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« Microbe et Gasoil » : l’adolescence en road-trip chez Michel Gondry

« Microbe et Gasoil » : l’adolescence en road-trip chez Michel Gondry

Quand on parle de Michel Gondry, on pense tout de suite à son univers un peu barré, ses effets spéciaux home-made et ses scénarios brumeux et fantasmagoriques où les frontières entre rêve et réalité se brouillent.

Dans Microbe et Gasoil, rien de tout ça : on suit l’amitié de Daniel alias Microbe et Théo alias Gasoil,  deux collégiens versaillais solitaires et un peu paumés qui décident sur un coup de tête de construire une voiture-maison pour y passer l’été tous les deux en vadrouillant sur les petites routes de France. Entre problèmes de filles, questionnements existentiels et road-trip surréaliste à travers la campagne, on obtient un beau portrait de deux jeunes à la fois gentiment ridicules et attachants.

Microbe et Gasoil, Michel Gondry, 2015
Microbe et Gasoil, Michel Gondry, 2015

Le film baigne dans une forme de poésie hors du temps même si l’action est bien ancrée en 2014 : les deux aventuriers se débarrassent de leurs smartphones à la première occasion et se repèrent avec les bonnes vieilles cartes routières de nos parents. Théo arbore tout le long du film un superbe blouson à la Mickael Jackson et Daniel dessine Les Ramones dans les marges de ses cahiers. On sent que l’intention de Gondry est bien plus autobiographique qu’elle ne veut se l’avouer.

Mais ce qui donne son vrai charme au film, c’est que tout le monde se reconnaîtra forcément un peu dans le portrait des deux ados. Les parents sont soit bobos au bord de la névrose, soit carrément à côte de la plaque. Les collégiens ont des boutons et des appareils dentaires et ne sont pas joués par des acteurs à la vingtaine bien tassée. Théo et Daniel s’imaginent être différents et au-dessus du lot pour cacher leur malaise au collège ; et qui n’a jamais fait comme eux à la même époque ? Leurs questionnements sur de grands sujets comme la masturbation ou la meilleure façon de draguer les filles de la classe rappelleront forcément des souvenirs à certains. On est loin de la bourgeoisie proprette de LOL de Lisa Azuelos ou du drame social et plus près des ados moches et libidineux des Beaux Gosses de Riad Sattouf.

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On retrouve tout de même le côté surréaliste qui fait la patte de Gondry : le cabanon de jardin qui vadrouille sur la route sans attirer l’attention de personne, des parents qui ne s’activent pas plus que ça pour chercher leurs mômes en fugue ou encore des réflexions de niveau un peu trop adulte dans la bouche d’un gamin de 14 ans.

Microbe et Gasoil, Michel Gondry, 2015
Microbe et Gasoil, Michel Gondry, 2015

Il y a également beaucoup de charme dans la mise en scène : la petite maison roulante est adorable et le cadre devient de plus en plus ouvert au fur et à mesure que les compères avancent dans leurs expéditions. On peut aussi apprécier le fait que la moitié du film se déroule en Bourgogne, ce qui change des films d’été français en Bretagne ou sur la Côte d’Azur. Le film n’est tout de même pas exempt de faiblesses : on n’échappe pas aux séquences clichés des films d’amitiés et d’amourettes entre ados. La sensibilité de la première partie laisse place à des scènes loufoques et des retournements de situation improbables dans la deuxième ce qui dépareille l’ensemble. Microbe et Gasoil n’est sans doute pas le film qui marquera le plus la filmographie de Gondry, mais malgré les clichés et un petit manque de profondeur, on peut savourer ce portrait d’ados juste et tendre – et cette échappée belle qu’on a tous fantasmée au même âge.

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