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2017 au cinéma : le bilan (consterné) en affiches

2017 au cinéma : le bilan (consterné) en affiches

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Contrairement aux films, nous ne pouvons pas échapper aux affiches placardées à chaque coin de rue. Celles-ci nous en disent plus qu’on ne le pense sur le contenu du film dont elles font la promotion. Leur décryptage permet de mieux comprendre les représentations et les tendances qui traversent le cinéma et la société. Dans le cas des affiches de films à succès, les moyens promotionnels engagés permettent un large investissement de l’espace public : le message politique véhiculé n’en devient alors que plus fort. À cette occasion, nous vous proposons un petit tour d’horizon des dix films ayant le plus impacté le box-office français en 2017.

1) Moi, moche et méchant 3 (Kyle Balda, Pierre Coffin) – 5,6 millions d’entrées

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Moi, Moche et Méchant 3 © Illumination Entertainment

Dans Moi, moche et méchant 3, Gru, le héros (ou plutôt, antihéros) fait la connaissance de Dru, son frère jumeau dont il ignorait l’existence. Nos deux comparses, que l’on peut voir mis face à face sur l’affiche, décident de devenir partenaires de crime, donnant ainsi à Gru l’occasion de reprendre ses activités de super-vilain qu’il avait abandonnées au profit de sa vie familiale.

L’affiche de Moi, moche et méchant 3 ne paraît problématique que si on la replace dans le contexte de l’évolution narrative de la franchise. Le premier opus nous présentait Gru comme un méchant classique, mais qui finissait par s’attendrir au contact de ses filles adoptives. On y retrouvait d’une part la représentation d’une famille monoparentale et, d’autre part, l’adoucissement du personnage principal, sans que ces deux aspects ne soient jamais moqués ou décrédibilisés. Bref, c’était bien. De façon tout à fait décevante, le deuxième épisode ne prolongeait pas ces qualités : on pouvait y assister à l’arrivée d’une « maman » au sein du foyer de Gru, dont la production s’acharnait à nous faire comprendre la nécessité de la présence – en même temps, un homme seul ne saurait tenir une maisonnée, cela va de soi. Pour compléter le package, on avait également le droit à un Gru reprenant possession de sa virilité en harcelant le petit copain d’une de ses filles ainsi qu’à une bonne tartine de slutshaming au travers de certains personnages secondaires. L’affiche de Moi, moche et méchant 3, représentant Gru face à son frère, fait donc craindre une persévérance dans cette lignée, avec la reprise de poncifs vus et revus au cinéma (rivalité entre frères, héros incité à reprendre des activités plus risquées pour échapper à l’ennui de la sphère familiale, etc.).

2) Raid Dingue (Dany Boon) – 4,5 millions d’entrées

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Raid Dingue © Pathé

Il suffit de jeter un coup d’œil au résumé de Raid Dingue pour comprendre que le film risque d’être furieusement nauséabond : Johanna (Alice Pol), jeune policière de son état, rêve d’intégrer le RAID. Gênante et maladroite (c’est une femme), elle échoue à l’examen d’entrée. Son père, le ministre de l’Intérieur Jacques Pascali, finit par la pistonner pour lui permettre d’intégrer l’unité d’élite. Placée sous la responsabilité de l’agent Eugène Froussard (Dany Boon), qui voit d’un très mauvais œil la présence d’une femme au sein du RAID, Johanna n’arrange pas son cas en enchaînant les gaffes. Au début agacé, Eugène finit par succomber à sa « fraîcheur » et tombe amoureux d’elle. Malgré l’avalanche de remarques sexistes et dégradantes qu’il lui a balancées tout au long du film, Johanna s’en trouve très heureuse et décide, bien entendu, de lui rendre ses sentiments. Finalement, au lieu d’utiliser la situation initiale pour tourner le sexisme en dérision et donner un rôle positif à son héroïne, Dany Boon fait exactement l’inverse : le comportement sexiste d’Eugène est légitimé puisque, de toute façon, Johanna est nulle et a obtenu sa place en se faisant pistonner (la seule manière pour une femme de réussir, avec le sexe). On aboutit ainsi à une succession de gags grotesques et misogynes de 106 (longues) minutes.

