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Rencontre avec Electric Retro Spectrum

Rencontre avec Electric Retro Spectrum

À l’occasion de leur concert à l’Espace B avec Hidden Frequencies le 21 janvier dernier, on a pu rencontrer Electric Retro Spectrum, groupe de rock psyché articulé autour de Marko à la guitare et de Tara, à la voix rauque et habitée, auxquels sont venus se greffer, pour la soirée, des petits nouveaux à la batterie et à la basse. Conscients de leur rôle dans la communauté de la musique indépendante parisienne, ils ont a cœur de fédérer les groupes entre eux et de mettre en avant la scène psyché française, à travers des projets comme leur association Underground Transmissions ou l’ouverture d’un studio d’enregistrement à Montreuil.

Manifesto XXI – Comment le projet est-il né ?

Tara : Le groupe, à la base, c’est moi et Marko. On a débuté le projet à deux en 2011, avec une boîte à rythmes et deux grattes. Je faisais de la batterie à un moment mais ça n’a pas duré longtemps. On a eu beaucoup de formations différentes.

Marko : En ce moment, on a trois batteurs.

Pierre : C’est mon premier concert !

Ton premier concert avec le groupe ?

Pierre : Premier concert ever ! Je suis ingé son à la Mécanique Ondulatoire, c’est là qu’on s’est rencontrés. On a commencé à faire des répètes il y a trois semaines, et là c’est le grand soir.

Tara : Étant donné qu’on était sur une bonne lancée et qu’on voulait continuer à faire le plus de dates possibles, on s’est dit qu’on n’allait pas attendre de trouver un batteur fixe. On a cherché un peu dans nos potes et autour de nous. On a aussi beaucoup de potes qui viennent faire du bruit à la fin des concerts, donc ça forme une communauté avec laquelle on jamme. On s’invite régulièrement les uns les autres en concert.

Tara, tu as une association qui s’appelle Underground Transmissions. Tu peux m’en dire plus ? En tant que groupe indépendant, c’est important d’avoir un pied dans l’organisation de concerts ?

Tara : On a monté ça il y a un an et demi, parce qu’on s’est rendu compte qu’il y avait un trou dans la scène psyché. Pour répondre à ta deuxième question, c’est très important, ça nous a ouverts à énormément de choses que l’on ne connaissait pas. On voulait vraiment créer cette connexion qu’il n’y avait pas dans la scène parisienne : avoir un contact avec plus de groupes, ramener des groupes français ensemble, et d’un autre côté s’ouvrir à la scène internationale. Finalement, c’est totalement faisable, tu n’as pas besoin d’être un bookeur de ouf pour organiser des soirées. On a commencé avec beaucoup de décors, on voulait créer une identité forte. À la longue, c’était plus compliqué parce qu’on a récupéré beaucoup de bookeurs et de dates de tournée de Dead Boy, étant donné que Nico, de l’Espace B, nous a refilé tous ses contacts.

Vous profitez d’Underground Transmissions pour faire souvent jouer Electric Retro Spectrum ?

Tara : Au début oui, surtout par manque de moyens. Nous, on pouvait jouer gratuitement, donc ça nous enlevait un budget. Aujourd’hui on le fait moins, parce que le but n’est pas de se mettre en avant. Si on peut l’utiliser pour avancer dans notre groupe c’est bien, mais notre but principal est surtout de soutenir les groupes français. Je trouve qu’on a une scène monstrueuse ici, dans tous les styles de psyché, que ce soit plus pop, plus vénère ou plus planant. On s’en est vraiment rendu compte en organisant des concerts. Il y a cette ambiance de partage qui peut être créée, et c’est la chose la plus importante pour nous : créer des liens entre des groupes qui n’auraient pas forcément eu l’occasion de se parler. Là, on est en train de construire un studio à Montreuil pour les répètes et les enregistrements, où on veut aller encore plus loin dans l’établissement de rencontres entre groupes locaux et internationaux. Au lieu de faire un after où on va juste se bourrer la gueule, là on peut se retrouver et enregistrer un split.

Marko : On avait beaucoup de contacts à l’international qui ne passaient pas à Paris parce qu’ils ne trouvaient pas de dates ou parce qu’ils ne parlaient pas français, donc on voulait établir ce lien.

Tara : Créer des ponts pour que ce soit plus facile entre tous les groupes et les communautés.

Le dernier album que vous avez sorti, Howl from the Cellar, date de 2015. Vous l’avez enregistré dans une cave ?

Tara : Non, c’est parce qu’on compose et répète dans une cave, mais l’EP a été enregistré dans le Sud. On l’a fait en quarante-huit heures donc c’est très brut.

