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Deux jeunes ambassadeurs du longboard dancing

Deux jeunes ambassadeurs du longboard dancing

Le longboard dancing, ça vous dit quelque chose ? Pour les néophytes, petit cours de rattrapage dans la vidéo ci-dessous ! On a été rencontrer deux jeunes fervents pratiquants, Marin Noblet et Mathis Lucas, passionnés par cette nouvelle discipline entre performance physique et esthétique, pour leur poser quelques questions sur cette tendance qui envahit les rues, et ne cesse de faire de nouveaux adeptes !

Manifesto XXI – Quand et pourquoi avez-vous commencé à faire du longboard ? 

Marin : J’avais vu que mon voisin, qui était dans le même collège que nous, faisait du longboard, et ça m’a trop branché. Du coup à Noël j’ai demandé un cruiser (petite planche en plastique). Et vu qu’avec Mathis on était déjà meilleurs potes et qu’on faisait tout ensemble, on a commencé tous les deux, il y a quatre ans.

Vous avez tout de suite bien accroché avec cette pratique ?

Mathis : Moi pas tellement. Au début Marin était sur son skate et moi sur ma trottinette, mais au bout d’un moment ça m’a lassé, du coup j’ai testé son skate. Plus tard il en a commandé un autre, donc on a pu commencer à skater ensemble.

Vous avez commencé à Rennes ?

Mathis : On habitait et habite à Betton, au nord de Rennes. Au début, comme on était plus jeunes, on skatait plutôt sur Betton. Puis un jour Marin s’est acheté un vrai longboard, et je trouvais ça super cool, donc j’en ai acheté un aussi, et c’est là qu’on s’y est vraiment mis.

Pourquoi avez-vous été attirés par cette forme-là de skate plutôt que par des formes plus traditionnelles, street, rampe… ?

Mathis : Je pense qu’on s’y est intéressés au moment d’une vague, d’une mode. On préférait cette forme pour la vitesse notamment.

L’esthétique de la discipline vous accrochait plus aussi peut-être ?

Marin : Oui.

Mathis : Après, je pense que c’est vraiment par goût plus que par effet de mode qu’on a été attirés par cette forme de skate.

Quand vous avez commencé, beaucoup de jeunes de votre entourage pratiquaient aussi le longboard ?

Mathis : Dans notre entourage, pas tant que ça en fait.

Marin : C’est surtout qu’on en voyait de plus en plus sur les réseaux sociaux, sur lesquels il y avait vraiment une vague qui se développait.

Comment êtes-vous tombés sur tous ces contenus-là, vous passiez du temps à faire une forme de veille, à vous abonner à des pages ?

Mathis : Au départ c’était vraiment sur YouTube, il suffisait qu’on tape « longboard » pour tomber sur des vidéos vraiment impressionnantes. Et ça, ça motive, quand tu vois quelqu’un qui en fait vraiment bien, ça donne envie.

C’était plutôt des Français, Européens, Américains…?

Mathis : Il y en avait d’un peu partout, mais de base ça semblait venir des États-Unis. Nous on pratique ce qu’on appelle le « dancing », et les premiers « dancers » venaient des États-Unis. Il y avait une marque qui s’était imposée dans la catégorie, Loaded, et du coup les vidéos de leurs riders tournaient.

Marin : On ne connaissait pas forcément les Européens, mais il y avait déjà plein de pratiquants aussi depuis quelques années. Ils étaient juste moins visibles, ou bien on n’est peut-être pas tombés dessus.

Comment avez-vous commencé à produire et à diffuser des vidéos de vos sessions ?

Marin : La véritable histoire ? (rires) J’étais au ski, mon père est rentré dans un magasin, il a vu une GoPro, il a tourné autour pendant quatre heures, et il a fini par l’acheter. Du coup, quand je faisais du skate avec Mathis je lui la piquais tout le temps, et on se filmait. Au début c’était à l’arrache, puis ensuite, vu que les téléphones ont évolué, on a pu filmer avec.

Ensuite, je me suis rendu compte que le montage me plaisait pas mal, donc j’ai commencé à travailler les vidéos, simplement, sur iMovie.

Et là ça va faire presque un an qu’on a un véritable appareil photo.

