Oklou, interview #2 [ Soirée Temple, Decilab ]

Le 16 avril dernier, le crew Decilab était de retour à l’Antipode à Rennes avec une soirée estampillée Future Beats. À l’affiche : Basenji, Jarreau Vandal, Dehousy, Pura Pura, KCIV, et seule représentante de la gent féminine : Oklou, que nous vous avions déjà présentée lors de sa venue pour les Bars en Trans (à relire ici). Après une première saison de lives, nous avons voulu poser quelques questions à la productrice parisienne sur ses impressions de scène, ses actualités et ses projets pour la suite.

[À noter que vous pourrez la retrouver en live pour la soirée anniversaire de Manifesto XXI le 28 mai prochain au Batofar / 18H – 3H / 7 artistes / Gratuit – Event Facebook]

Manifesto XXI – Sur quoi travailles-tu en ce moment ?

Oklou : En ce moment je travaille sur différents morceaux, dans le but de sortir un nouvel EP. Mais tout ça est en cours, donc je n’ai pas d’informations très précises à donner dessus pour l’instant.

Manifesto XXI – Tu fais pas mal de live aussi, comment ça se passe ? Quelles sont tes impressions ?

Oklou : C’est assez intéressant, le fait de faire pas mal de concerts, de scènes différentes, de rencontrer des publics différents aussi, ça me permet moi, déjà d’avoir cette expérience, et puis aussi de cibler un peu plus ce vers quoi je veux aller, ce que je veux développer en live. En tout cas c’est très cool à vivre, et ça me fait avancer.

Manifesto XXI – Est-ce que cette expérience te donne envie de chercher à penser ta composition en fonction du live ?

Oklou : Alors le live m’a en effet permis d’une certaine manière d’enrichir mon travail de studio, mais je ne me dis pas « Tiens il faudrait que je fasse ça pour le live ».

Manifesto XXI – Quel est le titre que tu apprécies le plus jouer en live ?

Oklou : Une toute nouvelle, que je joue en première comme ça ça me permet d’être à l’aise ; Nightcrush. Elle fait partie de celles qui bougent un peu dans le set, même si ça reste smooth.

Manifesto XXI – Et est-ce qu’à l’inverse il y a des morceaux que tu trouves moins adaptés au live ?

Oklou : Oui, ça dépend surtout du public que j’ai en face de moi, des fois je me dis « Oula, ça ça va pas le faire… ». Surtout sur des formats club, où je joue après minuit, où les gens sont chauds, qu’ils ne viennent pas forcément voir un « concert »… ben là il y a plein de choses que je ne joue pas.

Manifesto XXI – Tu as une préférence pour jouer à certaines heures ou sur certains types de plateaux ?

Oklou : Si je veux vraiment proposer la palette complète de mes morceaux, je préfère jouer assez tôt, vers 21h… Ce que je trouve particulièrement déstabilisant, c’est de jouer dans des contextes où les gens s’attendent à autre chose que ce que je propose, et du coup m’interpellent, c’est très déconcentrant.

Manifesto XXI – Est-ce qu’il y a certains live/plateaux que tu as particulièrement appréciés dernièrement ?

Oklou : Je suis allée à Barcelone il n’y a pas longtemps jouer dans un club, c’était très sympa, et sinon un bon souvenir à Dijon dans une galerie, genre à 17h, c’était super !

Manifesto XXI – C’est quelque chose qui t’attire de jouer dans des cadres un peu atypiques, qui sortent du format concert ou club habituel ?

Oklou : Franchement, si je veux vraiment prendre le temps de jouer tous mes sons, même les plus lents, les plus introspectifs, c’est sûr que sur des formats club c’est compliqué.

Manifesto XXI – Dans ton live et tes productions on entend beaucoup d’extraits enregistrés de bruitages, sons concrets… Ils viennent d’où ?

Oklou : Ce ne sont pas des choses que j’enregistre moi-même car malheureusement je n’ai même pas le petit Zoom de base pour le faire, donc ce sont des choses que je choppe sur internet. Ce sont souvent des sons extraits de vidéos, ça peut être n’importe quoi, des choses qui me parlent, symboliques…

Manifesto XXI C’est toi qui écris toutes tes paroles ? Quels thèmes t’inspirent ?

Oklou : Oui, c’est moi qui écris tout. Après je ne suis pas du tout une lyriciste, on va dire que je préfère le langage des sons à celui des mots, c’est beaucoup plus la ligne mélodique de la voix qui m’intéresse que la signification du texte.

Manifesto XXI – As-tu un processus un peu récurrent de composition ?

Oklou : Je pose une base harmonique ou rythmique d’abord en général, puis ensuite je teste des choses. Et j’adore le moment où je dois composer la ligne mélodique vocale.

Manifesto XXI – Est-ce que tu penses que la voix va garder une place aussi importante dans tes prochaines compositions ?

