explorer les recoins de l’ancien lycée. Par delà ces pléthoriques sollicitations, on vous recommandera surtout d’aller échanger avec les résidents du lieu, qui ont beaucoup à dire, tant sur leurs pratiques individuelles de création, que le modèle collectif de gouvernance de vigueur ici, passionnant spécimen de décisions collégiales.
Une bonne raison d’y aller ?
Une belle occasion de découvrir le lieu, pour les retardataires qui ignoraient jusqu’ici l’existence de la station Télégraphe, d’y lancer la nouvelle saison pour les plus avertis. Et de comprendre un peu mieux le fonctionnement d’un des squats artistiques les plus notables de l’est parisien.
Quotient Pique-Assiette : 33%
L’alternatif n’a certes pas l’habitude des buffets gratuits, mais sert toujours généreusement et à bas coût.
Festival : Jerk Off 2018
Mercredi 12 au Samedi 22 Septembre – En moult lieux parisiens
Qu’est-ce donc ?
11ème occurence pour le festival Jerk off, qui se veut un « panorama d’écritures scéniques alternatives aux codes hétéro-normés dominants ». Ambition vaste et belle, à la hauteur d’une programmation exigeante, pluridisciplinaire, qui mêlera pratiques chorégraphiques, théâtrales, performatives, et expositions. Malgré sa – relative – confidentialité, Jerk Off jouit d’une estime forte, tant auprès de la scène artistique que des milieux institutionnels, qui lui permet d’offrir des conditions de visibilités à ces formes multiples d’écriture queer dans un grand nombre de lieux culturels parisiens (Carreau du Temple, FGO-Barbara, Point Ephémère, DOC !, Shuttle 19), ces 10 jours durant.
Une bonne raison d’y aller ?
Parce que Jerk Off compte bien faire la part belle à la jeune création cette année, raison supplémentaire, s’il en faut, pour suivre avec attention le festival. Côté expositions, deux propositions aux titres évocateurs attisent notre curiosité.
To Michael de Sasha Pevak, jeune commissaire russe, au DOC !. Gerontophilia Statement, du duo Azad Asifovich & Jérôme Nivet-Carvon, au Point Ephémère. Si la programmation demeure encore énigmatique, elle semble vouloir faire la part belle à l’amour, les onduleuses nuances qui l’animent, lorsque l’on parvient à en percevoir les nuances par delà des représentations parfois trop binaires.
Quotient Pique-Assiette : 10%
Rien ne vous empêche d’aller taxer sans vergogne quelques vernissages non-inclusifs du Marais, en préliminaires de vos visites à Jerk Off.
Vernissage : L’envers d’une autre
Jeudi 13 Septembre – 18:00 – Villa Belleville – 22 Rue Ramponneau, 75020 Paris
Qu’est-ce donc ?
L’inattentif scrolleur des blogosphères devra s’y prendre à deux fois afin de saisir l’essence de cette exposition collective intrigante et conceptuelle. Résumé maladroit : 17 artistes sont invités à produire des œuvres émanant des souvenirs, glanés par divers canaux numériques et in situ, d’une précédente exposition, présentée l’automne dernier, Quand les attitudes deviennent informes. Ces fragments textuels, singulier matériau de création, seront disséminés à travers les cimaises de Villa Belleville, et les visiteurs conviés à les manipuler et réagencer, donnant au projet une dimension participative.
Une bonne raison d’y aller ?
Cérébrale – voire capilotractée pour les plus revêches – L’envers d’une autre devrait au moins constituer une expérience d’exposition originale. Si l’on ne garantit pas un Grand Chelem de satisfecit auprès de vos amis fana d’Artistes et Robots au Grand Palais, cette exposition vous changera, à tout le moins, de l’usité ritournelle de ses consoeurs collectives aux thématiques galvaudés.
Quotient Pique-Assiette : 45%
Au contraire de celui du mètre carré dans les environs, le cours de la bière stagne – aux alentours de l’unité – à la Villa Belleville.
Evenement : La Nouvelle Adresse du CNAP
Samedi 15 et Dimanche 16 Septembre – 12:00 – 81 Rue Cartier-Bresson, 93500 Pantin
Qu’est-ce donc ?
Le Centre National des Arts Plastiques quittera en 2022 ses (très) austères bureaux de La Défense en 2022, et propose à cette occasion une bien précoce crémaillère. Sis non loin du cimetière de Pantin, le nouvel écrin du CNAP sera un entrepôt de près de 25 000 mètres carrés, qui accueillera ce mois, en préambule de l’ouverture à venir, une abondante programmation artistique et festive. Passée une soirée clubbing le vendredi – qui a le mérite de proposer un plateau intégralement féminin, et le mérite plus grand encore de ne pas mentionner ce fait – la nouvelle adresse proposera le weekend entier une programmation assez foisonnante, faisant la part belle aux hybrides volatiles que sont « conférences performées », « installations in situ » ou encore « performances sonores ». Un inventaire de néologismes qui ne devrait pas gâcher le plaisir de la découverte.
Une bonne raison d’y aller ?
Pour cuver sans déshonneur la soirée clubbing de la veille, en déambulant au milieu des dizaines d’oeuvres, performances et films au programme durant ces journées.
Quotient Pique-Assiette : 25%
A la folie – établissement parisien qu’on ne qualifiera pas tout à fait de bon marché – sera en charge de la buvette. Mais on pourra recommander aux assoiffés nécessiteux – ingrats, peut-être – quelques PMU de bon aloi dans les environs.