L’affiche présage du contenu de Raid Dingue : on peut y voir un Dany Boon en tenue d’intervention pointer du doigt sa nouvelle collègue, mi-surpris, mi-circonspect. À ses côtés, nous retrouvons une Alice Pol allègrement photoshoppée qui est, oh mon Dieu, une FEMME ! Tous les signaux sont allumés pour nous le rappeler avec la subtilité d’une pierre ponce : elle adopte une posture typiquement féminine, bras croisés en-dessous de la poitrine et hanche relevée. Contrairement à ses collègues masculins qui l’entourent, elle n’est pas vêtue de sa tenue d’intervention, mais d’un débardeur moulant qui laisse entrevoir la naissance de sa poitrine. On notera également qu’elle n’a pas omis de s’appliquer du blush et du rouge à lèvres avant de venir travailler. Tout, dans cette affiche, la ramène donc à sa féminité et au caractère incongru de sa présence dans un milieu aussi masculin que le RAID. Heureusement qu’elle a une arme entre les mains, sinon on se demanderait presque ce qu’elle fait là.

3) Valérian et la Cité des mille planètes (Luc Besson) – 4 millions d’entrées

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Valérian et la Cité des 1000 planètes © EuropaCorp

Valérian, film le plus cher de l’histoire du cinéma français et bouillie d’effets numériques de son état, présente un problème majeur dès son titre – ce qui, on le concédera, est tout de même très fort. L’adaptation de la bande-dessinée culte Valérian et Laureline de Christin et Mézières semble effectivement avoir oublié l’existence de l’un de ses deux personnages principaux dans son intitulé. C’est (un peu) dommage, mais laissons à la production le bénéfice du doute. Peut-être cela prenait-il trop de place sur les supports de promotion : le mystère reste entier.

Le traitement réservé au personnage de Laureline au cours du film est, sans surprise, à la limite du désastre. Initialement pro-active, partenaire indispensable à Valérian, elle restera ici quasi systématiquement cantonnée au rôle de faire-valoir/intérêt amoureux du héros. Les affiches du film ne permettent cependant pas de prédire ce défaut : Valérian et Laureline y sont représentés sur un pied d’égalité, l’air déterminé. Au regard du contenu de la production, on a donc quelque chose d’étonnamment… correct – on n’oubliera pas, cependant, de remarquer la présence d’une Rihanna hypersexualisée, à l’image du personnage qu’elle interprète dans le film.

4) Star Wars, épisode VIII : Les Derniers Jedi (Rian Johnson) – 4 millions d’entrées (en cours)

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Star Wars © Walt Disney Pictures

On peut haïr le dernier opus de Star Wars, et même créer une pétition pour le faire disparaître de la saga. On concédera néanmoins que les affiches ne sont pas si mauvaises – à l’image, d’ailleurs, de la représentation des personnages dans le film. Bien qu’on retrouve la figure stéréotypée et dominante du patriarche empli de sagesse (Luke Skywalker), une part de choix est accordée aux personnages féminins, notamment à celui de Rey. Rey est un chouette personnage féminin : elle n’est jamais sexualisée, n’est pas guidée dans ses actions par un quelconque intérêt amoureux et combat avec un sabre laser. Producteurs hollywoodiens, prenez exemple sur Rey. Merci. La lumière mise sur les personnages féminins constitue d’ailleurs l’un des atouts majeurs de cette nouvelle trilogie – malgré la place assez ridicule accordée sur l’affiche au personnage de Rose, pourtant très important dans le film.

En plus, tous les personnages ne sont pas blancs. C’est quand même beau. Non vraiment, ça fait plaisir.

5) Baby Boss (Tom McGrath) – 3,8 millions d’entrées

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Baby Boss © DreamWorks Animation

Baby Boss est le nouveau dessin animé décalé des studios Dreamworks. Tim, un enfant ordinaire et jaloux de son petit frère (Baby Boss), doit s’allier à ce dernier pour déjouer un complot qui vise leurs parents.

L’affiche de gauche ne comporte pas d’élément d’analyse particulièrement intéressant et semble avoir pour seule vocation de révéler au public la personnalité hors du commun de Baby Boss. La seconde affiche, en revanche, est un peu plus intéressante, puisqu’elle nous révèle que les deux héros évoluent au cœur d’une cellule familiale « typique » : nucléaire, blanche, américaine et hétérosexuelle. C’est bien entendu la femme qui porte le bébé, tandis que le père entoure sa famille de façon protectrice : une main chaleureuse est posée sur la tête de son fils aîné, tandis qu’un bras possessif entoure les épaules de sa femme. Histoire de bien montrer aux gamins qui regarderont le film ce que c’est qu’une famille, une vraie. Rien de très nouveau sous le soleil, donc. Pour voir des dessins animés novateurs en termes de représentation, mieux vaut rester du côté de la télévision, où de nombreux contenus plus diversifiés voient le jour (La Légende de Korra, Steven Universe…).