Oklou : J’aimerais beaucoup composer de la musique plus instrumentale, mais c’est juste que je ne peux pas m’empêcher de poser de la voix… Dès qu’il y a de l’espace pour une voix, je vais le combler direct !

Manifesto XXI – Est-ce qu’il y a quelques groupes/artistes sur Paris que tu apprécies particulièrement en ce moment ?

Oklou : Ça ne va pas être très original, je suis arrivée un peu tard sur le truc, mais j’ai été super emballée par les mecs de MHD. Et sinon tout ce qui peut se passer en rap français à Paris en ce moment m’intéresse beaucoup.

Manifesto XXI – Tu joues dans une tenue un peu atypique ce soir, ça t’arrive souvent de jouer en jogging ?

Oklou : La vérité c’est qu’avant de partir pour Rennes j’avais 2h devant moi, je me suis dit allez je vais me saper, je vais mettre mon nouveau fut bleu pétant trop beau avec un petit haut… mais là je me dis « mhh y a un truc qui va pas ». Donc je continue de chercher (j’adore faire ça), et là je me rends compte que j’ai oublié l’alim de ma pédale dans mon studio dans le 19e, et que je n’aurais jamais le temps d’y aller, de revenir, et d’aller à Montparnasse. Donc l’outfit n’allait pas, du coup j’ai tout changé, j’ai mis ce vieux truc… mais je me sens bien dedans, c’était quand même le critère numéro un, j’ai mis ça et ça… bref j’aime pas du tout, mais qu’est-ce que tu veux, c’est la vie, et au moins j’ai pu avoir mon alimentation de pédale !

Manifesto XXI – C’est un truc qui te branche bien d’ailleurs la mode, les vêtements, trouver des tenues… ?

Oklou : Je suis pas hyper au courant de tout ce qui se passe dans la mode, les créateurs, etc., mais j’adore les fringues oui.

Manifesto XXI – Pour en revenir à la musique, est-ce que tu as la sensation de faire partie d’un certain courant musical, d’une scène parisienne/française particulière, ou plutôt au contraire d’évoluer de façon autonome ? 

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Oklou : Non pas du tout, je ne suis pas un atome isolé parce que je ne suis clairement pas toute seule. Je ne me suis pas construite toute seule, j’ai évolué avec plein de gens autour de moi. Et oui, il se passe des vraies choses humaines à Paris, et on se rejoint autour de quelque chose qu’on aime, comme dans n’importe quelle scène musicale dans le monde.

Manifesto XXI Et tu mettrais un nom dessus ?

Oklou : C’est toujours un peu difficile de sortir un terme précis, car les choses sont tellement hybrides aujourd’hui… Il faudrait inventer un nouveau mot, sauf que les étiquettes sont là pour guider les gens, donc si tu sors une étiquette qui n’existe pas… Il y a une réelle mouvance, elle est présente, de plus en plus de gens et d’artistes en France s’en rendent compte et s’y intéressent, mais ça existait déjà en 2012, même si c’était tout juste naissant.

Manifesto XXI Pour toi c’est une scène qui sort peu à peu de l’indépendance, qui devient de plus en plus visible ?

Oklou : Ça reste indé car avant que tout ça ne soit labellisé, il va falloir un petit moment quand même. La France est toujours en retard !

Manifesto XXI – En parlant de label, tu as quelques idées pour ton prochain EP ?

Oklou : Je ne sais pas encore, pour l’instant j’ai des contacts qui m’intéressent beaucoup affiliés à certains labels étrangers, à Londres et à New-York notamment, car je ne trouve pas vraiment de label qui me corresponde en France. Après je n’ai jamais été quelqu’un qui démarche les labels, médias… je n’arrive pas à me dire « Tiens c’est assez bon pour que je puisse l’envoyer », donc je laisse les gens venir et s’ils viennent… inch’allah !

Manifesto XXI – Tu te retrouves mieux dans la production musicale de ces deux villes que dans ce qui se fait Paris ?

Oklou : Oui, de toute manière mes inspirations sonnent très anglo-américaines, donc forcément… Mais il n’y a rien de fait. Et puis ce qui m’intéresse dans un label c’est beaucoup le côté famille aussi, pouvoir passer au bureau tous les jours… C’est pour ça qu’à la fois esthétiquement je m’identifie plus à des labels étrangers, et en même temps comme j’habite à Paris je ne peux pas aller rencontrer les mecs et leur faire des checks tous les jours, donc si je signe quelque part, le seul intérêt serait de faire partie d’un catalogue qui me plaît. Donc je suis partagée sur l’utilité et la pertinence d’une signature sur un label étranger…

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Retrouvez Oklou :

7.05 – Le Bourg, Lausanne

16.05 – Nuba, Paris

21.05 – Dabada, San Sebastian (dj set w/ TGAF)

28.05 – Anniversaire Manifesto XXI, Le Batofar, Paris

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