Trump président : la grande régression

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« On pensait se réveiller avec la première femme présidente des USA ; on se réveille avec le premier qui l’attrape par la chatte », tweete Charline Vanhoenacker ce 9 novembre 2016 à 9h40. Même l’humoriste star de France Inter rit jaune et aura du mal à nous arracher un sourire ce matin. Dans le monde entier l’émotion est immense, un point de non-retour semble être atteint dans la décadence politique globale. Et ce n’est qu’un début.

Make America Great Again : la défaite de la raison

Trump-HSCourrierINternational-manifesto2115% de chances que Donald Trump devienne président, c’étaient les pronostics du New York Times. L’espoir était donc permis, de loin. Enfin espoir, c’était déjà un bien grand mot. Le soutien apporté à Hillary Clinton était plus porté par la raison que par la conviction. Même en tentant de capitaliser sur la popularité de son rival Bernie Sanders et sur le soutien du couple Obama, Clinton n’a pas su convaincre. Cette élection nous rappelle cruellement que les USA ne sont pas (plus) cette force immuable et sûre d’elle. Courrier international titrait dans son avant-dernier hors-série : « que reste-t-il de la puissance américaine ? » Cette puissance questionnée militairement et économiquement laisse les États-Unis face à ses démons internes non résolus, dont le racisme qui reste une des questions lancinantes que les deux mandats d’Obama n’ont pas pu résoudre. Cette victoire, c’est la défaite du calcul qui aurait voulu que les Américains détestent assez Trump pour voter Hillary. Or, face à une vision du monde si nauséabonde soit-elle, une vision inexistante ne peut plus rien.

Le triomphe des identités malheureuses

Le politiquement correct est officiellement mort et enterré avec cette campagne-spectacle – pour le pire plus que pour le meilleur. Tout n’a été que caricature, Donald Trump est lui-même une caricature. Sans faire trop de généralités sur l’électorat du candidat républicain, cette victoire est en partie compréhensible comme un sursaut de l’Amérique blanche, comme l’a expliqué Michael Moore qui avait prédit cette victoire. Même la plus grande puissance mondiale dont on répète que l’histoire est bâtie sur l’immigration et le melting-pot se raidit. La victoire de Trump est d’autant plus écœurante qu’elle apparaît comme la cerise sur le gâteau mondial réac’. Poutine en Russie, Erdogan en Turquie, Orbán en Hongrie, Johnson au Royaume-Uni, et dernièrement Duterte aux Philippines… Le progressisme et l’humanisme ont mauvais temps face à un cocktail détonnant de démagogie, de testostérone et de tradition. C’est un grand paradoxe de constater que le monde apparaît de plus en plus connecté et ouvert à bien des égards alors qu’en même temps, une autre partie de lui se crispe et refuse l’altérité. Cette fracture est une tendance de fond globale, et la pensée qui voudrait que nous soyons tous « citizens of the world » accuse un sévère coup aujourd’hui.

Politic is not dead

Très tôt les charognards de tout poil se sont précipités sur la carcasse américaine pour célébrer cette victoire du Peuple. Le « Peuple », avec un grand P. Ce grand mot fourre-tout qui résume à lui seul la pauvreté de la pensée politique en ce début de XXIe siècle. Déjà le FN et consorts se frottent les mains en coulisse. Outre une incertitude déjà palpable dans les relations internationales, le plus grand dommage de cette élection sera probablement la désinhibition des extrémistes en Europe.

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L’actu en patates, Martin Vidberg. Blog Le Monde

Une chose est certaine néanmoins : nous avons vibré pour cette campagne américaine, et il est frappant que nous ayons été touchés par celle-ci plus que nous ne l’avons été par notre politique intérieure depuis longtemps. Souvenons-nous que la démocratie est le pire régime à l’exception de tous les autres (RIP Churchill). Cette élection nous prouve que rien n’est jamais acquis et que nous serions les seuls coupables de la défaite des idées. La fin de l’Histoire n’est pas advenue, et la bataille ne fait que commencer.

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