6) Fast and Furious 8 (F. Gary Gray) – 3,8 millions d’entrées

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Fast and Furious 8 © One Race Films

Dans ce dernier opus, Dom (Vin Diesel) est amené à trahir sa famille sous l’influence de la terroriste Cipher (Charlize Theron). Les couleurs de l’affiche, qui oscillent entre le gris et le bleu métallique, annoncent un épisode sombre. Poursuivies par un sous-marin gigantesque, les voitures s’enfuient sans pouvoir faire face, ce qui présage du niveau de difficulté inédit auquel les personnages devront faire face. En effet, les affiches des précédents Fast and Furious montraient les héros déterminés, regardant droit devant eux, laissant imaginer qu’ils exerçaient un certain contrôle sur la situation.

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Les affiches des précédents Fast and Furious © One Race Films

En ce qui concerne les personnages, ils sont séparés en deux groupes. En haut, les « méchants » (Dom et Cipher). En bas, les « gentils », menés par Luke Hobbs (Dwayne Johnson). Les deux personnages les plus mis en avant sont deux hommes blancs complètement testostéronés, qui se ressemblent d’ailleurs de manière assez troublante. Cependant, malgré son appartenance au « mauvais groupe », Dom ne paraît pas adopter une posture menaçante : au contraire, ses épaules sont légèrement affaissées et son regard est presque douloureux. On devine que c’est Cipher, qui émerge de derrière son épaule, la véritable méchante du film. Il est bien entendu prometteur de voir une femme promue au rang de principale antagoniste – encore faut-il qu’elle soit bien écrite. La bande-annonce du film laisse présager une femme froide et calculatrice, qui paraît intéressante… Jusqu’à ce qu’on la voie rouler une grosse pelle à Dom. Car la femme mauvaise est toujours une vile tentatrice, ne l’oublions pas.

On remarquera néanmoins que, du côté des gentils, bien que le « mec de la situation » soit blanc et musclé, une diversité appréciable caractérise le casting : on y dénombre deux acteurs noirs, Tyrese Gibson et Ludacris, Michelle Rodriguez, d’origine portoricaine et dominicaine, ainsi que Dwayne Johnson.

7) Pirates des Caraïbes : la vengeance de Salazar (Joachim Rønning, Espen Sandberg) – 3,6 millions d’entrées

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Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar © Walt Disney Pictures

Dommage que Disney France ait choisi de remplacer le titre original Dead Men Tell No Tales par La Vengeance de Salazar, qui en jette tout de même beaucoup moins. Hormis cela, rien de très nouveau pour ce nouvel opus qui reprend les mêmes ingrédients que les titres précédents de la saga Pirates des Caraïbes. Les affiches laissent assez facilement deviner l’articulation entre les différents personnages. Représenté en arrière-plan, Salazar (Javier Bardem) est le méchant puisque, comme tous les méchants de Pirates des Caraïbes, il est sale et en état de décomposition avancée. Jack Sparrow (Johnny Depp) et le capitaine Barbossa (Geoffrey Rush) nous toisent d’un air déterminé, probablement prêts à en découdre avec ce nouvel antagoniste.

Dans La vengeance de Salazar, deux nouveaux personnages sont introduits : Carina Smyth (Kaya Scodelario) et Henry (Brenton Thwaites). La mauvaise habitude qu’ont les films de cette franchise de n’introduire qu’un seul personnage féminin parmi leurs protagonistes principaux fera décidément toujours grincer des dents. Ces personnages féminins ne se révèlent pas nécessairement inintéressants : alors qu’Elizabeth Swan faisait preuve d’une grande force de caractère, Carina est une brillante astronaute. Cependant, étant les seules représentantes de leur genre, elles finissent inévitablement par endosser le rôle de l’intérêt amoureux – puisque, bien entendu, Carina finira par succomber au charme d’Henry. De plus, sa personnalité est construite autour du traumatisme de la perte de son père, qu’elle n’a jamais connu, ce qui, on le concèdera, est légèrement cliché.