Donc c’est véritablement cette année que vous avez intensifié le flux de posts sur YouTube, Instagram… ?

Mathis : Ça ne s’est pas vraiment intensifié, on a toujours fait ça régulièrement, on a toujours été assez présents sur les réseaux sociaux, mais c’est que la qualité de nos contenus a progressé.

Une communauté assez importante vous suit sur Internet ; est-ce que vous savez un peu quels profils de personnes se cachent derrière ? 

Mathis : En grande majorité, ce sont des gens qui s’intéressent de base au longboard. Je pense que beaucoup de gens commencent, découvrent le longboard, et cherchent des vidéos, comme nous on a pu en chercher auparavant, sur YouTube, Instagram… Ou même des gens qui s’y intéressent car ils voient des pratiquants dans la rue, donc ils tapent ça en ligne, et ils tombent parfois sur nous. Je pense que c’est de là que provient la majorité des personnes qui nous suivent. Après, il y a des gens qui pratiquent aussi beaucoup, ou des amis…

Est-ce que ça a été important pour vous, l’idée d’intégrer une communauté via cette pratique ?

Mathis : De base, on ne s’est pas lancés dans le longboard pour se dire tiens, on va appartenir à quelque chose ou un truc comme ça, on voulait juste kiffer et faire notre truc. Au début c’était vraiment dans notre coin.

Marin : On l’a découverte petit à petit cette communauté, en fait.

Mathis : La communauté, elle s’est développée progressivement, les rencontres sont venues avec les événements, etc. Mais à la base, c’était pour notre plaisir personnel.

Vous parlez d’événements, il y a tout un système de compétition qui s’est mis en place dans cette pratique ?

Marin : Il se développe de plus en plus. Il y a notamment la coupe du monde : So You Can Longboard Dance?, aux Pays-Bas, tous les ans. Il faut savoir que la plupart des longboarders européens viennent des Pays-Bas et d’Allemagne. Cette compétition est née assez récemment.

Mathis : En fait en compétition, pour le longboard, il existe deux catégories : le longboard dancing freestyle, celle dans laquelle on concoure nous, et sinon la vitesse. C’est vraiment deux mondes à part.

Marin : Sinon il y a d’autres événements, comme les DockSession à Paris, créées par un ancien champion du monde. Ça a pris une grande ampleur, car entre 2014 et 2016 la communauté longboard a explosé. Sur Paris, ils sont peut-être cent chaque semaine. Et elles se développent ailleurs en France et dans le monde. Ça c’est juste de la pratique par contre, pas de la compétition. Il y a tous types de personnes et de niveaux.

Ils organisent aussi une grosse rando dans Paris le dimanche sans voiture, ils réunissent des riders de toute la France et de l’étranger. L’année dernière on était 1 100, donc c’était le plus gros rendez-vous d’Europe au final. Cette année ça n’a pas été autorisé par la préfecture, mais on était quand même beaucoup.

Sinon il y a un championnat du Brésil, un Open à Hambourg, il y en a eu un à Mannheim aussi cette année… Il y a vraiment de plus en plus de concours.

Donc en France il n’y a pas de compétitions ? Juste les DockSession pour s’entraîner ?

Mathis : Il y a eu quelques contests, à Nantes notamment. On n’était pas énormément, mais il y avait aussi des étrangers.

Marin : Ce n’est pas encore assez développé en France, mais la communauté y travaille. Par exemple, cet été il y a eu les premiers championnats de France officiels, et ils souhaitent les reconduire chaque année.

Vous-mêmes, vous avez participé à certaines compétitions ?

Marin : La World Cup, en avril.

Mathis : C’était fou, c’est vraiment différent de quand tu roules d’habitude dans la rue, il y a une aura dans le bâtiment, c’est assez sombre, oppressant…

Marin : Quand tu passes il y a de la musique, tout le monde est autour, il y a un commentateur qui chauffe bien le public… Quand tu te lances, y a le chrono, 3, 2, 1, tu regardes autour de toi, et tu vois toutes les têtes des pratiquants que tu voyais avant sur YouTube…

Dans ces compétitions, quels sont les types de jurys et les types de critères ?

