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HEY! fait son show à la Arts Factory

HEY! fait son show à la Arts Factory

Anne & Julien. Le duo n’est désormais inconnu de personne. Figures pionnières de l’art outsider, les fondateurs de la revue HEY! modern art & pop culture, publiée depuis sept ans, ne s’arrêtent pas dans leur lancée. Avec une exposition haute en couleur à la galerie Arts Factory, les commissaires inaugurent la première session d’une série de gallery shows. À savourer jusqu’au 22 avril.

Stéphanie Lucas, « Main sauvage », 2015, acrylique sur toile, 19 x 27 cm © Arts Factory / HEY!

Antisèche HEY! pour retardataires

Après les expositions « Miyazaki-Mœbius » à la Monnaie de Paris et « Tatoueurs, tatoués » au musée du quai Branly, l’exposition « HEY! modern art & pop culture » à la Halle Saint-Pierre en 2011 est un événement-manifeste, succès d’environ 65 000 visiteurs, renouvelé en 2013 et 2015.

HEY! incarne un tournant. À contre-courant des institutions, Anne & Julien font de la subculture et de la culture populaire les reines du spectacle. Les arts sont décloisonnés et la hiérarchie mise au placard. Donner de la visibilité aux arts autres, aux artistes en marge : tel est le travail des fondateurs de HEY! depuis près de trente ans. À la croisée des arts, des médiums et des mondes, l’outsider pop rassemble lowbrow, surréalisme pop, tatouage, bande dessinée, street art, néo pop figuratif, art de l’affiche, etc. Une large constellation contemporaine que nous offrent Anne & Julien, générateurs d’influences. Après un développement clandestin, la pop culture jouit désormais d’une reconnaissance mondiale. Les fondateurs de HEY! ont donc été les visionnaires de l’art de demain.

(Toujours largués ? Relisez notre interview d’Anne & Julien !)

Handiedan, « Centauri In Blue », 2016, impression pigmentaire, 40 x 52 cm © Arts Factory / HEY!

HEY! à la Factory  

La galerie Arts Factory, fondée par Effi Mild et Laurent Zorzin, explore la scène graphique contemporaine depuis 1996. Installée dans un espace de 250m² répartis sur quatre niveaux, la galerie donne une visibilité à un domaine longtemps ignoré par le marché de l’art traditionnel. Programmation tournée vers des talents émergents et figures incontournables de l’undergraphisme international et de la bande dessinée indépendante, la Arts Factory révèle un panel éclectique de l’outsider art et du pop surréalisme contemporains. À l’occasion de la sortie du n°29 de la revue en librairie, Anne & Julien occupent les lieux de la Arts Factory pour une première exposition-vente en cohésion totale avec la ligne directrice de la galerie. Avec un espace librairie riche et diversifié, il est peu probable d’en ressortir les mains vides. L’exposition est réjouissante, aussi pittoresque qu’éclectique. Artistes venus des quatre coins du globe, éclectisme des médiums et des approches, on en sort des confettis pleins les mirettes.

Stéphane Blanquet , « Cuirs à l’Aurore à Demi-Feutrée », 2016, tapisserie, 170 x 240 cm, édition limitée à 8 exemplaires © Arts Factory / HEY!

En somme : 37 artistes, 13 pays, près de 200 œuvres

MURIELLE BELIN – STÉPHANE BLANQUET – VAUGHN BODÉ – HERVÉ BOHNERT – DAVE COOPER – MIKE DAVIS – DANIEL MARTIN DIAZ – ERDEVEN DJESS – EL GATO CHIMNEY – ROLAND GRABKOWSKI – HORST HAACK – MASAYOSHI HANAWA – HANDIEDAN – SOPHIE HERNIOU – RYAN HESHKA – MÄRT INFANGER – ELIAS KAFOUROS – JEAN LABOURDETTE AKA TURF ONE – LOÏC LUCAS – STÉPHANIE LUCAS – GABRIEL MACHÉTA – madmeg – STAN MANOUKIAN – TAGAMI MASAKATSU – EUDES MENICHETTI – CHRISTOPH MUELLER – SEAN NORVET – MIKAEL DE POISSY – PIETRO SEDDA – GILBERT SHELTON – JIM SKULL – ALEKSANDAR TODOROVIC – PAUL TOUPET – ANTON VILL – DAVOR VRANKIĆ – MARTIN WITTFOOTH – DANA WYS

Aleksandar Todorovic, « Chimera », 2017, acrylique, gouache et aquarelle sur papier, 29,7 x 42 cm © Arts Factory / HEY!

Laurent Zorzin, co-fondateur de la galerie avec Effi Mild, répond à nos questions :

Quelle est la ligne directrice de la galerie ?