Vous n’avez rien sorti depuis ?

Tara : Non, mais on a plein de compos à sortir. On s’est surtout concentrés sur les dates et sur cette stabilité que l’on n’avait pas.

Marko : C’était aussi le moment où on commençait l’asso. On a aussi envie de trouver la bonne personne parce qu’on trouve qu’il n’y a pas assez de connexions entre les ingés son et les musiciens. On a besoin de quelqu’un qui nous comprenne et qui soit dans notre délire. Ce serait cool de ne pas avoir de barrières et de s’asseoir pour composer et enregistrer en même temps, créer une vraie atmosphère.

Tara : Comme tout le monde, on a grandi en lisant des livres sur les Doors ou Pink Floyd, et on rêve de ce truc magique qui se passe lors des enregistrements. L’ingé son est aussi important que le groupe, c’est le mec qui fait la connexion entre ce que tu joues et les gens qui vont l’écouter. Du coup, là, on veut prendre notre temps jusqu’à ce qu’on trouve ce qu’il nous faut.

Marko : On se rend compte maintenant que le rendu de Howl from the Cellar, enregistré en si peu de temps, n’est pas celui qu’on voulait. On n’a pas envie du même son ni de la même prod.

Tara, tu avais repris une chanson de PJ Harvey lors de l’un de vos concerts, au Supersonic. Tu as des voix féminines qui t’inspirent particulièrement ?

Tara : Oui, carrément, mais dans le rock il n’y en a pas énormément. Il y a bien sûr PJ Harvey, Janis Joplin… Je suis à fond dans Patti Smith aussi. Sinon, je ne vais pas forcément chercher l’inspiration dans des voix féminines.

Pierre : J’ai pris une claque récemment avec Ellah A. Thaun. Cherry Glazerr est un super groupe aussi, je les ai vus au Pitchfork.

© Aurélien Boyer

Pour votre dernier EP, je me suis demandée si vous vous étiez inspirés de groupes de doom comme Electric Wizard, sur certains morceaux ?

Tara : Oui, carrément, c’est notre came !

Pierre : Marko en est le représentant, c’est le grunge stoner par excellence.

Tara : Oui, on s’inspire beaucoup du grunge aussi.

Ça fait plaisir d’entendre des sons plus lourds et plombants dans la scène psyché parisienne.

Pierre : De toute façon, « psyché » est un terme qui englobe tout le rock underground, c’est juste une appellation.

Tara : On n’est pas sectaires, on est vachement ouverts niveau musique. Nous, on garde notre identité, que ça plaise ou non à la communauté.

Pierre : Je m’occupe de Black Totem à la base, que j’ai monté avec mon coloc il y a quatre ans, et on est vraiment dans la même optique. On vient de sortir l’album des Cheapster. Et pour info, le nom du groupe veut dire « trentenaire hipster » (rires).

Qu’est-ce qui vous inspire pour écrire vos morceaux ?

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Tara : On est assez engagés dans nos textes. On y met un point d’honneur, parce que c’est aussi ça, la force de l’art. C’est un moyen de communication international, tu peux faire de la musique avec n’importe qui sans barrière de langue.

Marko : Je n’aime pas les artistes qui se disent indifférents aux problèmes sociaux. Si tu es artiste, tu es forcément touché par le monde. C’est important de donner son opinion.

Tara : On est aussi très engagés parce qu’on a énormément écouté Rage Against the Machine.

Pierre : Les premiers Beastie Boys aussi, quand ils faisaient du punk hardcore.

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Quels sont vos projets futurs ?

Tara : On va sûrement organiser une tournée aux États-Unis, on y était partis l’année dernière et on avait adoré. On avait pu joué à l’Echo Fest à Detroit, qui était notre seule date d’ancrage, et puis par le biais du réseau sur place on avait fait tout le Midwest. On a senti qu’il y avait un plus gros public pour notre genre de son là-bas ; en tout cas, c’est plus réceptif. On va éventuellement enregistrer à Portland dans le studio où Thee Oh Sees ont enregistré. Sinon, on a fait jouer Has a Shadow, qui viennent de se faire signer chez Fuzz Club. Ils viennent du Mexique et ils seraient chauds pour nous faire tourner là-bas ! En Europe, les tourneurs sont vachement plus fermés, et ça peut moins se faire par des réseaux d’amis.

Marko : On est nettement mieux payés aux États-Unis aussi.

Tara : Dans l’asso, notre minimum pour la rémunération des groupes, c’est 150 balles, on ne paie pas en dessous. C’est important pour nous.

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Electric Retro Spectrum sera en concert le 2 mars à Paris, au Supersonic.

Merci à Hidden Frequencies !

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