Sur l’affiche du film, Carina est représentée dans une position très féminine, les cheveux agités par un vent qui ne semble pas toucher les autres personnages. Cependant, Henry se trouve lui aussi dans une posture qu’on pourrait qualifier de passive, son regard exprimant même une certaine inquiétude. En prenant ce détail en considération, la position de Carina paraît donc plus à mettre sur le compte de son statut de « noob » de la piraterie que sur la volonté du studio de la présenter comme une demoiselle en détresse.

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Pirates des Caraïbes © Walt Disney Pictures

La campagne de promotion de Pirates des Caraïbes comporte également un assortiment d’affiches spécifiques à chaque personnage. Sur celles-ci, un changement saute aux yeux : Henry a changé de position et paraît plus assuré que sur les autres affiches. Carina, elle, se tient toujours dans une posture passive ; la mise en valeur de son personnage nous permet cependant de mieux remarquer son décolleté généreux. Youpi.

8) Alibi.com (Philippe Lacheau) – 3,6 millions d’entrées

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Alibi.com © Fechner Films

Alibi.com est une bonne comédie bien de chez nous qui raconte l’histoire de Grégory, Augustin et Mehdi, trois amis. Ces derniers tiennent une société destinée à créer de toutes pièces des alibis pour ses clients. Les choses se gâtent quand Grégory tombe amoureux de Florence, qui met l’honnêteté au cœur d’une relation amoureuse. Ici, les deux rôles principaux féminins, interprétés par Elodie Fontan et Nathalie Baye, sont une fois de plus intégralement définis par leur lien au personnage principal masculin. L’une est la copine de ce dernier, l’autre est sa mère.

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La première affiche du film ne paraît pas poser de problème particulier. Comme d’habitude, les personnages féminins sont représentés en minorité, mais sont placés sur le même plan que leurs comparses masculins et ne sont pas sexualisés. Sur la deuxième affiche…

Tiens, où sont-elles passées ?

Et bien, ils semblent que les deux femmes d’Alibi.com ne soient pas suffisamment importantes pour mériter de figurer sur l’ensemble des affiches. Tant pis pour elles. Ici, l’affiche insiste sur le côté « buddy movie » de la production, un genre plutôt généralement adressé à la gente masculine dans lequel la femme joue principalement le rôle d’intérêt amoureux ou d’emmerdeuse (ou les deux à la fois, le plus souvent).

9) La Belle et la Bête (Bill Condon) – 3,5 millions d’entrées

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La Belle et la Bête © Walt Disney Pictures

Inutile de rappeler le pitch du célèbre dessin animé de 1991, dont la narration est quasiment reprise à l’identique par Disney pour son nouveau film. La première affiche semble avoir pour rôle de le rappeler, avec la reprise de la scène du bal et la fameuse robe jaune enfilée par Belle à cette occasion. Le message est clair : le spectateur doit s’attendre à replonger dans l’ambiance enchanteresse du film de son enfance. On notera également que, sur les deux affiches, Belle est placée dans la lumière, quand la Bête demeure dans l’ombre, amenant l’idée qu’elle est celle qui l’extirpera des ténèbres de sa malédiction.

Sur l’affiche de droite, plusieurs personnages féminins sont mis en valeur – sur les treize personnages pouvant être qualifiés d’ « importants » dans le film, cinq sont des femmes. On n’est pas encore à la parité, surtout dans un film principalement destiné aux jeunes filles, mais il y a du progrès. Malheureusement, toutes les femmes vivant dans le château de la Bête, hormis Belle, sont cantonnées aux rôles de mère (Madame Samovar) ou d’intérêt amoureux (Madame Garderobe, Plumette). Ces deux dernières sont d’ailleurs interprétées par des actrices noires, Gugu Mbatha-Raw et Audra McDonald. Dommage qu’il s’agisse de personnages plus que secondaires…

Sur cette même affiche, à gauche, on note également la présence de Lefou, gay selon l’équipe du film. Néanmoins, aucune scène ne viendra corroborer cette déclaration, laissant suggérer qu’elle relève avant tout de l’argument marketing. Lefou est un homme plutôt laid, sans qualités apparentes et frustré puisque Gaston, qu’il aime, s’est entiché d’une autre. Ah oui, car les gays tombent toujours amoureux de leur ami hétérosexuel, c’est bien connu. Etant donné le manque de représentation dont les homosexuels souffrent dans les grosses productions comme celles-ci, il paraît donc légèrement indécent de la part de Disney de nous sortir du chapeau un personnage aussi peu inspirant que celui-ci.