Marin : Les jurys sont souvent des personnes d’une trentaine d’années, des personnes reconnues par la communauté, tout le monde identifie leur nom, ce sont des pionniers.

Mathis : Quand tu passes, il y a quatre critères : le dancing (les pas sur la planche), le freestyle (les figures), le style (prestance, charisme, vêtements) et la fluidité.

Comment analysez-vous le rapport du longboard au sponsoring, dans ce que vous observez ou vivez vous-mêmes ?

Mathis : Il y a du sponsoring dans le longboard, mais ça reste quelque chose de l’ordre de l’échange de services. C’est un système de contrepartie où les riders reçoivent des vêtements et du matos, et les portent dans les vidéos qu’ils diffusent. Ce n’est pas un sponsoring réellement financier, ce n’est pas encore assez développé.

Donc c’est impossible pour l’instant de vivre du longboard ?

Mathis : De vivre de ça, pour l’instant, je pense que ce n’est pas vraiment possible, mais ça se développe.

Marin : Mais vu que la communauté de notre génération y travaille, peut-être que plus tard ce sera possible.

Avec qui travaillez-vous ?

Marin : On ne peut avoir qu’un sponsor par catégorie de matos, donc un sponsor de planche, ça c’est le plus répandu, sinon sponsor de trucks, et roues. Il y a aussi les vêtements. Nous, on a bossé par exemple avec Wasted Paris, Jacker, French Rocket…

Donc tout ça reste clean et pas dérangeant à vos yeux ?

Marin : Disons qu’on n’a jamais perdu de vue l’amusement, et on ne veut pas perdre ça, c’est vraiment primordial, on ne fera jamais un truc qui nous prend la tête, on ne veut pas être forcés.

Si le contexte changeait, vous aimeriez professionnaliser votre passion ? 

Marin : Oui, mais je pense que par rapport au longboard, on est presque déjà considérés comme des professionnels, car il n’y a pas de grade au-dessus en fait. Mais par rapport à d’autres disciplines, on n’est pas pros au même sens, et on ne peut pas en vivre pour l’instant.

Comment voyez-vous l’avenir de cette discipline ? 

Marin : Je suis très optimiste moi, je le vois très grand. J’avais vu des sondages sur la Corée, comme quoi il y avait là-bas plus d’un million de longboarders, un truc comme ça… Ils font marcher notre business, grâce à eux on a plus de planches. Mais chez eux c’est vraiment une mode, ils copient les Européens, sauf qu’elle n’a pas l’air de partir du tout.

Nous à l’inverse, on a la sensation d’avoir autour de nous de plus en plus de gens qui s’investissent, pas sur un effet de mode, mais par passion.

Il n’y a pas des jours où vous vous lassez, où vous avez le sentiment d’avoir fait le tour de la question ? 

Marin : Quand on dit ça, après on le regrette, c’est souvent quand on n’arrive pas à passer une figure, on s’énerve puis on dit « Allez j’arrête tout ». Moi, ça m’est arrivé pas mal de fois, mais deux minutes plus tard j’étais sur ma planche dehors…

Mathis : Ça m’est déjà arrivé aussi, mais temporairement, sur un agacement. Mais en fait on est accros, à un certain stade tu ne peux plus vraiment décrocher.

Marin : Quand il pleut on est mal !

C’est quoi le prix moyen d’une planche de longboard ? 

Mathis : Une planche seule, 220 euros en moyenne, et complète, plutôt 350 euros.

Vos planches préférées (après, si vous êtes engagés auprès de certaines marques, vous ne pouvez peut-être pas trop vous exprimer là-dessus…) ?

Marin : Nos engagements vont avec nos préférences de toute manière. Moi c’est Simple Longboards. C’était ma marque de cœur, et un jour ils m’ont contacté…

Mathis : Et moi Cosmo Longboard, une marque coréenne. Je me suis retrouvé équipé par eux un peu par une suite de hasards : à un moment où j’avais des galères avec ma planche, une amie m’a échangé une planche Cosmo contre la mienne. Dès le lendemain, on leur a envoyé une vidéo, et ils ont accepté ma proposition de sponsoring.

Vous cassez souvent vos planches ?

Mathis : Oui ! (rires) Tous les deux, trois mois.

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Quels sont vos spots préférés en France ?