La galerie existe depuis 1996, elle explore la scène graphique contemporaine au carrefour du dessin, de l’illustration, de la bande dessinée et du graphisme. Nous avons produit, en vingt ans, près de deux cents expositions depuis notre première adresse du quartier des Abbesses jusqu’à notre espace de la rue de Charonne.

En quoi l’exposition HEY! est-elle particulièrement pertinente dans ce lieu ?

Nous connaissons Anne & Julien depuis le tout début de la galerie. Alors journalistes pour Nova Magazine, ils chroniquaient régulièrement nos expositions pour ce qui était une incarnation en kiosque de Radio Nova. Nous avons en commun de nous intéresser aux marges de la création contemporaine, tout en étant complémentaires. La plupart des artistes que nous représentons chez Arts Factory sont issus de l’underground français et de l’édition indépendante, mais nous invitons également des créateurs proches de l’art outsider ou du pop surréalisme. Anne & Julien s’intéressent également depuis de nombreuses années à toute cette production, mais aussi au street art, aux comics, au tatouage et aux arts populaires. Nous avions par ailleurs collaboré aux expositions HEY! à la Halle Saint-Pierre en prêtant certaines œuvres ou en animant la galerie du bas du musée ; il était donc logique, voire inévitable, de s’associer avec eux pour ce premier « HEY! Gallery Show » !

Erdeven Djess, « À la Hussarde ! », 2015, dtylo bille, 220 x 150 cm © Éric Carrère (photographie)

La galerie Arts Factory a un espace librairie conséquent, ce qui est très rare pour une galerie ; pourquoi donner une telle importance aux publications ?

La passion des livres illustrés et des papiers parfois sauvagement encrés a été le point de départ de bon nombre d’expositions chez Arts Factory. En choisissant de mettre à l’honneur des artistes publiés par des structures issues du milieu alternatif comme Le Dernier Cri, United Dead Artists, FLTMSTPC, Re:Surgo!, L’Association, Cornélius, Frémok ou Les Requins Marteaux, la galerie s’est rapidement dotée d’un fonds renouvelé en permanence. L’espace librairie propose un assortiment inédit d’ouvrages : graphzines sérigraphiés ou imprimés en risographie, accompagnés d’une sélection de romans graphiques ou de monographies références. En contrepoint des œuvres originales présentées, un large choix d’éditions limitées permet de ne frustrer personne, les visiteurs ayant la possibilité de repartir avec un print signé de leur artiste préféré pour un budget souvent compris entre dix et cent euros !

Pourquoi « Arts Factory » ?

C’est une double référence, à la fois à la Factory d’Andy Warhol et au label Factory Records de Manchester, la musique étant très présente dans notre programmation. Nous proposons justement dans l’espace librairie une sélection de vinyles et organisons régulièrement des showcases ou des cartes blanches avec des labels indépendants. Pour l’anecdote, le local que nous occupons aujourd’hui était déjà un lieu culturel dans les années 1980, il a accueilli en 1986 la seule exposition d’Andy Warhol spécialement conçue pour une galerie française. D’une Factory à l’autre, nous avons retrouvé par hasard les photos du vernissage en rangeant la réserve !

Stan Manoukian, « The Overlord », 2016, feutre permanent sur papier Arches 330 gr., 50 x 40 cm © Arts Factory / HEY!

Anne, de HEY!,  parle à son tour de l’exposition

Quelle est la visée de cette exposition ?

La scène que nous défendons depuis trente ans est vivante, hétérogène, complexe : ses multiples courants la font entrer de plain-pied dans l’histoire de l’art contemporain. Et pourtant, les artistes qui les peuplent et les œuvres qu’ils formulent ne sont jamais regardés à leur juste valeur. Nous travaillons à changer cela. C’est une des raisons de cette exposition-vente.

Pourquoi est-ce important d’exposer des artistes de différentes nationalités ?

La scène que nous défendons est, de fait, internationale. Nous n’y pouvons pas grand-chose. Nous ne faisons que retransmettre, sans inventer des règles qui détruisent les artistes.

Madmeg, « Patriarche n°2 » © Arts Factory / HEY!

Qu’est-ce qui prime, la diversité des artistes ou la cohérence de l’exposition ? 

Représenter les diverses familles de l’outsider pop : bande dessinée, images uniques, poster rock, surréalisme pop et lowbrow, outsider art et arts en marge. La cohérence de l’exposition naît de l’association de ces cousinages, et de leur mise en perspective.

Comment faire pour que l’anti-académisme et la contre-culture ne deviennent pas à leur tour une norme ?

Croire que la contre-culture peut devenir une norme est ne pas connaître ou comprendre la contre-culture. En se baladant dans une foire d’art, croire qu’il est normal que l’ensemble des œuvres présentées se ressemblent est une grave erreur. La normalisation établie par le marché est grave, et nous sommes malheureusement très loin du fantasme proposé dans votre question.

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