Soyons ouverts d’esprit, mais pas trop, donc.

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La Belle et la Bête © Walt Disney Pictures

La campagne promotionnelle de La Belle et la Bête est également assortie d’une série d’affiches à l’effigie de chaque personnage. En regardant celle de Belle, un questionnement s’impose : pourquoi est-elle représentée en princesse ? Comme sur les affiches où elle apparaît aux côtés d’autres personnages, elle apparaît vêtue de sa belle robe jaune, adoptant une posture passive, comme si elle attendait le retour d’un amant. Pourtant, au début du film, Belle est présentée comme une intellectuelle et une inventrice de génie : on la voit dévorer tous les livres lui tombant sous la main et élaborer de nouvelles machines destinées à simplifier son quotidien. Mais aucune affiche promotionnelle ne mettra en avant ces traits de caractère. C’est dommage. Pourtant, c’est Belle elle-même qui le dit dans le film : « Je ne suis pas une princesse. »

10) Tous en scène (Garth Jennings) – 3,5 millions d’entrées

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Tous en scène © Illumination Entertainment

Le dessin animé Tous en scène présente la vie d’animaux anthropomorphes : ils chantent, portent des vêtements, parlent anglais… Bref, ce sont des humains, mais avec des physiques d’animaux. Il s’agit d’un procédé usé jusqu’à la corde dans les dessins animés pour enfants et qui a pour inconvénient de faciliter une représentation stéréotypée de certaines catégories de la population. Cependant, avant de commencer à râler, je concéderai plusieurs points positifs à l’affiche. Sur les sept personnages représentés, trois sont des femmes : Meena, l’éléphante, Rosita, la truie et Ash, la porc-épique (c’est presque la parité !). De plus, tous ces animaux paraissent assez peu genrés. C’est notamment le cas de Gunther, le porc au fond à droite qui arbore une tenue de spectacle rouge et moulante. Ce personnage est intéressant car son goût pour la scène et le sensationnel ne présume pas de sa sexualité, qui n’est pas évoquée au cours du film. Cependant, il est assez peu développé en comparaison des autres animaux, à laquelle une progression narrative plus approfondie est consacrée.

*

En conclusion, sur les dix films les plus populaires de l’année 2017 en France :

  • 20 femmes (33%) et 42 hommes (67%) ont droit à une apparition sur une affiche de film, sur un total de 62 personnages ;
  • Aucune affiche ne représente plus de femmes que d’hommes. La seule affiche à atteindre la parité (Raid Dingue) fait la promotion d’un film centré sur une histoire d’amour ;
  • 4 des femmes représentées peuvent être perçues comme des héroïnes (Johanna de Raid Dingue, Belle de La Belle et la Bête, Rey de Star Wars et Laureline de Valérian), soit un total de 40% de rôles principaux féminins ;
  • MAIS, aucune de ces femmes n’est l’héroïne unique de son film : elles sont toujours associées à un co-rôle principal masculin, ce qui nous donne un total de 100% de films avec un rôle principal masculin ;
  • Sur ces 20 femmes, 14 entretiennent une relation amoureuse ou charnelle hétérosexuelle avec un personnage masculin du film (70%) ;
  • A l’inverse, sur les 42 hommes présents, 14 entretiennent une relation amoureuse ou charnelle hétérosexuelle avec un personnage féminin du film (33%) ;
  • Un seul personnage est censément gay (Lefou dans La Belle et la Bête), mais il n’entretient aucune relation amoureuse ou charnelle avec un autre personnage masculin. Une scène mettant en scène un couple gay figure dans Alibi.com, mais il s’agit de deux personnages très secondaires ;
  • Enfin, on peut compter 10 acteurs non-blancs (16%), dont 4 dans Fast and Furious. Parmi ces 10 personnages, 2 ont une importance mineure, voire anecdotique (Plumette, Madame Garderobe de La Belle et la Bête). Seuls Finn (Star Wars) peut être considéré comme l’un des héros de son film (et encore…).

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