Mathis : Les Docks à Paris dont on parlait tout à l’heure ; en bas du musée d’Orsay, c’est tout lisse. À Rennes, c’est cool aussi, la place Charles-de-Gaulle… Mais on se lasse parfois, à force.

Vous estimez à combien de personnes la communauté qui pratique couramment le longboard à Rennes ? 

Marin : Il y a sûrement des pratiquants isolés qu’on ne connaît pas…

Mathis : On essaie justement de rassembler les pratiquants, on a créé un groupe Facebook public, et il s’agrandit, on rencontre de nouvelles personnes…

Marin : Dans notre « bande » à nous, on est une vingtaine, mais il y a plein d’autres pratiquants.

Mathis : On cherche à attirer ces gens-là, qui ne se montrent pas forcément, qui skatent juste pour aller au lycée, etc. On a envie de rassembler. Il y a une notion de partage.

Quel est l’âge moyen des gens avec qui vous skatez à Rennes ?

Mathis : La plupart sont des gens de notre âge, mais quand on a commencé on traînait avec un petit groupe plus âgé que nous. Mais ils se sont un peu éparpillés, ils sont partis dans la vie active… On s’est accrochés quand même, malgré la flemme dans le froid en hiver, etc. Parfois on était deux… Il faut avoir le mental pour continuer.

Marin : Ces moments-là on n’avait qu’une envie, c’était de partir à Paris rejoindre tout le monde…

Mathis : Mais là on a vraiment réussi à créer un groupe à peu près solide.

Marin : On est tous potes, c’est génial.

Vous faites souvent l’aller-retour à Paris pour skater ?

Marin : De plus en plus oui, surtout l’été, vu qu’on est encore scolarisés, et puis ce n’est pas donné. Après, certains rares sponsors peuvent payer des voyages.

Vous connaissez des filles qui pratiquent cette discipline ?

Mathis : Proportionnellement, ça reste une minorité, mais on en voit de plus en plus.

Celles que vous rencontrez se sentent plutôt bien intégrées ?

Mathis : Oui, ça se passe bien, quand on fait des sessions il y a une notion de partage, donc même si c’est une débutante par exemple, on va l’aider, l’intégrer.

Marin : Quel que soit le genre des personnes, le fait que ce ne soit pas un sport institutionnalisé par des pratiques en club le rend plus accessible, ça passe simplement par des rencontres dans la rue, tu as une planche et tu vas voir des gens… C’est plus facile de se réunir et de pratiquer.

Vos ambitions, projets à moyen et long terme ? 

Mathis : Ce serait de réussir à avoir un véritable impact sur le longboard, à développer la discipline. Mais déjà, le fait que des gens aussi jeunes que nous soient dans le circuit pro, on sait que ça en incite d’autres à s’y mettre.

Marin : Rien qu’au lycée, on a de plus en plus de potes qui s’y mettent, parce qu’ils nous connaissent nous, ça fait trop plaisir !

Mathis : Ça fait bizarre des fois de se dire qu’on peut avoir de l’influence sur certaines personnes, par exemple quand on porte deux-trois vêtements, même des marques pas connues du tout, et que juste après on observe des jeunes en porter autour de nous… Tu ne penses pas à tout ça quand tu commences dans ton coin.

Marin : Il faut surtout s’amuser…

Mathis : Rester assez critique. Beaucoup de marques nous contactent, il faut trier. Voir ce qu’on y gagne, est-ce que le produit a une pertinence, est-ce qu’on aime l’esthétique…

Marin : On se décide surtout en fonction de l’image qu’on veut renvoyer de nous-mêmes : si on sent que ça ne va pas nous correspondre, c’est mort. Après, on n’a pas envie d’avoir des tas de sponsors, on préfère être exclusifs sur certaines marques, et dégager une véritable identité.

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite ?

De vivre du longboard !

Est-ce que vous seriez ouverts par exemple au fait de travailler sur des actions de démocratisation du longboard, avec des écoles, des happenings, des mini-shows… ?

Marin et Mathis : Oui, carrément !

Marin : Ce serait super marrant, ça ferait des expériences ! Tant que c’est drôle, qu’on s’amuse, et qu’on fait ce qu’on aime, on est chauds !

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